DEBAT :
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STATUT D'EDF-GDF
M. le président. La parole est à M. François Brottes, pour le groupe socialiste.
M. François Brottes. Monsieur le Premier ministre, la journée d'hier fut en quelque sorte celle du déminage des sujets délicats. Votre ministre de l'économie a ainsi expliqué, sur le ton de « Circulez, il n'y a rien à voir », peut-être par nostalgie pour ses anciennes fonctions (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), qu'EDF ne serait pas privatisée et que ses personnels ne changeraient pas de statut.
Il s'agit d'une question grave...
M. Edouard Landrain. Alors, ne prenez pas ce ton !
M. François Brottes. ... qui mérite autre chose que la polémique, le mensonge et l'excitation (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), comme vient encore de les pratiquer M. Sarkozy répondant à Didier Migaud, qui demandait un audit, demande qui reste sans réponse. Pourtant, c'est un outil bien utile puisqu'il permet d'établir la vérité, notamment que le premier déficit budgétaire sur le plan national date de 1975, alors que M. Jacques Chirac était premier ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Alain Néri. Il ne faut pas l'oublier !
M. François Brottes. S'agissant d'EDF, non, nous n'avons jamais signé l'ouverture totale du marché de l'électricité à la concurrence. Au contraire, Lionel Jospin avait obtenu que les ménages ne soient pas concernés. C'est bien le gouvernement Raffarin II qui, non seulement n'a pas défendu ce garde-fou, mais a demandé à Mme Fontaine de faire du zèle au niveau européen pour qu'en acceptant la déréglementation totale et rapide du marché de l'électricité, la France apparaisse comme un bon élève du libéralisme débridé.
En rappelant à tous que l'ouverture à la concurrence n'impose, ni mécaniquement, ni juridiquement la privatisation, les Français doivent savoir que le marché de l'électricité n'a rien à voir avec la vente de savonnettes ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Francis Delattre. N'importe quoi !
M. François Brottes. Il en va de l'indépendance énergétique nationale, de la sécurité des installations de production, notamment des barrages et des centrales nucléaires, de l'égalité des tarifs sur l'ensemble du territoire, d'un coût de l'énergie compatible avec les revenus des plus modestes, car l'énergie est indispensable à la vie,...
M. Jean Leonetti. Débranchez-le !
M. François Brottes. ... du maintien du professionnalisme des agents qui aujourd'hui garantissent la qualité et la continuité du service, de la régularité des investissements lourds pour garantir la pérennité des installations, y compris pour les énergies renouvelables,...
M. Jean-Marc Roubaud. La question !
M. François Brottes. ... de l'avenir de la planète, compte tenu de l'impact de ce marché sur la qualité de l'environnement.
M. le président. Monsieur Brottes, posez votre question, s'il vous plaît !
M. François Brottes. J'y viens, monsieur le président.
M. le président. Il ne faut pas y venir, mais y arriver !
M. François Brottes. Monsieur le président, je pense que vous serez d'accord avec moi : on ne vend pas à la Bourse l'indépendance énergétique nationale et la sécurité des installations nucléaires.
Monsieur le Premier ministre, en marchandant tout ou partie d'EDF par idéologie ou pour boucher les trous du déficit, allez-vous abandonner aux intérêts privés une entreprise publique d'une telle envergure, incontestablement stratégique pour le pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat, ministre de l'économie, des
finances et de l'industrie. Il faut donc faire là aussi un travail pédagogique ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
La première transposition d'une directive ouvrant à la concurrence le marché français de l'énergie date de février 2000. Sans polémiquer, on peut rappeler que le premier ministre était alors Lionel Jospin. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Jean Glavany. Et alors ?
M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. La deuxième ouverture à la concurrence a eu lieu en mars 2002, lors du sommet de Barcelone. La décision prise vise à porter l'ouverture à la concurrence du marché français de l'énergie de 30 % à 70 %. Qui était alors premier ministre ? Lionel Jospin. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Si ça ne lui plaisait pas, il ne fallait pas qu'il se gêne mais qu'il se lève et dise : je n'en veux pas ! Il ne l'a pas fait. C'est la vérité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Mieux, lors du sommet de Barcelone, Lionel Jospin ne se contente pas d'accepter l'ouverture à la concurrence du marché de l'énergie pour tous les professionnels, il accepte qu'une date soit fixée pour discuter de l'ouverture à la concurrence du marché des particuliers. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. François Hollande. C'est faux !
Mme Martine David. Mensonge !
M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Alors que vous avez choisi la concurrence à trois reprises, vous venez maintenant nous demander de ne pas donner à EDF les moyens de son développement.
Le statut des agents d'EDF-GDF ne sera modifié, ni aujourd'hui, ni demain, ni de près, ni de loin.
M. François Hollande. Ce n'est pas le sujet !
M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je leur demande de croire en la parole du Gouvernement de la France (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) et non dans la parole de ceux qui les ont laissé tomber hier et qui voudraient faire croire aujourd'hui qu'ils sont leurs défenseurs. Il y a des limites à l'hypocrisie et au mensonge ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
EDF-GDF ne sera pas privatisée, ni aujourd'hui, ni demain pour une raison simple : le Gouvernement de la France veut que l'Etat conserve la majorité du capital de cette grande entreprise.
M. François Hollande. Il l'a dit !
M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Nous en débattrons d'ailleurs puisque la loi fixera un seuil minimum qui est actuellement de 51 %. Le Gouvernement est tout à fait prêt à discuter avec le Parlement pour relever ou non ce seuil. Voilà la vérité. Il n'est pas utile de polémiquer quand il s'agit de l'emploi de 140 000 électriciens et gaziers. Cela compte plus pour moi que vos vociférations ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
M. Julien Dray. C'est une privatisation rampante !
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