FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 1250  de  M.   de Villiers Philippe ( Députés n'appartenant à aucun groupe - Vendée ) QG
Ministère interrogé :  affaires étrangères
Ministère attributaire :  affaires étrangères
Question publiée au JO le :  08/04/2004  page : 
Réponse publiée au JO le :  08/04/2004  page :  2677
Rubrique :  Union européenne
Tête d'analyse :  élargissement
Analyse :  Turquie. perspectives
DEBAT :

ADHÉSION DE LA TURQUIE À L'UNION EUROPÉENNE

    M. le président. La parole est à M. Philippe de Villiers, député non inscrit.
    M. Philippe de Villiers. Monsieur le Premier ministre, je n'ai pas été satisfait par la réponse de M. Barnier à la question de M. Rudy Salles. C'est pourquoi, je souhaite que ce soit bien vous qui me répondiez et non M. Sarkozy (Murmures sur divers bancs), dont le talent est toutefois immense.
    Le processus d'entrée de la Turquie dans l'Union européenne a été enclenché en décembre 1999, au Conseil européen d'Helsinki, par Jacques Chirac et Lionel Jospin, en conférant à la Turquie le statut d'Etat candidat. Ce processus de négociations sera poursuivi, nous dit-on, en octobre, avec une recommandation de la Commission puis une décision du Conseil européen qui fixera la date d'ouverture des négociations. Après, les choses seront irréversibles.
    Je voudrais me faire le porte-parole de très nombreux Français qui considèrent que l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne est un non-sens géopolitique. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française et sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Monsieur le Premier ministre, je vous poserai trois questions.
    Premièrement, est-ce sur la consigne personnelle du Président de la République que les députés européens de l'UMP ont voté le 11 mars dernier pour que la langue turque soit acceptée comme langue officielle de l'Union européenne ?
    Deuxièmement, M. Michel Barnier, votre commissaire européen aux affaires étrangères (Murmures sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)... C'est un lapsus ?
    M. le président. Poursuivez, monsieur de Villiers ! On sait que vous ne faites pas souvent de lapsus...
    M. Philippe de Villiers. Ça doit être un lapsus.
    M. Barnier, le ministre des affaires étrangères du gouvernement de la France, a déclaré le 26 novembre 2002 : « Pour la Turquie, une promesse a été faite. Elle peut devenir un pont entre l'immense continent asiatique et l'Europe. Voilà pourquoi je suis favorable à une adhésion future de la Turquie. »
    M. Jacques Floch. Très bien !
    M. Philippe de Villiers. Troisièmement, il semble, et ce point de vue est partagé par nombre de Français, que ce sujet grave doive être tranché par le peuple français consulté par référendum. Monsieur le Premier ministre, êtes-vous favorable à ce référendum ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française et sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.
    M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères. Monsieur le député, tout en ayant beaucoup de respect pour votre fonction et pour votre personne, je n'ai pas trouvé correct votre faux lapsus. Ce n'est pas convenable. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Si vous voulez que nous discutions sérieusement, franchement, sans artifice, de cette question qui le mérite, je vous demande de me respecter dans ma fonction de ministre français des affaires étrangères.
    Premièrement, les langues officielles de l'Union européenne sont celles des quinze pays membres et seront demain celles des Vingt-cinq et seulement celles-là.
    Deuxièmement, je rappellerai l'histoire et l'actualité. Le processus d'une éventuelle adhésion de la Turquie ne date pas de 1999, mais a été confirmé en 1999 au cours d'un Conseil européen auquel ont participé le Président de la République et le premier ministre de l'époque, Lionel Jospin. Ce processus a été engagé en 1963 et j'ai dit tout à l'heure, en faisant attention à ce que je disais, que les deux chefs d'Etat des deux principaux pays de l'Union étaient à l'époque le général de Gaulle et le chancelier chrétien-démocrate allemand Konrad Adenauer. Déjà, à cette époque, ces hommes d'Etat européens pensaient à autre chose qu'aux seuls intérêts nationaux et ne regardaient pas derrière eux. Ils ne vivaient pas tournés vers le xixe ou le xviiie siècle, mais tenaient compte de la géopolitique, mot que vous avez employé.
    M. Maurice Leroy. N'oubliez pas la géographie !
    M. le ministre des affaires étrangères. Ce n'est donc pas par hasard qu'ils ont voulu engager un dialogue avec ce grand pays qui est à la charnière, en effet, entre deux continents. Depuis 1963, cette perspective n'a jamais été interrompue.
    Je confirme qu'il n'est pas question d'une entrée de la Turquie à moyen ou à court terme dans les circonstances actuelles. Les critères sont connus. Quand on veut adhérer à l'Union européenne, il faut respecter un cahier des charges extrêmement précis qui touche à la fois aux conditions politiques - droits de l'homme, démocratie - et aux conditions économiques et sociales. Pour l'instant, je constate que la Turquie ne respecte pas ce cahier des charges, même si elle s'y prépare.
    M. Jean Dionis du Séjour. Un référendum !
    M. le ministre des affaires étrangères. Il reviendra à la Commission, comme c'est son rôle, de proposer d'engager des négociations d'adhésion. Ce n'est pas le cas aujourd'hui.
    Monsieur de Villiers, quand vous dites, comme vous allez le répéter dans les prochaines semaines, que la Turquie entrera dans l'Union européenne demain ou après-demain, ce n'est pas la vérité.
    M. Philippe de Villiers. Un référendum !
    M. le ministre des affaires étrangères. Je vous recommande d'aborder ce débat en ayant le souci de la vérité et de la sincérité. C'est en tout cas de cette manière que je suis prêt à débattre avec vous et avec tous ceux qui le voudront. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président.

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