FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 1260  de  M.   Lefort Jean-Claude ( Député-e-s Communistes et Républicains - Val-de-Marne ) QOSD
Ministère interrogé :  santé et solidarités
Ministère attributaire :  santé et solidarités
Question publiée au JO le :  21/06/2005  page :  6145
Réponse publiée au JO le :  22/06/2005  page :  3786
Rubrique :  établissements de santé
Tête d'analyse :  maternités
Analyse :  maintien hôpital Jean-Rostand. Ivry
Texte de la QUESTION : M. Jean-Claude Lefort est de nouveau conduit à s'adresser à M. le ministre de la santé et des solidarités sur le devenir de la maternité de l'hôpital Jean-Rostand à Ivry. Depuis cinq ans maintenant les populations, les personnels hospitaliers et les élus du secteur sont mobilisés pour le maintien de cet hôpital public de proximité dont la fermeture a été programmée par l'ARH et l'AP-HP par transfert de ses 3 services vers d'autres sites. La cardiologie à la Pitié, la rééducation fonctionnelle à Charles-Foix et la maternité à Bicêtre dans le cadre de la création d'une maternité de niveau 3 au CHU. Dans le contexte de pénurie de structures obstétricales que connaît le Val-de-Marne ce projet a des conséquences particulièrement graves. 11 sitesaccouchements ont disparu de ce département de 1992 à 2002 et seules 2 maternités, les Noriets à Vitry et Jean-Rostand à Ivry, restent sur les 13 communes de ce coté de la Seine dans le Val-de-Marne dont le taux d'équipement en obstétrique est l'un des plus faibles d'Ile-de-France. Cette situation est encore aggravée par une augmentation de la population et du taux de fécondité. Les communes concernées accueillent pour une part importante une population fragilisée qui présente le plus grand nombre de grossesses insuffisamment suivies pour lesquelles la proximité et un accompagnement spécifique sont indispensables. La création d'une maternité de niveau 3 à l'hôpital du Kremlin-Bicêtre est nécessaire elle ne doit cependant pas être réalisée au détriment de la maternité de Jean-Rostand mais au contraire en complémentarité avec cette dernière. Il lui demande de mettre un terme à ce projet dévastateur.
Texte de la REPONSE :

PERSPECTIVES DE LA MATERNITE
DE L'HOPITAL JEAN-ROSTAND A IVRY

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Lefort, pour exposer sa question, n° 1260.
M. Jean-Claude Lefort. En 1999, l'AP-HP et l'ARH annonçaient la fermeture de l'hôpital public de proximité Jean-Rostand à Ivry, dans ma circonscription, cette fermeture s'effectuant par transferts successifs de ses trois services vers d'autres sites. La cardiologie a été déplacée à la Pitié en 2001, la rééducation fonctionnelle doit l'être en 2006-2007 à Charles-Foix à Ivry, et la maternité, qui est au coeur de cet équipement, à l'hôpital du Kremlin-Bicêtre à l'horizon 2007-2008.
Le procédé utilisé pour justifier ces fermetures injustifiables est bien connu. Les agences régionales d'hospitalisation, qui se moquent de l'opinion des politiques tels que les élus, opèrent de la même façon partout en France : regroupements, transferts, fermetures de services. Ainsi, on vide les établissements publics de leurs moyens, souvent au profit de cliniques privées, et cela aboutit à la fermeture d'hôpitaux de proximité.
Dans le contexte de grave pénurie de structures obstétricales que connaît mon département, le Val-de-Marne, la fermeture de la maternité Jean-Rostand aurait des conséquences graves amplifiant l'insupportable. Dans ce département, en effet, depuis 1993, ce ne sont pas moins de dix maternités qui ont été fermées et, dans le bassin de population qui concerne Jean-Rostand, ce sont quatorze communes et 400 000 habitants qui sont concernés. Il ne reste plus aujourd'hui que deux maternités, celle de Jean-Rostand comprise. Cette partie du Val-de-Marne où j'habite est l'un des secteurs dont le taux d'équipement en obstétrique est l'un des plus faible d'Île-de-France.
La création d'une maternité de niveau 3 à l'hôpital du Kremlin-Bicêtre, que je soutiens depuis qu'elle est annoncée, ne palliera pas ce manque cruel de moyens. Les communes concernées par la maternité Jean Rostand accueillent pour une part importante des populations fragilisées socialement, économiquement, qui présentent le plus grand nombre de grossesses insuffisamment suivies pour lesquelles il faut un accompagnement spécifique et la proximité, dans tous les sens de l'acception de ce terme : géographique mais aussi humaine.
Si je réitère mon plein accord à la création d'une maternité de niveau 3 au Kremlin-Bicêtre, celle-ci, par contre, doit se faire en partenariat avec Jean-Rostand et non à son détriment, plus exactement par sa disparition.
Ces deux maternités peuvent travailler en réseau : Jean-Rostand pourrait réaliser 1 500 accouchements par an, au lieu de 2 300 actuellement, tandis que les femmes présentant des grossesses à risque seraient dirigées vers la maternité du Kremlin-Bicêtre.
Jean-Rostand, établissement à dimension humaine, pourrait développer un service de néonatologie pour les nouveau-nés présentant des problèmes peu graves, et il pourrait également y être créée une structure d'accompagnement des femmes rencontrant des difficultés médicales et/ou psychologiques pendant leur grossesse. Aujourd'hui, il n'existe qu'un seul établissement de ce type en région parisienne, au Vésinet. Il ne peut évidemment répondre à la demande.
Les propositions qui sont les nôtres ne correspondent pas aux orientations de vos prédécesseurs, qui ont méprisé le politique pour se réfugier derrière le technique.
Monsieur le ministre, tout récemment, deux de vos collègues ont montré qu'il était possible de revenir sur des décisions considérées comme inévitables, et cela sous le poids du politique. Cette façon de faire n'a rien de choquant, tout au contraire. Elle est salutaire lorsque les décisions antérieures étaient mauvaises. C'est précisément le cas avec le projet de suppression de la maternité de Jean-Rostand. Je vous demande donc de suivre la voie de la sagesse empruntée par vos deux collègues et de revenir sur cette mort annoncée d'une maternité que rien ne peut remplacer.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.
M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le député, vous avez bien voulu appeler l'attention du Gouvernement sur le devenir d'un site de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, le site Jean-Rostand à Ivry.
Je tiens tout d'abord à réaffirmer mon attachement à ce que nos concitoyens disposent d'un égal et facile accès à des soins de qualité. C'est fort de ce principe que je suis attentivement l'évolution de ce dossier, avec Xavier Bertrand.
Le site hospitalier de Jean-Rostand comporte aujourd'hui deux services : une maternité et un service de rééducation fonctionnelle. Pour proposer aux malades un service moderne, notamment sur le plan hôtelier, l'activité de rééducation fonctionnelle devrait être transférée à la fin de l'année 2007 vers le site Charles-Foix, qui est situé à moins de deux kilomètres, dans un bâtiment rénové.
La décision de fermeture de la maternité est, pour sa part, guidée par des enjeux de sécurité des soins et du bâti. En particulier, cet établissement, malgré la grande compétence des personnels qui y travaillent, n'offre plus la couverture médicale qu'un grand centre hospitalier universitaire est en devoir d'offrir : taille critique insuffisante pour organiser la continuité de la prise en charge médicale, isolement géographique, couverture néonatale et pédiatrique insuffisante.
Au vu de ce constat, le choix a été fait de construire une maternité de niveau 3 à l'hôpital du Kremlin-Bicêtre, site hospitalier de taille plus importante et plus propice à un tel projet. Cette opération suppose pour aboutir le transfert de l'ensemble de l'équipe de Jean-Rostand, ainsi que des moyens additionnels en provenance d'autres hôpitaux de l'AP-HP, dans un contexte de démographie médicale défavorable.
Sur le plan quantitatif, la nouvelle maternité de Bicêtre sera en mesure de réaliser 3 000 à 3 500 accouchements chaque année, soit 1 300 de plus qu'à l'heure actuelle. Elle comportera en effet soixante-quinze lits, dont dix lits de gynécologie, contre quarante-huit lits actuellement à Jean-Rostand.
Sur le plan qualitatif, cette maternité de niveau 3 constituera le premier et unique plateau technique périnatal de ce type dans le département du Val-de-Marne. Elle pourra ainsi jouer un rôle important dans le pilotage du réseau femme-mère-enfant. Le chantier devrait être terminé en 2008.
Il me semble utile de souligner que la nouvelle implantation de la maternité ne sera en aucun cas pénalisante pour la population d'Ivry, car cette dernière ne sera pas plus éloignée qu'elle ne l'est actuellement de Jean-Rostand, c'est-à-dire d'un kilomètre et demi.
Il est également important de signaler que le professeur René Frydmann et les directeurs exécutifs des GHU Est et Sud de l'AP-HP, ont pris l'attache des élus du conseil général du Val-de-Marne et de la mairie d'Ivry aux fins d'engager une réflexion sur les formes alternatives à l'hospitalisation traditionnelle - centre périnatal de proximité, hôtel maternel, soins de suite périnataux - pouvant prendre place éventuellement sur le site de Jean-Rostand et s'intégrer dans le réseau périnatal du Val-de-Marne, avec un opérateur gestionnaire autre que l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris.
Dans ce contexte, il me semble que le projet global proposé par l'AP-HP s'inscrit bien dans une démarche performante pour les soins et un souci de proximité.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Lefort.
M. Jean-Claude Lefort. Monsieur le ministre, vous êtes aussi sourd que votre prédécesseur. C'est vraiment dommage. Vous arrivez au gouvernement, il aurait été bien de prendre la main que je vous ai tendue.
Les arguments qu'on a rédigés pour vous sont largement dépassés ou à côté de la vérité. C'est très important de voir les choses en face. Parler d'insécurité des soins dans une maternité qui réalise 2 300 accouchements par an me paraît être de l'ordre du fantasme le plus total. En vérité, derrière cet argument se cache une restriction de l'offre en matière de maternités.
Vous avez indiqué que cela ne pénaliserait pas les habitants d'Ivry parce que le Kremlin-Bicêtre est à un kilomètre et demi de cette maternité mais, monsieur le ministre, on y vient de quatorze communes, c'est un bassin de population de 400 000 personnes qui est concerné. Votre argument du kilométrage, du millimétrage comptable, de même que comptable vous êtes en matière de sécurité sociale, est absolument irrecevable.
Quant à dire qu'une fois vidée cette maternité du service public, les collectivités locales pourront la réinvestir à leurs frais, c'est absolument intolérable et inacceptable.

CR 12 REP_PUB Ile-de-France O