Texte de la REPONSE :
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IMPLANTATION D'UN PARC EOLIEN EN ZONE FRONTALIERE Mme la présidente. La parole est à M. Henri
Sicre, pour exposer sa question, n° 1271, relative à l'implantation d'un parc
éolien en zone frontalière. M. Henri Sicre. Madame la
ministre, je suis député d'une circonscription frontalière avec l'Espagne et
environnementalement très protégée, submergée de projets de parcs éoliens. Sur
le versant français des Pyrénées, nous travaillons dans le respect de notre
patrimoine naturel, en incitant les communes à utiliser les documents
d'urbanisme à leur disposition. Nous avons également pris en charge ce dossier à
l'échelle transfrontalière et en sommes à la phase de présentation d'un dossier
de candidature du paysage méditerranéen des Pyrénées au titre du patrimoine
mondial de l'UNESCO. Nous découvrons fréquemment de nouveaux projets pour
lesquels les entreprises engagent des négociations avec les propriétaires de
terrains en vue de l'implantation d'éoliennes. Lorsque ce n'est pas sur notre
territoire, c'est de l'autre côté de la frontière, sur la crête. C'est
aujourd'hui le cas, avec un projet d'implantation en Espagne d'une quarantaine
de mâts, qui nous ferait subir toutes les nuisances, notamment visuelles. En
France, en vue d'organiser la production de l'énergie éolienne, les zones de
développement de l'éolien sont définies en fonction de leur " potentiel éolien
", de l'état des réseaux électriques et de la nécessaire protection des paysages
par le préfet du département sur proposition de la ou des communes concernées.
L'avis des communes limitrophes du projet sera recueilli ainsi que celui de la
commission départementale des sites. Le Languedoc-Roussillon, et en
particulier le département des Pyrénées-Orientales, bénéficient d'un important
gisement éolien. La région représente aujourd'hui 31 % de la puissance
installée. En 2004, elle a fourni 44 % de la production éolienne nationale. Une
organisation de la production semblait donc nécessaire. La préfecture de
l'Aude vient d'éditer une brochure intitulée Code de bonnes conduites
pour l'implantation raisonnée de l'éolien dans l'Aude, qui instaure une
démarche de concertation territoriale. Dans les Pyrénées-Orientales, nous
découvrons les projets par la presse ou par les citoyens qui s'organisent en
associations et demandent le soutien des élus. Il en va de même, et c'est un
problème, pour les projets réalisés dans un État voisin, sur lesquels nous
n'avons pas d'informations précises. Madame la ministre, est-il prévu la
création d'un document tel qu'un schéma régional d'implantation éolien, qui
fasse une place à la démocratie participative ? Plus particulièrement, quels
sont les moyens dont disposent tant l'administration que les élus pour
participer de manière concrète à tout projet mis en oeuvre sur le territoire
espagnol ? J'ai lu qu'une enquête publique pourrait être organisée sur notre
territoire - mais encore faut-il qu'une commune de notre espace rural et de
montagne revendique l'organisation d'une telle enquête ! Plus important, si
le projet d'une quarantaine de mâts était réalisé au col des Panissars,
haut-lieu historique où passait la Via Domitia et où s'élevait le trophée de
Pompée, la crête frontalière serait jalonnée, depuis la mer, de projets de parcs
éoliens. La France met-elle à la disposition des élus et des administrations les
outils d'une concertation sur ce thème et est-elle prête à engager une
concertation avec l'Espagne pour limiter les nuisances tant visuelles
qu'environnementales sur notre territoire national ? Mme la
présidente. La parole est à Mme la ministre de l'écologie et du
développement durable. Mme Nelly Olin, ministre de
l'écologie et du développement durable. Monsieur le député, je suis très
sensible à votre question, qui me donne l'occasion de dire à quel point je suis
attachée à la préservation de nos paysages. Votre question fait également
apparaître un sujet très intéressant : celui de la concertation
transfrontalière, car beaucoup de problèmes peuvent en effet se poser avec les
pays qui partagent notre frontière. Je souhaite d'abord saisir cette occasion
pour vous dire que la question de l'éolien a fait, comme vous le savez, l'objet
d'un large débat au Parlement, dans le cadre de la discussion sur la loi
d'orientation sur l'énergie - débat que j'ai trouvé très constructif. Le
Gouvernement, vous le savez, a toujours défendu un développement harmonieux,
raisonné et équilibré de la filière éolienne, qui tienne compte du respect de
nos paysages aussi bien que des avantages en termes de lutte contre le
changement climatique. Je vous rappelle que la France s'est engagée, au plan
européen, à atteindre 21 % d'électricité d'origine renouvelable en 2010. Nous en
sommes encore loin aujourd'hui avec 13 % d'électricité renouvelable,
essentiellement hydraulique. Nous avons donc encore beaucoup d'efforts à faire
pour diversifier notre bouquet énergétique. La récente flambée des prix du
pétrole, à près de 60 dollars le baril, montre bien que cette diversification
énergétique est indispensable pour l'indépendance de notre pays et l'avenir de
nos énergies. La réglementation de l'éolien tient déjà compte des paysages.
Les préfets, qui octroient les permis de construire des éoliennes, prennent
largement en compte ces aspects. La loi sur l'énergie va permettre d'aller
encore plus loin, en ciblant les projets éoliens sur des zones de développement
éolien définies sur proposition des communes concernées, après consultation des
communes limitrophes et de la commission départementale des sites et paysages.
En même temps, le seuil de 12 mégawatts disparaît, évitant ainsi le mitage des
projets que favorisait la réglementation précédente. Votre question sur les
projets éoliens qui se situent en territoire espagnol, et qui dépendent donc du
droit espagnol, doit nous encourager à agir en concertation avec nos homologues
de ce pays. Je veillerai donc personnellement à ce que les préfets, en liaison
avec les associations transfrontalières et les collectivités, se saisissent de
ce sujet. Nous avons un intérêt partagé avec nos voisins espagnols à préserver
ce cadre d'exception des Pyrénées, qui est notre patrimoine commun. Je ne
manquerai pas de vous communiquer les suites de cette concertation, et me
rapprocherai de mon homologue espagnol. M. la présidente. La
parole est à M. Henri Sicre. M. Henri Sicre. Merci, madame
la ministre, pour cette réponse. Cependant, si l'organisation adoptée récemment
sur notre territoire prévoit une très large concertation, notamment avec les
communes limitrophes, le problème dont il est question aujourd'hui est lié à des
relations d'État à État, et peut connaître une accélération subite. Si donc
la concertation que vous évoquez est engagée, elle devrait l'être très
rapidement. En effet, le sommet franco-espagnol qui aurait dû se tenir au mois
de mai et a été annulé - à cause sans doute de la campagne référendaire - aurait
pu se solder par des décisions très mutilantes pour le territoire que j'ai
l'honneur de représenter à l'Assemblée nationale, en autorisant le passage d'une
ligne à très haute tension - plusieurs fois 400 000 volts ! - pour le transport
d'électricité à travers nos paysages. Au même titre que le passage de cette
ligne, qui pose des problèmes de protection tant des paysages que de la santé,
je vous suggère donc, madame la ministre, que ce dossier puisse être évoqué au
plus tard lors du prochain sommet franco-espagnol, prévu pour le mois de
septembre.
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