FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 1271  de  M.   Sicre Henri ( Socialiste - Pyrénées-Orientales ) QOSD
Ministère interrogé :  écologie
Ministère attributaire :  écologie
Question publiée au JO le :  28/06/2005  page :  6314
Réponse publiée au JO le :  29/06/2005  page :  4001
Rubrique :  politique extérieure
Tête d'analyse :  Espagne
Analyse :  implantation d'éoliennes. zone frontalière. réglementation
Texte de la QUESTION : M. Henri Sicre attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie et du développement durable sur le développement des parcs éoliens. Député d'une circonscription frontalière avec l'Espagne et environnementalement protégée, nous sommes submergés de projets de parcs éoliens. Nous travaillons tous pour protéger du mieux possible notre patrimoine naturel, en incitant les communes à utiliser les documents d'urbanisme à leur disposition et en portant un projet de classement Unesco. Notre territoire est très largemente couvert par des ZNIEFF, Natura 2000 et autres ZICO. Fréquemment, nous découvrons de nouveaux projets dans le cadre desquels les entreprises engagent des négociations avec les propriétaires de terrains pour implanter des éoliennes. Lorsque ce n'est pas sur notre territoire, c'est de l'autre côté de la crête-frontière. Un projet de 40 mâts qui serait implanté en Espagne nous ferait subir toutes les nuisances, notamment visuelles. Il lui demande quels sont les moyens d'une part pour participer de manière concrète, et non à titre consultatif, à tout projet se développant sur le territoire espagnol et entraînant des conséquences sur le territoire national et, d'autre part, de quels moyens disposons-nous pour lutter contre l'implantation d'un parc éolien dans un secteur sensible.
Texte de la REPONSE :

IMPLANTATION D'UN PARC EOLIEN
EN ZONE FRONTALIERE

Mme la présidente. La parole est à M. Henri Sicre, pour exposer sa question, n° 1271, relative à l'implantation d'un parc éolien en zone frontalière.
M. Henri Sicre. Madame la ministre, je suis député d'une circonscription frontalière avec l'Espagne et environnementalement très protégée, submergée de projets de parcs éoliens. Sur le versant français des Pyrénées, nous travaillons dans le respect de notre patrimoine naturel, en incitant les communes à utiliser les documents d'urbanisme à leur disposition. Nous avons également pris en charge ce dossier à l'échelle transfrontalière et en sommes à la phase de présentation d'un dossier de candidature du paysage méditerranéen des Pyrénées au titre du patrimoine mondial de l'UNESCO.
Nous découvrons fréquemment de nouveaux projets pour lesquels les entreprises engagent des négociations avec les propriétaires de terrains en vue de l'implantation d'éoliennes. Lorsque ce n'est pas sur notre territoire, c'est de l'autre côté de la frontière, sur la crête. C'est aujourd'hui le cas, avec un projet d'implantation en Espagne d'une quarantaine de mâts, qui nous ferait subir toutes les nuisances, notamment visuelles.
En France, en vue d'organiser la production de l'énergie éolienne, les zones de développement de l'éolien sont définies en fonction de leur " potentiel éolien ", de l'état des réseaux électriques et de la nécessaire protection des paysages par le préfet du département sur proposition de la ou des communes concernées. L'avis des communes limitrophes du projet sera recueilli ainsi que celui de la commission départementale des sites.
Le Languedoc-Roussillon, et en particulier le département des Pyrénées-Orientales, bénéficient d'un important gisement éolien. La région représente aujourd'hui 31 % de la puissance installée. En 2004, elle a fourni 44 % de la production éolienne nationale. Une organisation de la production semblait donc nécessaire.
La préfecture de l'Aude vient d'éditer une brochure intitulée Code de bonnes conduites pour l'implantation raisonnée de l'éolien dans l'Aude, qui instaure une démarche de concertation territoriale.
Dans les Pyrénées-Orientales, nous découvrons les projets par la presse ou par les citoyens qui s'organisent en associations et demandent le soutien des élus. Il en va de même, et c'est un problème, pour les projets réalisés dans un État voisin, sur lesquels nous n'avons pas d'informations précises.
Madame la ministre, est-il prévu la création d'un document tel qu'un schéma régional d'implantation éolien, qui fasse une place à la démocratie participative ? Plus particulièrement, quels sont les moyens dont disposent tant l'administration que les élus pour participer de manière concrète à tout projet mis en oeuvre sur le territoire espagnol ? J'ai lu qu'une enquête publique pourrait être organisée sur notre territoire - mais encore faut-il qu'une commune de notre espace rural et de montagne revendique l'organisation d'une telle enquête !
Plus important, si le projet d'une quarantaine de mâts était réalisé au col des Panissars, haut-lieu historique où passait la Via Domitia et où s'élevait le trophée de Pompée, la crête frontalière serait jalonnée, depuis la mer, de projets de parcs éoliens. La France met-elle à la disposition des élus et des administrations les outils d'une concertation sur ce thème et est-elle prête à engager une concertation avec l'Espagne pour limiter les nuisances tant visuelles qu'environnementales sur notre territoire national ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
Mme Nelly Olin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le député, je suis très sensible à votre question, qui me donne l'occasion de dire à quel point je suis attachée à la préservation de nos paysages. Votre question fait également apparaître un sujet très intéressant : celui de la concertation transfrontalière, car beaucoup de problèmes peuvent en effet se poser avec les pays qui partagent notre frontière.
Je souhaite d'abord saisir cette occasion pour vous dire que la question de l'éolien a fait, comme vous le savez, l'objet d'un large débat au Parlement, dans le cadre de la discussion sur la loi d'orientation sur l'énergie - débat que j'ai trouvé très constructif.
Le Gouvernement, vous le savez, a toujours défendu un développement harmonieux, raisonné et équilibré de la filière éolienne, qui tienne compte du respect de nos paysages aussi bien que des avantages en termes de lutte contre le changement climatique. Je vous rappelle que la France s'est engagée, au plan européen, à atteindre 21 % d'électricité d'origine renouvelable en 2010. Nous en sommes encore loin aujourd'hui avec 13 % d'électricité renouvelable, essentiellement hydraulique. Nous avons donc encore beaucoup d'efforts à faire pour diversifier notre bouquet énergétique. La récente flambée des prix du pétrole, à près de 60 dollars le baril, montre bien que cette diversification énergétique est indispensable pour l'indépendance de notre pays et l'avenir de nos énergies.
La réglementation de l'éolien tient déjà compte des paysages. Les préfets, qui octroient les permis de construire des éoliennes, prennent largement en compte ces aspects. La loi sur l'énergie va permettre d'aller encore plus loin, en ciblant les projets éoliens sur des zones de développement éolien définies sur proposition des communes concernées, après consultation des communes limitrophes et de la commission départementale des sites et paysages. En même temps, le seuil de 12 mégawatts disparaît, évitant ainsi le mitage des projets que favorisait la réglementation précédente.
Votre question sur les projets éoliens qui se situent en territoire espagnol, et qui dépendent donc du droit espagnol, doit nous encourager à agir en concertation avec nos homologues de ce pays. Je veillerai donc personnellement à ce que les préfets, en liaison avec les associations transfrontalières et les collectivités, se saisissent de ce sujet. Nous avons un intérêt partagé avec nos voisins espagnols à préserver ce cadre d'exception des Pyrénées, qui est notre patrimoine commun. Je ne manquerai pas de vous communiquer les suites de cette concertation, et me rapprocherai de mon homologue espagnol.
M. la présidente. La parole est à M. Henri Sicre.
M. Henri Sicre. Merci, madame la ministre, pour cette réponse. Cependant, si l'organisation adoptée récemment sur notre territoire prévoit une très large concertation, notamment avec les communes limitrophes, le problème dont il est question aujourd'hui est lié à des relations d'État à État, et peut connaître une accélération subite.
Si donc la concertation que vous évoquez est engagée, elle devrait l'être très rapidement. En effet, le sommet franco-espagnol qui aurait dû se tenir au mois de mai et a été annulé - à cause sans doute de la campagne référendaire - aurait pu se solder par des décisions très mutilantes pour le territoire que j'ai l'honneur de représenter à l'Assemblée nationale, en autorisant le passage d'une ligne à très haute tension - plusieurs fois 400 000 volts ! - pour le transport d'électricité à travers nos paysages. Au même titre que le passage de cette ligne, qui pose des problèmes de protection tant des paysages que de la santé, je vous suggère donc, madame la ministre, que ce dossier puisse être évoqué au plus tard lors du prochain sommet franco-espagnol, prévu pour le mois de septembre.

SOC 12 REP_PUB Languedoc-Roussillon O