DEBAT :
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MODE DE RATIFICATION DE LA CONSTITUTION EUROPÉENNE
M. le président. La parole est à M. Jérôme Lambert.
M. Jérôme Lambert. Monsieur le Premier ministre, depuis cinq jours, l'Union européenne compte dix nouveaux membres et soixante-quinze millions d'habitants supplémentaires. Les Français approuvent, dans leur grande majorité, le nouveau visage de notre Europe. Nous accueillons et saluons fraternellement les nouveaux citoyens de l'Union.
Nos compatriotes ont toutefois déploré, lors de la conférence de presse du Président de la République, l'embarras de notre pays sur des sujets vitaux pour l'avenir de l'Europe : embarras et incertitudes sur le contenu de la future constitution et sur les positions défendues par la France pour faire aboutir ce projet essentiel pour les citoyens européens ; embarras et incertitudes quant à l'organisation d'un référendum indispensable pour consulter les Français sur cette future constitution, le Président de la République, si peu sûr de la pertinence d'un futur accord, qu'il redouterait par avance de le soumettre aux Français ; embarras et incertitudes sur l'adhésion de la Turquie que le Président souhaite, lorsque les conditions seront requises, alors que sa majorité parlementaire y est définitivement hostile, tout en étant unie au parti gouvernemental turc au sein du groupe du Parti populaire européen au Conseil de l'Europe. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Qui croire, monsieur le Premier ministre, de votre majorité gouvernementale ou du chef de l'Etat ?
Rappelons aussi que la situation de nos finances publiques, que votre politique sociale et fiscale a fortement contribué à dégrader depuis deux ans (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) fragilise la position de notre pays en Europe. Les mesurettes annoncées hier n'y changeront rien. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Notre pays est affaibli par tant de contradictions, d'embarras et d'incertitudes.
Quand allez-vous dire la vérité aux Français et prendre la décision de les interroger par référendum ? Quand cesserez-vous d'affaiblir par votre politique la position de la France en Europe ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.
M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères. Monsieur Lambert, je vous remercie d'avoir, avec vos mots, rappelé l'importance de ce qui s'est passé samedi et de ce changement historique, positif de la réunification de notre continent avec l'accueil de dix pays qui vont partager le même projet européen.
Je ne suis, en revanche, pas d'accord avec la manière dont vous avez parlé de notre engagement dans ce projet européen. A cet égard je vous répondrai sur un point précis, monsieur Lambert. Vous parlez d'un référendum sur la constitution européenne mais deux conditions doivent être réunies pour qu'il intervienne.
D'abord un tel choix relève des prérogatives du Président de la République : c'est à lui seul qu'il appartiendra de proposer, le moment venu, de faire ratifier le texte de la constitution européenne par le peuple ou par les représentants du peuple que vous êtes. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. Maxime Gremetz. On sait cela !
M. Christian Bataille. On vous demande votre avis, monsieur le ministre !
M. le ministre des affaires étrangères. La seconde condition est qu'il doit y avoir une constitution.
M. Maxime Gremetz. Voilà le problème ! Vous attendez que les élections européennes soient passées !
M. le président. Monsieur Gremetz, vous n'avez pas la parole !
M. le ministre des affaires étrangères. Or tel n'est pas encore le cas. Il nous reste devant nous quelques semaines difficiles de négociations dont nous profiterons, soyez-en assurés, pour conserver la dynamique du texte élaboré par la Convention et pour l'améliorer, notamment, monsieur Lambert, je le précise à votre intention ainsi qu'à celle de vos amis socialistes, sur la dimension sociale. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés-e-s communistes et républicains.)
M. Maxime Gremetz. Oh là là !
M. Michel Vergnier. Ah, bravo !
M. le ministre des affaires étrangères. J'aimerais beaucoup que vous consacriez de l'énergie à convaincre vos amis de certains gouvernements européens socialistes de nous soutenir dans ces avancées. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
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