FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 1320  de  Mme   Fraysse Jacqueline ( Député-e-s Communistes et Républicains - Hauts-de-Seine ) QOSD
Ministère interrogé :  santé et solidarités
Ministère attributaire :  santé et solidarités
Question publiée au JO le :  06/12/2005  page :  11120
Réponse publiée au JO le :  07/12/2005  page :  7899
Rubrique :  sang et organes humains
Tête d'analyse :  dons
Analyse :  moelle osseuse. développement
Texte de la QUESTION : Mme Jacqueline Fraysse interroge M. le ministre de la santé et des solidarités sur la nécessité du développement du registre français des donneurs volontaires de moelle osseuse. En effet, le fichier français, qui compte 130 000 donneurs, est désormais l'un des plus faibles en Europe en termes de représentativité par habitants. Au regard de l'écart avec des pays comme l'Allemagne (le fichier allemand compte 2,5 millions de donneur) - écart expliquant en partie les différences de capacité à greffer en France à partir de donneurs issus de notre fichier national - on pointera les limites du plan de recrutement annoncé le 18 novembre par son prédécesseur. Alors que chaque année plus de 600 nouveaux malades sont inscrits en recherche de donneur compatible, elle lui demande les mesures que le Gouvernement compte prendre afin d'intensifier l'effort de recrutement en France et, à cette fin, elle propose de lancer une grande campagne d'information à destination de la population.
Texte de la REPONSE :

DEVELOPPEMENT DU FICHIER
DES DONNEURS DE MOELLE OSSEUSE

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour exposer sa question, n° 1320.
Mme Jacqueline Fraysse. Monsieur le ministre, le 16 novembre dernier, 56 pays, dont la France, ont conjointement célébré le recrutement du dix millionième donneur volontaire de moelle osseuse. À cette occasion, les familles de malades, représentées par la coordination France moelle espoir, ont interpellé les responsables de l'Agence de la biomédecine, en présence de journalistes, sur la politique de développement du registre français des donneurs volontaires de moelle osseuse. La coordination dénonce l'insuffisance du plan de recrutement de nouveaux donneurs, annoncé le 18 novembre 2004 par M. Philippe Douste-Blazy, alors ministre de la santé.
Ce plan a pour but annoncé de rendre la greffe de moelle osseuse accessible à davantage de patients. Il s'agit d'un bel objectif, mais il est prévu de recruter 10 000 nouveaux donneurs par an seulement, ce qui est inacceptable pour les familles de malades en attente de greffes. D'autant plus que nos voisins allemands recrutent, en quatre mois, comme ce fut le cas en 2004, autant de donneurs que la France prévoit d'en inscrire en dix ans !
Le recours à la greffe de moelle osseuse ou de cellules souches sanguines est envisagé pour le traitement des leucémies et autres maladies hématologiques qui touchent indifféremment enfants et adultes. En cas d'échec des traitements de chimiothérapie et de rechute, la greffe de moelle osseuse est la seule possibilité thérapeutique offrant aux malades une chance de guérison.
Or, grâce aux progrès de la biologie moléculaire et à l'amélioration des techniques de greffe, le recours à cette thérapeutique est en constante augmentation dans notre pays. Ainsi, le champ des prescriptions de greffe s'élargit : cette pratique est aujourd'hui envisagée pour des malades plus âgés qu'auparavant et parfois proposée dans le traitement de certaines tumeurs.
Outre la greffe de moelle osseuse, certains malades pourront bénéficier d'une autre thérapeutique : la greffe à partir de cellules provenant d'un sang de cordon ou sang placentaire. Lorsqu'une greffe de moelle osseuse est envisagée, le médecin cherche d'abord un donneur de moelle osseuse compatible dans la fratrie mais, lorsqu'il n'y a pas de donneur compatible, il mène une recherche sur l'ensemble des registres internationaux de donneurs volontaires de moelle osseuse.
Dans ce cas, la probabilité de trouver un donneur compatible n'est que d'une sur million. L'ensemble des registres internationaux comporte aujourd'hui 10 millions d'inscrits provenant de registres gérés par 56 pays différents. À lui seul, le fichier allemand compte 2,5 millions de donneurs, tandis que le fichier français en compte seulement 130 000. Le taux de donneurs par millier d'habitants en France est désormais l'un des plus faibles en Europe. Cet écart explique en partie les différences de capacité à greffer en France à partir de donneurs issus du fichier national.
En 2004, la France a réalisé 325 greffes non apparentées dont 243 à partir d'un donneur de fichier et 82 à partir de sang placentaire. Sur ces 243 greffons, seulement 58 venaient du fichier français, soit 24 % et 104 du fichier allemand, soit 43 %. L'Allemagne réalise 800 greffes non apparentées par an dont 80 % à partir de donneurs issus de son fichier.
Alors que, chaque année, plus de 600 nouveaux malades sont inscrits en recherche de donneurs compatibles - 903 pour l'année 2004 - quelle réponse le Gouvernement entend-il donner aux familles de malades qui demandent une intensification de l'effort de recrutement en France et le passage à un rythme de 30 000 donneurs par an ?
N'est-il pas temps, enfin, de lancer une vaste campagne d'information s'appuyant sur les médias de masse, à savoir les grands quotidiens et les principales chaînes de télévision ? En effet, nous savons que les Français montrent chaque année à quel point ils peuvent faire preuve de générosité, comme encore tout récemment, pour soutenir les causes qui leur tiennent à coeur. Or seule une profonde méconnaissance de ce dramatique problème de santé publique permet d'expliquer la faiblesse du recrutement de donneurs dans notre pays.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.
M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Madame la députée, vous nous interrogez sur la stratégie française de développement du registre des donneurs volontaires de moelle osseuse.
Afin de répondre aux besoins des patients, l'État a d'ores et déjà engagé un plan d'action sur dix ans pour augmenter fortement le nombre d'inscrits sur le registre français des donneurs non apparentés de moelle osseuse, améliorant ainsi la diversité des phénotypes représentés - ce qui n'est pas moins important que l'augmentation du nombre de donneurs.
Comme vous le soulignez, le registre français recense aujourd'hui 130 000 donneurs. C'est le recrutement de 100 000 nouveaux volontaires pour le don de moelle osseuse qui est programmé dans les dix années à venir, au rythme de 10 000 donneurs supplémentaires par an.
Ainsi, 2,6 millions d'euros par an de crédits supplémentaires sont consacrés à cet effort sans précédent. Ces crédits ont été inscrits au budget de l'Agence de la biomédecine. Ils doivent notamment permettre de financer l'accueil des nouveaux donneurs et la réalisation des examens biologiques indispensables à l'inscription sur le registre.
L'Agence de la biomédecine va par ailleurs entreprendre des campagnes d'information dans le but d'inciter de nouvelles personnes à s'inscrire sur le registre français.
Aussi une première opération de recrutement a-t-elle été menée au premier semestre 2005. Son objectif principal était de sensibiliser plus particulièrement les hommes de moins de quarante ans, actuellement moins bien représentés dans le registre français. La brochure d'information sur le don de moelle osseuse, accompagnée du formulaire d'engagement volontaire, a ainsi été encartée à plus de 500 000 exemplaires dans un magazine distribué en kiosque sur tout le territoire.
L'Agence de la biomédecine va par ailleurs lancer, en liaison étroite avec les associations concernées, une campagne nationale d'information et de recrutement de volontaires pour le don de moelle osseuse. Menée sur trois ans, de 2006 à 2009, cette campagne vise deux objectifs principaux :
D'abord un objectif pédagogique : il s'agit de rectifier les idées fausses, de faire progresser l'information, notamment chez les journalistes eux-mêmes, et d'installer durablement le sujet dans les médias.
Le second objectif concerne le recrutement de 10 000 nouveaux donneurs par an et l'enrichissement qualitatif du registre français des volontaires à travers la diversité des dons.
Cette campagne commencera en avril 2006.
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
Mme Jacqueline Fraysse. Je me félicite de ce que vient de dire M. le ministre, mais je le savais déjà et les familles aussi.
Aussi, je regrette de nouveau, monsieur le ministre, que l'objectif que nous nous fixons soit aussi peu ambitieux. Il n'y a aucune raison pour que la France ne soit pas capable de faire ce que font ses voisins. J'ai cité les chiffres de l'Allemagne. Je crois - c'est une évidence - que la générosité des Français vaut celle de tous les citoyens européens.
L'objectif visé par le Gouvernement me paraît donc insuffisant au regard de ce que d'autres pays sont en mesure de réaliser et, surtout, au regard des besoins des familles.

CR 12 REP_PUB Ile-de-France O