Texte de la QUESTION :
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M. Jean-Michel Dubernard attire l'attention de Mme la ministre déléguée aux affaires européennes sur les recommandations de la Commission de Bruxelles du 16 mai 2002 concernant l'indépendance du contrôleur légal des comptes au lendemain de l'adoption par les Etats-Unis d'une loi « sur la responsabilité des comptes des entreprises », réforme qui mêle répression et prévention pour éviter que les entreprises tronquent leurs chiffres et flouent ainsi les épargnants. M. Frits Bolkestein, commissaire chargé du marché intérieur, a déclaré : « La confiance dans l'indépendance et l'objectivité des contrôleurs est essentielle pour le fonctionnement efficace du marché des capitaux de l'UE. Elle est essentielle pour garantir l'intégrité des affaires, la confiance des actionnaires et la protection des consommateurs et des salariés. Actuellement, les règles sur l'indépendance des contrôleurs dans les Etats membres diffèrent sensiblement par leur champ d'application et leur contenu. Les directives comptables de l'UE, la 4e (78/660/CEE) et la 7e (83/349/CEE) directives comptables de droit des sociétés, exigent que les comptes annuels et consolidés des sociétés soient examinés par un contrôleur qualifié qui vérifie qu'ils donnent une image fidèle de la situation financière et des résultats de la société. La 8e directive comptable de droit des sociétés (84/253/CEE) contient des exigences minimales concernant les qualifications et l'intégrité professionnelle des contrôleurs, mais ne fixe aucune orientation spécifique concernant l'indépendance de ceux-ci. L'approche de l'indépendance du contrôleur basée sur la définition de grands principes est combinée avec d'autres sauvegardes plus larges exposées dans la recommandation. En outre, tous les contrôles légaux de l'UE devraient être soumis à des systèmes externes de contrôle de qualité qui exigent que les contrôleurs vérifient le respect des principes et des règles d'éthique, y compris des règles d'indépendance, conformément à la recommandation de la Commission concernant le contrôle de qualité du contrôle légal des comptes dans l'Union européenne. Enfin, à la lumière du cas Enron, a été proposée une série de mesures visant à améliorer encore la qualité et la crédibilité de la profession de l'audit dans l'UE, comprenant : l'utilisation des normes internationales d'audit », les comités d'audit et une meilleure surveillance de la profession d'audit. Les ministres de l'économie et des finances de l'UE qui se sont réunis de manière informelle à Oviedo en avril ont exigé l'application rapide de la recommandation de la Commission. Au lendemain des affaires, WorldCom en passant par Adelphia ou Global Crossing, qui toutes impliquent des malversations comptables, il lui demande l'état d'avancement de la mise en oeuvre de cette recommandation.
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Texte de la REPONSE :
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En réponse aux scandales d'Enron et de WorldCom aux Etats-Unis, le Gouvernement américain a engagé un plan de réforme des métiers de comptable et d'audit qui s'est traduit par le vote de la loi Sarbane Oxley entrée en vigueur en août 2002. La Commission européenne a de son côté publié en mai 2002 une recommandation sur l'indépendance du contrôleur légal des comptes. En France, la loi sur la sécurité financière a renforcé les garanties existantes en séparant les activités d'audit et de conseil et en mettant en place un haut conseil de la profession, placé auprès du ministre de la justice et chargé de la surveillance des activités d'audit. La législation américaine ne prend pas parfaitement en compte ces réformes. Des démarches ont donc été entreprises au niveau communautaire vis-à-vis des autorités américaines (Securities and Exchange Commission [SEC]), Public Company Accounting Oversight Board), afin de les sensibiliser sur la situation en Europe. La loi Sarbane Oxley oblige en effet toutes les entreprises cotées sur un marché américain à s'inscrire auprès du comité de surveillance des pratiques comptables des entreprises. La loi contraint par ailleurs d'ici à octobre 2003 tous les cabinets d'audit dans le monde émettant une opinion concernant les comptes d'une entreprise cotée sur le marché américain ou les comptes d'une filiale significative (le chiffre d'affaires CA de l'entité auditée doit représenter 20 % des actifs consolidés ou du CA consolidé) à transmettre des données sur ses activités, sur ses salariés et sur ses clients. Cette réglementation pose, d'une part, la question de l'existence de plusieurs réglementations concurrentes et de la coexistence de normes comptables différentes dans le monde. D'autre part, en ce qui concerne la profession d'audit et de contrôleur des comptes, elle suscite pour plusieurs Etats membres de l'Union européenne, dont la France, des conflits de normes en se heurtant à des règles aussi importantes que le secret professionnel ou la protection des données personnelles. La Commission européenne, consciente de l'enjeu de cette loi pour les cabinets d'experts comptables européens et pour les Etats membres, souhaite obtenir de la part des autorités américaines compétentes un moratoire d'un an dans la mise en oeuvre de ces dispositions. Au-delà des conflits des normes avec les législations des Etats membres, la Commission fonde son argumentation sur des motifs économiques. La réglementation américaine constitue en effet une barrière à l'entrée du marché américain d'expertise comptable, écartant les cabinets de petite et de moyenne taille au profit de cabinets de taille mondiale. Elle reçoit sur ces différents points le soutien actif des autorités françaises. L'objectif de la Commission européenne est, dans un second temps, de revendiquer auprès des autorités américaines la reconnaissance d'une équivalence entre la réglementation existante dans les Etats membres, éventuellement complétée par une réglementation européenne complémentaire, et la réglementation que les autorités américaines souhaitent mettre en place. La reconnaissance de cette équivalence devrait pouvoir ouvrir la voie à une exemption complète pour les cabinets d'audit européens de l'application de la réglementation américaine. Elle se heurte toutefois à de fortes réticences de la part des autorités américaines. Aussi, à la demande des Etats membres, des lettres ont été adressées le 14 avril par le commissaire européen chargé du marché intérieur, M. Frits Boikestein, au président de la Securities and Exchange Commission (SEC), au secrétaire américain au Trésor et à plusieurs parlementaires parmi lesquels le sénateur Sarbane et le membre de la chambre des représentants Oxley. La confiance est essentielle au bon fonctionnement de l'économie de marché. L'Union européenne fait valoir dans ce domaine, avec le plein soutien du Gouvernement français, la nécessité d'une étroite concertation transatlantique.
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