Texte de la QUESTION :
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M. Arnaud Montebourg appelle l'attention de M. le ministre de la culture et de la communication sur l'effroi qui a touché, à travers le mouvement protestataire engagé par les milieux artistiques et littéraires, un grand nombre de nos concitoyens, à l'annonce de la vente aux enchères, qui aura lieu du 7 au 17 avril prochain à l'hôtel Drouot, des oeuvres de la collection privée d'André Breton, chef de file du surréalisme. Les ayants droit d'André Breton, dans l'incapacité d'assumer la charge financière et morale liée à la conservation de ce patrimoine, et face aux difficultés et aux résistances qu'ils ont rencontrées dans le cadre de leur projet de création d'une fondation ou d'un lieu au sein duquel aurait pu perdurer, autour de ces oeuvres, l'esprit du surréalisme, ont dû prendre la décision d'organiser une vente publique des objets d'art que celui-ci avait rassemblés dans son atelier du 42, rue Fontaine, à Paris, où il vécut jusqu'à sa mort, en 1966. Même si toute sa correspondance a été léguée à sa mort, conformément à ses volontés, à la bibliothèque Jacques-Doucet à la création de laquelle il avait participé et qui possède plusieurs manuscrits, si quelques pièces majeures sont entrées dans les collections nationales, si des donations sont en cours, et si la dation du Mur de l'atelier d'André Breton, qui était déposé auprès du centre Pompidou, a été acceptée par l'Etat (en paiement de la succession d'Elisa Breton, veuve de l'artiste), quelque 500 lots de tableaux exceptionnels, comprenant des oeuvres de Chirico, de Picabia, de Max Ernst, de Picasso, de Brauner ou de Miro, mais également près de 1 500 tirages photographiques de la pleine période surréaliste, des objets d'art africains et océaniens, plus de 3 500 livres dont des éditions de Hegel et de Freud ou des ouvrages dédicacés de Guillaume Apollinaire, Léon Trotsky, Julien Gracq..., des manuscrits relatifs aux séances d'écriture automatique et de multiples objets seront proposés à la vente lors de ces enchères publiques. Le choix du lieu, Paris, qui permet aux institutions publiques de se manifester et de rester vigilantes, ne constitue pas une garantie suffisante contre le risque d'un éparpillement de l'univers d'André Breton. Aussi, et pour que le génie accumulateur du père fondateur du mouvement surréaliste soit honoré et que la volonté de ses ayants droit soit respectée, il lui demande de bien vouloir lui indiquer dans quelles conditions l'Etat pourrait user de son droit de préemption sur l'ensemble des lots, prononcer une interdiction de sortie des pièces du territoire national et prendre toutes les dispositions nécessaires pour qu'une fois classées trésor national « ces collections soient réunies en un même lieu ouvert au public ».
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Texte de la REPONSE :
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Comme le ministre de la culture et de la communication l'avait souhaité,
et selon des dispositions arrêtées de longue date, l'Etat a largement exercé son
droit de préemption en faveur d'un certain nombre d'institutions nationales et
territoriales qui en avaient fait la demande, afin que des livres, manuscrits,
peintures et dessins, objets d'art populaire et d'art primitif, parmi les plus
représentatifs du goût et de la curiosité universelle d'André Breton, rejoignent
les collections publiques. Une coordination étroite entre les différentes
institutions concernées avait notamment permis d'établir une liste d'oeuvres
absolument essentielles qu'il convenait de faire entrer dans les collections
publiques, et qui, de fait, ont toutes pu être préemptées : notamment le
manuscrit d'« Arcane 17 », cinq peintures - « Femme » d'Hans Arp, « Dancer,
Danger » de Man Ray, « Les Amoureux » de Picabia, « le Portrait » de Breton et «
L'Etrange cas de Monsieur K. » de Victor Brauner, ou encore trois objets
mythiques - « Le Gant de Nadja », « L'Objet blanc et la Grande Cuillère ».
L'Etat, ses établissements publics, et plusieurs collectivités territoriales,
dont la ville de Paris et la ville de Nantes, ont mobilisé des crédits
exceptionnels pour réaliser ou soutenir ces acquisitions, puisque que l'Etat a
fait valoir à 335 reprises son droit de préemption pour une valeur totale de
11,56 millions d'euros. De leur côté, Aube Breton-Elléouet, et Oana ont fait don
à plusieurs musées de France et à la bibliothèque Jacques-Doucet de quinze
oeuvres emblématiques. Cet important cadeau vient s'ajouter à celui qu'elles
avaient déjà fait en offrant trois tableaux : le Hitler de Victor Brauner, la
Danseuse Espagnole de Joan Miró et l'Affiche pour Arcane 17 de Roberto Matta.
Enfin, le Mur qui était dans le bureau d'André Breton au 42, rue Fontaine est
entré par dation dans les collections du Musée national d'art moderne où il est
dorénavant installé. Le souci de l'Etat a été de maintenir dans le patrimoine
public les éléments essentiels de cet ensemble. Grâce à la qualité des relations
établies avec les héritiers d'André Breton, les collections nationales sont
aujourd'hui enrichies de pièces majeures témoins de l'univers d'André
Breton.
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