FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 1365  de  M.   Giraud Joël ( Socialiste - Hautes-Alpes ) QOSD
Ministère interrogé :  transports, équipement, tourisme et mer
Ministère attributaire :  transports, équipement, tourisme et mer
Question publiée au JO le :  17/01/2006  page :  371
Réponse publiée au JO le :  18/01/2006  page :  16
Rubrique :  aménagement du territoire
Tête d'analyse :  politique d'aménagement du territoire
Analyse :  Hautes-Alpes. désenclavement. perspectives
Texte de la QUESTION : M. Joël Giraud attire l'attention de M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer sur la motion votée le 26 septembre dernier par le comité de massif des Alpes. Cette motion votée à l'occasion du débat public sur la liaison Grenoble-Sisteron est l'occasion pour le comité de rappeler l'enclavement de la partie sud du massif et particulièrement du département des Hautes-Alpes, et d'arrêter une position officielle. En l'absence de décision pendant des années, la situation est devenue suffisamment grave pour justifier qu'un plan global de désenclavement ferroviaire, autoroutier et routier des Alpes du Sud soit mis en oeuvre très rapidement. Sur le plan ferroviaire, le comité de massif demande que le tunnel ferroviaire sous le Montgenèvre soit inclus dans le corridor 5 du réseau de transport européen (RTE) comme ouvrage complémentaire au Lyon-Turin et réalisé dans des délais rapprochés. Il propose la mise en place d'un mode de financement (taxe spéciale d'équipement) inspiré du dispositif mis en place dans le département de Savoie pour les jeux Olympiques d'Albertville. Cette affectation devra inclure l'aménagement des infrastructures nécessaires à l'installation d'ITER. Sur le plan routier, les options retiennent le renforcement des RN 85 et 91 et le financement par l'État des travaux liés aux risques naturels. Le comité de massif demande que ces objectifs figurent aux futurs contrats de Plan État-régions relatifs au réseau routier national. Sur le plan autoroutier, le comité souhaite que les arbitrages soient rapidement rendus. Il lui demande dans quels délais une réunion du CIADT sera convoquée afin d'étudier l'ensemble de ces propositions.
Texte de la REPONSE :

DESENCLAVEMENT FERROVIAIRE, AUTOROUTIER
ET ROUTIER DES ALPES DU SUD

M. le président. La parole est à M. Joël Giraud, pour exposer sa question, n° 1365, relative au désenclavement ferroviaire, autoroutier et routier des Alpes du Sud.
M. Joël Giraud. Monsieur le président, monsieur le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, le comité de massif des Alpes - co-présidé par M. le préfet de région de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et mon collègue de Savoie, Michel Bouvard - a, le 26 septembre 2005, à l'occasion du débat public sur la liaison Grenoble-Sisteron, adopté, sur ma proposition, une motion rappelant l'enclavement de la partie sud du massif et particulièrement du département des Hautes-Alpes, le seul en France classé en niveau IV d'inaccessibilité - ferroviaire, aérienne, autoroutière - par l'ex DATAR.
À l'heure actuelle, vous le savez, monsieur le ministre, deux grands projets structurants proposent d'améliorer cette accessibilité.
Le premier propose l'achèvement de l'autoroute A51 - d'un coût de 2,2 milliards d'euros dont 15 à 25 % à la charge du concessionnaire, soit 1, 6 à 1, 9 milliard d'euros à la charge des collectivités publiques - ou l'aménagement des actuelles RN 75 et 85.
Le second prévoit la réalisation d'un tunnel ferroviaire sous le Montgenèvre, d'un coût de 1,5 milliard d'euros dont 50 % de participation privée et 350 millions d'euros à la charge des collectivités de chaque État.
Le débat sur l'A51 a toujours été vif entre partisans d'un tracé ouest - col de la croix haute - et d'un tracé est - col Bayard - voire d'une solution routière, la réalisation d'un tunnel ferroviaire rassemblant de son côté un large consensus.
Aujourd'hui, et en l'absence de décision pendant des années, la situation est devenue suffisamment grave pour justifier que ce comité de massif demande qu'un plan global de désenclavement ferroviaire, autoroutier et routier des Alpes du sud soit mis en oeuvre dans les délais les plus brefs.
Sur le plan ferroviaire, la ligne Grenoble-Gap ne permettant pas d'absorber des trafics lourds pour les grandes migrations touristiques et la conception de la gare TGV de Valence ne permettant pas de densifier l'accessibilité par la ligne Valence- Briançon - qui vient de surcroît de connaître des désordres considérables, les rails ayant cassé deux fois pendant les vacances de Noël -, seule la réalisation d'un tunnel ferroviaire sous le Montgenèvre peut permettre aux Hautes-Alpes d'accéder au réseau TGV, ce qui contribuerait, au passage, à la valorisation de la ligne classique de la Maurienne en Savoie par la mise en service de TGV Paris-Chambéry-Modane-Briançon-Gap. Sur le plan du trafic des marchandises, cet itinéraire sécuriserait le Lyon-Turin, dont il doit rester un axe complémentaire, en cas d'incident sur ce dernier et autoriserait le passage d'un certain nombre de trafics dédiés pour lesquels le détour par la vallée du Rhône ne se justifie pas. Le coût à la charge de la partie française - 350 millions d'euros - comme la géologie de la zone de percement rendent crédible cet ouvrage qui ne soulève aucune opposition du côté italien.
C'est pourquoi le comité de massif des Alpes demande que, conformément à la décision du sommet franco-italien de Périgueux de novembre 2001, le tunnel ferroviaire sous le Montgenèvre soit inclus dans le corridor 5 du réseau de transport européen - RTE - comme ouvrage complémentaire au Lyon-Turin et soit réalisé dans des délais rapprochés compte tenu de son faible coût.
Sur le plan autoroutier et routier, s'agissant de l'accessibilité de Paris au Briançonnais, la réalisation de la tranchée couverte sous le Montgenèvre - RN 94 - et du tunnel routier de Clavière - SS 24 en Italie - autorise une continuité autoroutière complète, sans traversée de village, entre Paris, Lyon et Briançon par l'autoroute A43, le tunnel du Fréjus et l'autoroute italienne A32.
En conséquence et conformément à la lettre que vous m'avez adressée, monsieur le ministre, le comité de massif demande la mise en place d'une signalisation autoroutière complète de la bifurcation de Coiranne - A43-A48 - à Briançon par le tunnel du Fréjus, assortie d'une information sur l'état du col du Lautaret dès cette bifurcation.
Pour autant, et compte tenu du caractère stratégique de la RN 91 - col du Lautaret - récemment départementalisée, il demande que l'État s'engage à financer au titre de la solidarité nationale le traitement des zones à risques naturels de l'itinéraire - glissement de séchilienne notamment.
S'agissant de l'accessibilité du sud de la France à cette zone, les deux projets autoroutiers de continuité de l'A51 prévoient la réalisation d'un axe La Bâtie Neuve-La Saulce entre la RN 94 et l'A51, axe concédé, qu'il soit inclus dans le tracé est ou réalisé en complément du tracé ouest. Cet axe est indispensable à l'accessibilité à la zone concentrant 70 % des lits touristiques des Hautes-Alpes et des Alpes-de-Haute-Provence et résout le problème de la traversée de Tallard et du carrefour avec la RN 85 qui génèrent des attentes de plus de trois heures en haute saison touristique. Il laisse toutefois de côté l'accès au Champsaur et au Valgaudemar depuis le sud en cas de réalisation de l'autoroute par l'ouest de Gap.
En conséquence, le comité de massif demande que soit réalisé prioritairement le prolongement de l'A51 à La Bâtie Neuve et propose que, quel que soit le tracé autoroutier retenu - décision qui vous appartient, monsieur le ministre -, cet axe soit prolongé jusqu'à la RN 85 au nord de Gap - col Bayard - afin de permettre, en plus de l'accès au Briançonnais, à l'Embrunais et à l'Ubaye, l'accès au Champsaur et au Valgaudemar depuis le sud ainsi que la continuité du réseau routier national sans traversée de la ville de Gap. Le comité de massif a aussi tenu à préciser que le gabarit de cet axe concédé peut être adapté, notamment dans la vallée de l'Avance aux contraintes environnementales des secteurs traversés.
En conclusion, le comité de massif des Alpes vous demande, monsieur le ministre, maintenant que la commission du débat public a rendu ses conclusions, et après que le Gouvernement aura fait un choix en ce qui concerne l'A51, qu'un CIACT se réunisse d'urgence sur la base de ces propositions.
D'autre part, l'essentiel des financements des infrastructures précitées faisant appel à une participation importante des collectivités territoriales, notamment de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, le comité de massif a demandé au Gouvernement de proposer à la représentation nationale la mise en place d'une taxe spéciale d'équipement, à l'instar de ce qui s'est fait en Savoie pour les Jeux Olympiques, au profit des collectivités territoriales afin de leur permettre de participer à ce financement sans grever leurs budgets.
À ce titre, je rappelle la proposition de loi déposée avec Sylvie Andrieux demandant la mise en place de cette taxe, dont le principe a été voté, y compris par l'UMP et l'UDF, au conseil régional de Provence-Alpes-Côte d'Azur, afin de financer les infrastructures ferroviaires liées au projet ITER dont la construction du tunnel ferroviaire sous le Montgenèvre - dans la mesure où le site d'ITER est traversé par la ligne SNCF Marseille-Briançon - est l'équipement prioritaire.
M. le président. La parole est à M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.
M. Dominique Perben, ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer. Monsieur le député, vous avez soulevé de très nombreuses questions auxquelles je m'efforcerai de répondre en insistant sur quelques sujets qui me paraissent particulièrement importants.
Le projet d'une liaison ferroviaire reliant la région Provence-Alpes-Côte d'Azur à l'Italie, via le val de Durance et la traversée du Montgenèvre, fait l'objet d'études de trafic dans un cadre franco-italien par la commission intergouvernementale des Alpes du Sud.
Ces études prennent bien entendu en compte le projet Lyon-Turin. Vous avez à juste titre souhaité qu'il y ait une complémentarité entre ces différents projets ferroviaires. La réalisation de ce projet s'inscrit dans les réseaux transeuropéen de transports ; nous avons intérêt à nous inscrire dans une démarche qui sera soutenue par l'Union européenne.
Les premiers résultats d'un projet sous le Montgenèvre sont encore en cours de discussion mais démontrent un potentiel de trafic relativement limité tant pour les marchandises que pour les voyageurs. Mais tel est souvent le cas quand il s'agit d'apprécier l'intérêt d'un équipement qui n'existe pas encore.
À plus court terme - et cela rejoint un certain nombre de vos questions - il me paraîtrait intéressant d'améliorer les liaisons régionales et de prendre en compte les nouveaux besoins liés à l'installation d'ITER. C'est d'ailleurs un des axes de travail de RFF dans le cadre du projet de ligne nouvelle PACA, à la suite des attentes exprimées au cours du débat public. RFF lancera dès cette année des études sur ce point.
Le débat public, fort intéressant, sur la liaison entre Grenoble et Sisteron s'est achevé, vous l'avez rappelé, le 20 octobre 2005. Il a porté sur l'ensemble des scénarios d'aménagement envisageables et il a permis de décanter un certain nombre de sujets difficiles qui ont parfois donné lieu à polémique. Ce débat a été intéressant non seulement sur les perspectives autoroutières avec les deux grandes familles de tracés, mais aussi sur l'aménagement des routes existantes, la RN75 et la RN85.
Le bilan du président de la Commission nationale du débat public et le compte rendu du président de la commission particulière ont souligné à juste titre la qualité de ce débat et la richesse des arguments qui y ont été développés. Cette mobilisation importante devra être prise en compte. Le choix qui sera fait le moment venu s'appuiera sur ce matériau.
Par ailleurs, dans le cadre du contrat de plan actuel entre l'État et la région, près de 33 millions d'euros dont plus de 15 millions d'euros à la charge de l'État sont inscrits aux aménagements des routes nationales 85 et 91 dans votre département entre le volet de sécurisation des itinéraires alpins et le volet régional.
Les bilans qui pourront être réalisés à l'issue du contrat actuel devraient nous permettre assez vite d'envisager quelles infrastructures routières sont à réaliser en priorité. Il nous faut en effet refaire un travail de priorisation dans le cadre de la future génération des contrats de Plan. L'État comme la région PACA seront, je pense, disposés à s'engager dans cette voie.
Quant au système particulier de taxation que vous évoquez, je suis tout à fait prêt à y réfléchir. Mais il ne s'agit pas d'un sujet simple, vous le savez bien. Il faut nous donner la peine, les uns et les autres, d'évaluer les différentes dimensions d'une telle initiative avant d'en adopter le principe.
M. le président. La parole est à M. Joël Giraud.
M. Joël Giraud. Monsieur le ministre, je vous remercie tout d'abord pour votre réponse. Mais je tiens à préciser que les éléments dont vous disposez s'agissant du tunnel ferroviaire sous le Montgenèvre relèvent d'études anciennes, qui n'avaient pris en compte que les populations locales dans les facteurs de solvabilisation et non pas les flux touristiques. Cela pose évidemment un léger problème en termes de calcul du potentiel voyageurs. L'étude actuelle, dont le cahier des charges a été adopté, intègre ce dernier élément, ce qui peut changer totalement les choses. Je reste persuadé que l'un des éléments de solvabilisation des infrastructures dans ce pays est l'industrie touristique, surtout dans des zones frontalières comme la nôtre, où les flux sont surtout touristiques.
S'agissant de l'accès au val de Durance et ITER, il faut être bien conscient de la nécessité de globaliser l'ensemble des études et des réflexions. C'est la raison pour laquelle j'estime qu'une fois votre décision prise pour l'A 51, décision que nous respecterons quelle qu'elle soit, un CIACT s'impose pour réfléchir à un plan global de désenclavement ferroviaire, routier et autoroutier des Alpes du Sud, région qui le mérite bien tant elle est enclavée.

SOC 12 REP_PUB Provence-Alpes-Côte-d'Azur O