FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 1369  de  M.   Rochebloine François ( Union pour la Démocratie Française - Loire ) QOSD
Ministère interrogé :  écologie
Ministère attributaire :  budget et réforme de l'Etat
Question publiée au JO le :  17/01/2006  page :  372
Réponse publiée au JO le :  18/01/2006  page :  8
Date de changement d'attribution :  17/01/2006
Rubrique :  emploi
Tête d'analyse :  entreprises d'insertion
Analyse :  récupération du textile. financement
Texte de la QUESTION : M. François Rochebloine attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie et du développement durable sur les difficultés rencontrées par la filière de récupération textile. Il observe en effet que dans de nombreuses communes la collecte des textiles usagers n'est plus assurée par les entreprises ou les associations spécialisées, ce qui ne manque pas de susciter une réelle incompréhension dans la population. S'il est conscient que la baisse de qualité des textiles récupérés, l'augmentation des coûts de collecte, de transformation ou d'élimination peuvent expliquer la baisse de rentabilité économique de cette activité, il souligne l'importance d'une telle filière aussi bien pour l'emploi et l'insertion sociale que pour la protection de l'environnement. Il souhaiterait connaître en conséquence les mesures envisagées par le Gouvernement pour permettre la pérennité de ce secteur fortement menacé.
Texte de la REPONSE :

AVENIR DE LA FILIERE DE RECUPERATION TEXTILE

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine, pour exposer sa question, n° 1369, relative à l'avenir de la filière de récupération textile.
M. François Rochebloine. Monsieur le président, madame la ministre déléguée au commerce extérieur, mes chers collègues, lors de la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2005, la représentation nationale a été amenée à débattre de l'avenir de la filière de récupération textile, dont les difficultés sont désormais notoires. À la faveur des discussions autour de l'amendement, adopté par notre assemblée puis par le Sénat, visant à instituer une " contribution environnementale textile " de quelques centimes d'euros par article, vite baptisée " taxe Emmaüs ", différentes interrogations ont pu être formulées, attestant qu'il existe là un vrai sujet de préoccupation, tant d'un point de vue économique et social que d'un point de vue environnemental.
Comment enrayer en effet la crise actuelle de la filière de récupération textile ? Cette crise se traduit déjà par l'abandon, dans certaines communes, de la collecte des vieux vêtements par des organismes d'insertion spécialisés, les entreprises n'étant pas en mesure de prendre le relais, toujours pour des motifs économiques.
Aujourd'hui, au-delà du secteur de l'insertion, des collectivités locales et leurs habitants s'interrogent sur cette situation nouvelle qui est complète contradiction avec les discours sur le tri sélectif et le développement durable.
Plusieurs explications ont été avancées : la baisse de la qualité des textiles récupérés, qui limite l'intérêt du réemploi, ou encore l'augmentation des coûts de collecte, de transformation et d'élimination. Les facteurs de baisse de la rentabilité économique de cette activité, s'ils devaient perdurer, poseraient à terme la question de la survie des entreprises et des associations, et ce faisant condamneraient une filière de recyclage et de valorisation, avec pour conséquence inévitable un transfert de volume sur les ordures ménagères.
On le voit, les données du problème se compliquent. Si j'admets volontiers que ce dossier doit faire l'objet d'une concertation approfondie avec l'ensemble des acteurs concernés - producteurs industriels, représentants de la distribution, structures d'insertion, collectivités locales -, il est néanmoins essentiel de ne pas perdre trop de temps, car il y a une certaine urgence à traiter un problème qui met en jeu plusieurs milliers d'emplois.
Certes, les difficultés du secteur du textile-habillement ont largement pesé dans le retrait de l'amendement relatif à la contribution spécifique du secteur textile lors de la seconde délibération demandée par le Gouvernement. Cependant, conscient de l'importance du problème, le ministre a pris l'engagement ferme de réunir dès ce mois de janvier un groupe de travail chargé de proposer un dispositif adapté dans les six mois.
Nous ne pouvons qu'encourager une telle démarche, sachant que la contribution environnementale textile proposée par Emmaüs France s'inspirait d'autres dispositifs en vigueur ou en plein essor et qui ont d'ores et déjà permis de pérenniser le financement de filières de recyclage et de valorisation de déchets.
Aussi, considérant les engagements pris par le Gouvernement, je souhaiterais savoir, madame la ministre, dans quelle direction vous entendez conduire les réflexions et faire porter les efforts en vue de l'obtention d'un dispositif compatible avec les différents intérêts en présence. Il est indispensable de ne pas laisser se dégrader davantage la situation de ce secteur : des mesures de soutien s'imposent.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée au commerce extérieur.
Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur. Monsieur le député, vous avez appelé l'attention du Gouvernement sur le financement du recyclage des textiles usagés, notamment par des entreprises d'insertion au premier rang desquelles figure Emmaüs.
La discussion budgétaire a donné lieu à des débats denses sur ce sujet, notamment lors de l'examen des amendements visant à instituer une taxe nouvelle sur les distributeurs de textiles afin de financer la collecte des produits textiles usagés. Cependant, il n'était pas possible de prendre une décision dès le projet de loi de finances pour 2006 pour des raisons tant de forme que de fond.
Sur la forme, à aucun moment l'ensemble des acteurs concernés n'ont été réunis pour évoquer le financement du recyclage des textiles. Prétendre taxer un secteur économique entier sans jamais en avoir rencontré préalablement les acteurs pour en débattre, c'est une démarche qui n'a plus grand-chose à voir, me semble-t-il, avec le principe qui veut que, dans une démocratie moderne, tous ceux qui sont concernés soient entendus.
Sur le fond, j'appelle votre attention sur deux points.
Tout d'abord, le secteur de l'industrie textile - tout comme celui de l'électroménager, évoqué dans la question précédente -, est actuellement l'un de ceux qui se battent le plus courageusement dans le contexte d'une concurrence mondiale accrue. Nous sommes, les uns et les autres, responsables de la préservation de nos activités dans tous les secteurs économiques et sur tous les territoires : ce n'est pas vous, monsieur le député, qui me contredirez. L'argument selon lequel l'industrie ne sera pas touchée car c'est la distribution qui est taxée ne tient pas : les distributeurs risquent en effet d'en répercuter le coût directement sur les producteurs, ce qui pourrait se traduire par de nouvelles suppressions d'emplois en France.
Ensuite, dans sa décision sur le projet de loi de finances pour 2006, le Conseil constitutionnel a réaffirmé fermement les conditions très strictes permettant l'affectation d'une taxe. En effet, aux termes de l'article 2 de la LOLF - notre nouvelle constitution budgétaire -, " les impositions de toute nature ne peuvent être directement affectées à un tiers qu'à raison des missions de service public confiées à lui et sous les réserves prévues par les articles 34, 36 et 51 ". Le Conseil constitutionnel confirme donc sa décision du 25 juillet 2001, qui disposait que " la loi ne peut affecter directement à un tiers des impositions de toutes natures qu'à raison des missions de service public confiées à lui ". Ces conditions n'étaient manifestement pas réunies pour affecter directement une taxe aux mouvements de solidarité concernés.
C'est pourquoi M. Jean-François Copé - que je ne représente pas ici, puisque je vous réponds au nom de Mme Olin - a pris l'engagement dans cet hémicycle, le 21 décembre dernier, de travailler en concertation avec tous les acteurs du secteur pour trouver la meilleure formule possible. Cet engagement sera tenu : M. Copé réunira très prochainement les différents acteurs économiques de la filière textile : producteurs, distributeurs, consommateurs et récupérateurs. Des parlementaires et des représentants des collectivités territoriales seront naturellement associés à ce groupe de travail, qui tiendra ses réunions dans les délais prévus.
M. le président. La parole est à M. François Rochebloine.
M. François Rochebloine. Je vous remercie pour les précisions que vous avez bien voulu apporter, madame la ministre. Je me permets toutefois de rappeler qu'en l'occurrence il ne s'agit pas d'une taxe, mais d'une " contribution environnementale textile ", ce qui est sensiblement différent. De nombreuses filières, tels le verre, les pneus, les piles, les déchets d'équipements électriques et électroniques, font l'objet d'une reconnaissance de ce type. Je prends acte de la concertation prévue par M. Jean-François Copé. J'espère qu'elle aura lieu le plus rapidement possible et qu'une solution sera trouvée. N'oublions pas qu'avec Emmaüs, ce sont 2 000 emplois qui sont en jeu !

UDF 12 REP_PUB Rhône-Alpes O