FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 14441  de  M.   Nesme Jean-Marc ( Union pour un Mouvement Populaire - Saône-et-Loire ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  17/03/2003  page :  1966
Réponse publiée au JO le :  18/08/2003  page :  6539
Rubrique :  enfants
Tête d'analyse :  maltraitance
Analyse :  lutte et prévention
Texte de la QUESTION : M. Jean-Marc Nesme appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les problèmes exposés par le rapporteur spécial de la commission des droits de l'homme de l'ONU chargé de la protection des enfants. En effet, dans une note préliminaire au rapport qui devrait paraître en avril prochain, la France est classée comme une destination et un pays de transit pour des enfants exploités. Le rapporteur dénonce également le manque de moyens consacrés, par notre pays, à la protection des enfants par les services de la défense des enfants notamment dans les départements. Il déplore encore le manque d'avancée sur le plan judiciaire, considérant qu'en France la parole de l'enfant est encore trop peu prise en compte pendant les procédures le concernant. Le rapporteur regrette également que des décisions relatives à la garde de l'enfant puissent, dans la pratique, être prises avant que les accusations de maltraitance aient été jugées pénalement, ce qui peut donner lieu à des situations où l'enfant est obligé de rester avec une personne faisant l'objet d'une enquête pénale pour des sévices infligés à ce même enfant. Il lui demande de bien vouloir lui exprimer son sentiment sur les conclusions apportées par le rapporteur de l'ONU.
Texte de la REPONSE : Le garde des sceaux fait savoir à l'honorable parlementaire que la répression de toutes les formes de maltraitance des enfants est une priorité essentielle du Gouvernement. Il convient d'attirer l'attention sur le fait que les magistrats qui interviennent dans le cadre des procédures civiles concernant les mineurs victimes sont spécialisés. Les champs d'intervention respectifs du juge aux affaires familiales et du juge des enfants sont clairement délimités par les textes et la jurisprudence. Le juge aux affaires familiales est le juge naturel des questions relatives à l'autorité parentale, le juge des enfants ayant vocation à intervenir dans les cas où la santé, la sécurité ou la moralité d'un mineur non émancipé sont en danger, ou les conditions de son éducation gravement compromises. Le juge aux affaires familiales peut intervenir dans le cadre d'une séparation des parents à la demande de l'un d'eux pour fixer le lieu de résidence de l'enfant et statuer sur les droits de visite et d'hébergement de l'autre parent. Le parent soupçonné peut ainsi être totalement privé de contacts avec l'enfant victime. Le juge aux affaires familiales peut également ordonner tout examen psychologique ou enquête sociale afin de recueillir auprès de l'enfant les renseignements nécessaires en respectant au mieux la vulnérabilité de ce dernier. Dans l'attente de ces éléments ou de l'issue d'une procédure pénale parallèlement pendante, il peut être sursis à statuer sur la demande d'un parent en matière de droit de visite. Il peut être également prévu que ces rencontres se dérouleront dans un lieu neutre, sous surveillance, avec l'accompagnement d'un personnel spécialisé. Ces structures sont en effet mises en place sur l'ensemble du territoire national, à la disposition tant des juges des enfants que des juges aux affaires familiales et peuvent répondre à ce type de situations. Le juge des enfants peut intervenir à la demande des parents, du procureur de la République ou du mineur lui-même pour prendre des mesures d'assistance éducative lorsque la santé, la sécurité ou la moralité de l'enfant sont en danger ou lorsque ses conditions d'éducation sont gravement compromises. Ainsi, des mesures de protection peuvent être prises immédiatement même en dehors de toute enquête pénale. Le juge des enfants est tenu par la loi d'entendre le mineur capable de discernement et, en pratique, les magistrats interprètent très largement cette disposition en recevant même les très jeunes enfants. Il peut ordonner des enquêtes psychologiques, de personnalité et sur les conditions de vie non seulement du mineur mais aussi de ses parents et peut retirer l'enfant de son milieu familial, même en urgence, afin de le protéger de toute agression supplémentaire ou de lui faire prodiguer les soins nécessités par son état. Lorsqu'une décision a d'ores et déjà été prise par un juge aux affaires familiales s'agissant des modalités d'exercice de l'autorité parentale, la compétence du juge des enfants est définie par l'article 375-3 du code civil. Ce texte prévoit en effet que le magistrat peut retrouver une compétence « si un fait nouveau, de nature à entraîner un danger pour le mineur, s'est révélé postérieurement à la décision statuant sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale ou confiant l'enfant à un tiers ». Il peut, dans ce cas, prendre toutes les dispositions de protection nécessaires pour l'enfant tel le retrait de son milieu familial. Il peut également modifier les modalités d'exercice de l'autorité parentale fixées par le juge des affaires familiales comme les droits de visite et d'hébergement accordés à un parent, voire un membre de la famille. Au-delà de la parole de l'enfant que les mesures d'instruction précitées permettent de prendre en compte et de restituer au juge, l'audition de l'enfant par le magistrat personnellement peut toujours être ordonnée. Lorsque le mineur en fait lui-même la demande, cette audition ne peut être refusée que par une décision spécialement motivée. Des dispositions particulières sont par ailleurs prévues quant au déroulement de cette audition puisqu'aux termes de l'article 388-1 du code civil, l'enfant peut être assisté d'un avocat ou de toute personne de son choix. Cependant, afin de prévenir les risques de pression d'un adulte et de garantir la libre expression de l'enfant, il est prévu que si ce choix n'apparaît pas conforme à son intérêt, le juge peut procéder à la désignation d'un administrateur ad hoc chargé d'accompagner et de représenter le mineur victime tout au long de la procédure en cas d'opposition d'intérêt entre le mineur et ses représentants légaux. L'enfant peut en outre désormais être accompagné par un tiers, un médecin spécialiste des questions de l'enfance ou toute autre personne mandatée par le juge des enfants. Les auditions des mineurs victimes peuvent faire l'objet d'un enregistrement audiovisuel. Cette disposition nouvelle permet notamment d'éviter des auditions successives du mineur dont le caractère traumatisant pour l'enfant a souvent été relevé. L'ensemble des juridictions équipé du matériel. Ces nouvelles dispositions sont accompagnées d'un important effort de formation des personnels concernés dans le cadre d'un partenariaux renforcé. L'expérience montre en effet que ces mesures sont mises en place efficacement dans les ressorts où des dispositifs partenariats étaient déjà préexistants, ce qui a facilité la mise en place des auditions filmées. L'Ecole nationale de la magistrature est mobilisée sur cette problématique et organise des sessions de formation continue sur ce thème que l'enregistrement audiovisuel assure pleinement son rôle initial, à savoir la diminution du nombre d'auditions des mineurs victimes qui peuvent être particulièrement traumatisantes.
UMP 12 REP_PUB Bourgogne O