Texte de la REPONSE :
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IMPRIMERIE HELIO-CORBEIL DANS L'ESSONNE Mme la présidente. La parole est à M. Manuel
Valls, pour exposer sa question, n° 1445. M. Manuel Valls.
Madame la ministre déléguée au commerce extérieur, de nombreuses entreprises
ferment en Île-de-France et des sites historiques, qui avaient structuré
l'histoire économique et sociale de ces territoires, sont en voie d'extinction.
Pour les salariés, les citoyens et, bien sûr, les élus des communes touchées,
ces événements sont dramatiques et lourds de conséquences pour les territoires
et les familles. Ainsi, à Corbeil-Essonnes, dans la circonscription dont je
suis le député, le groupe Quebecor a annoncé, voici quelques mois, un plan
social conduisant à la suppression de plus de 133 emplois, soit la moitié des
effectifs de l'imprimerie Hélio-Corbeil. Cette nouvelle restructuration
préparait en fait la fermeture d'un site jugé non rentable par Quebecor. Les
plans d'investissement qui auraient pu permettre une redynamisation de
l'entreprise sont restés jusqu'à ce jour lettre morte, alors qu'ils avaient fait
l'objet d'un accord entre la direction et les représentants du personnel.
L'industrie papetière, présente à Corbeil depuis 1829, risque ainsi de
disparaître si les orientations de la direction ne sont pas revues. Le
Gouvernement ne peut pas se contenter d'être le spectateur discret d'un déclin
qui n'a pourtant rien d'inéluctable. L'exemple de Corbeil est, de ce point de
vue, très intéressant. Pour les salariés d'Hélio, qui vivent évidemment avec
angoisse ces annonces et cette période, l'enjeu est vital. Un plan alternatif
élaboré par les salariés montre qu'il est possible de conserver les savoir-faire
historiques de l'entreprise tout en relevant le défi - le " challenge " - lancé
par la modernité et la mondialisation. Ce plan, unanimement jugé sérieux et
crédible, a été présenté à des centaines de citoyens qui ont également pu
visiter l'imprimerie à l'occasion d'une journée portes ouvertes organisée voici
quelques semaines par les salariés. À la suite d'une table ronde organisés
par le préfet, qui suit attentivement ce dossier, en présence des collectivités
locales et des élus du secteur, les représentants du personnel ont proposé la
création d'un pôle sérigraphique d'avenir, marqué par l'arrivée d'une plus
grande machine offset et la constitution d'un centre de formation qui
pourrait voir le jour en partenariat avec l'Université des métiers d'Évry,
regroupant l'ensemble des CFA du centre Essonne, sous la responsabilité de la
chambre de commerce et d'industrie et de la chambre des métiers. Le conseil
régional et le conseil général de l'Essonne sont prêts à être les partenaires
actifs de ce projet, selon leurs compétences respectives dans les domaines de la
formation ou des infrastructures routières. Par ailleurs, le patron de la
Socpresse, qui est aussi le sénateur-maire de Corbeil-Essonnes, s'est engagé
publiquement à fournir à Hélio-Corbeil, par l'intermédiaire notamment du
Figaro Magazine, un plan de charge qui préserverait 230 emplois. Enfin,
un autre site de la commune - sur les terrains dits Decauville ou sur les 14
hectares de l'ancienne papeterie - pourrait accueillir Hélio-Corbeil, qui a sans
doute vocation à se développer et à quitter le centre-ville dense et urbain de
Corbeil-Essonnes. L'espoir renaît donc dans un secteur marqué par le départ
de plusieurs entreprises, comme c'est le cas à Ris-Orangis avec
Lu-Danone. Alors que notre pays est toujours en grande difficulté sur le
front de l'emploi et de la croissance, ma question est donc simple : pour
contrer l'affaiblissement du tissu industriel français, quel rôle
l'État-stratège et, d'une manière générale, les pouvoirs publics, entendent-ils
jouer avec les collectivités locales et le monde du travail et de l'entreprise
pour relancer l'investissement, redynamiser notre appareil productif et, ainsi,
prévenir des drames qui affectent la vie de nos concitoyens et des territoires,
notamment dans des villes qui connaissent une situation difficile avec de
nombreux quartiers en renouvellement urbain, où vivent très souvent ces salariés
? Le dossier d'Hélio-Corbeil offre, madame la ministre, l'occasion de passer des
paroles aux actes. M. Bruno Le Roux. Très bonne question
! Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre
déléguée au commerce extérieur. Mme Christine Lagarde,
ministre déléguée au commerce extérieur. Monsieur Valls, vous interrogez
le Gouvernement sur les suites de la décision annoncée par Quebecor, le lundi 12
septembre 2005, de restructurer l'entreprise. Ce plan de restructuration, comme
vous l'avez indiqué, prévoit la suppression de 133 postes sur un total de 256
salariés. La direction, selon la note qu'elle a communiquée, explique cette
décision par la mauvaise conjoncture, des prix en forte baisse, des frais
salariaux élevés et une productivité insuffisante au regard de celle constatée
ailleurs dans le groupe, qui emploie environ 35 000 salariés dans le monde.
L'ensemble de ces facteurs conduisent, selon les explications de la direction, à
des pertes d'exploitation de 3 millions d'euros en 2005. Les représentants des
salariés, quant à eux, expliquent la baisse de compétitivité du site par des
volumes de production et des investissements insuffisants, comme vous l'avez
souligné. Il semble que les volumes de travail en faveur du site soient
suffisants pour assurer la poursuite d'une exploitation positive après
restructuration. Le Gouvernement note que des investissements d'amélioration
sont d'ailleurs prévus par la direction de l'entreprise dans l'atelier de
gravure d'Hélio-Corbeil afin de préserver sa pérennité. Votre question porte
sur le rôle de stratège du Gouvernement. S'agissant de la gestion d'une
entreprise, il n'entend pas s'immiscer dans les décisions de la direction, même
si la perte de 133 emplois est infiniment regrettable. Quant à la
restructuration annoncée, le ministre délégué à l'emploi, au travail et à
l'insertion professionnelle et ses services suivent avec une grande attention
les négociations en cours entre la direction et les représentants du personnel
dans le cadre de la procédure d'information et de consultation du plan de
sauvegarde de l'emploi, procédure prévue et encadrée très rigoureusement par le
code du travail. Ouverte au mois de septembre, elle devrait s'achever au mois de
mars. Les services ont, dès le commencement de la procédure, mené une médiation
entre les deux parties afin de rapprocher leurs positions respectives. Quoiqu'il
en soit, les pouvoirs publics veilleront bien entendu à ce que les mesures
d'accompagnement social des salariés licenciés soient de qualité et à ce que
l'entreprise respecte l'obligation de revitalisation du bassin d'emploi de
Corbeil, conformément à la loi de cohésion sociale du 18 janvier 2005, à hauteur
du nombre d'emplois disparus. S'agissant plus généralement des problèmes
structurels que connaît le secteur de l'imprimerie, le Gouvernement souhaite
engager un dialogue avec l'ensemble des parties prenantes pour anticiper les
mutations économiques, inéluctables dans certains secteurs d'activité, notamment
ceux à haute implication de main-d'oeuvre. Le Gouvernement note que
l'investissement était plutôt bien orienté en 2005 et que cette tendance semble
s'accélérer en 2006. Cette évolution témoigne de la redynamisation du tissu
industriel français, dans un contexte de promotion de l'innovation par le
Gouvernement au travers d'un certain nombre de mesures qui ont été annoncées,
notamment celles relatives à l'Agence pour l'innovation industrielle et à
l'Agence pour la recherche. Mme la présidente. La parole est
à M. Manuel Valls. M. Manuel Valls. Je rappelle que la ville
de Corbeil, dont trois quartiers sont en renouvellement urbain, a été déjà
marquée par le départ de nombreuses entreprises. Et que pèsent sur elle, comme
une épée de Damoclès, des bruits inquiétants concernant l'avenir d'Altis. Il est
donc évident que la ville et son agglomération ont besoin de préserver leurs
entreprises. Hélio-Corbeil a un savoir-faire incontestable. Il n'y a pas
beaucoup de situations dans lesquelles à la fois l'État, le maire de la commune
- industriel et prêt à investir, il a d'ailleurs fait découvrir à une partie de
son conseil municipal une entreprise que celui-ci ne connaissait pas -, les
collectivités territoriales et la chambre de commerce veulent bâtir un projet
avec les salariés. La responsabilité de ces derniers est très engagée, et ils
sont très conscients du défi technologique qui est devant eux. Il faut faire
passer des messages dans les jours qui viennent - plusieurs rencontres sont
prévues - pour que l'on sauve non seulement 130 emplois mais une entreprise qui
compte beaucoup dans l'histoire industrielle de cette ville et qui a
incontestablement beaucoup d'avenir devant elle.
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