FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 1582  de  M.   Meyer Gilbert ( Union pour un Mouvement Populaire - Haut-Rhin ) QOSD
Ministère interrogé :  emploi, cohésion sociale et logement
Ministère attributaire :  emploi, cohésion sociale et logement
Question publiée au JO le :  02/05/2006  page :  4559
Réponse publiée au JO le :  03/05/2006  page :  2754
Rubrique :  personnes âgées
Tête d'analyse :  journée de solidarité
Analyse :  conséquences. Alsace-Moselle
Texte de la QUESTION : M. Gilbert Meyer appelle l'attention de M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement sur la spécificité du régime des jours fériés et chômés en Alsace-Moselle. Le droit local, de par l'ordonnance de 1892, a énuméré neuf jours fériés. Deux d'entre eux sont ignorés par le code du travail, le lendemain de Noël, soit le 26 décembre, et le vendredi saint. Localement, le vendredi saint et le 26 décembre ont une signification particulière. Les banaliser en leur donnant une capacité juridique de « jour ouvrable » serait une entorse au droit local ci-dessus rappelé. La loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 permet, en substitution de la journée de solidarité du lundi de Pentecôte, de retenir un autre jour. Ainsi, des entreprises ayant fait l'objet d'un accord de branche ou d'une convention ou accord d'entreprise ont l'autorisation de choisir un autre jour ouvré que le lundi de Pentecôte. C'est ainsi qu'en Alsace-Moselle quelques grandes surfaces ont choisi d'ouvrir le vendredi saint en 2005 et en 2006. Ce choix crée un régime discriminatoire par rapport aux petits commerces, qui eux ne peuvent obtenir un accord de branche ou d'entreprise et doivent ouvrir le lundi de Pentecôte. Un aménagement de la loi du 30 juin 2004 visée permettrait de clarifier la situation. Il serait donc opportun que la loi précitée soit complétée par une modification correspondante du code du travail. Cette modification concernerait le deuxième alinéa de l'article L. 212-16 du code du travail, à travers une phrase rédigée ainsi : « Un accord de branche ou d'entreprise ne peut pas retenir, pour les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, le vendredi saint et le 26 décembre. » Il lui demande donc de bien vouloir se prononcer sur cette proposition.
Texte de la REPONSE :

REGIME DES JOURS FERIES EN ALSACE-MOSELLE

M. le président. La parole est à M. Gilbert Meyer, pour exposer sa question, n° 1582, relative au régime des jours fériés en Alsace-Moselle.
M. Gilbert Meyer. Monsieur le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, je souhaite vous interroger sur la spécificité du régime des jours fériés et chômés en Alsace-Moselle.
Le régime juridique du droit local en Alsace et en Moselle a été créé en 1919 après la fin de la Première Guerre mondiale et s'applique aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle. Ces dispositions, à l'origine conçues pour être temporaires, ont été pérennisées par la loi du 1er juin 1924.
L'ordonnance de 1892 a énuméré neuf jours fériés. Deux d'entre eux sont ignorés par le code du travail : le lendemain de Noël, 26 décembre, et le Vendredi saint. Localement, ils revêtent une signification particulière et les banaliser en leur donnant le statut juridique de jour ouvrable serait une entorse au droit local.
Or la loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées permet, en substitution de la journée de solidarité du lundi de Pentecôte, de retenir un autre jour. Des entreprises ayant fait l'objet d'un accord de branche ou d'une convention ou accord d'entreprise ont ainsi l'autorisation de choisir un autre jour ouvré que le lundi de Pentecôte. À ce titre, quelques grandes surfaces ont choisi d'ouvrir le Vendredi saint en 2005 et en 2006, jour chômé en Alsace-Moselle. Ce choix crée un régime discriminatoire par rapport aux petits commerces, qui, eux, ne peuvent obtenir un accord de branche ou d'entreprise et doivent ouvrir le lundi de Pentecôte.
Le caractère légal du chômage des jours fériés relevant du droit local, tels le Vendredi saint et le 26 décembre, ne saurait être contourné par un accord de branche au sein des entreprises. Un aménagement de la loi du 30 juin 2004 permettrait de clarifier la situation. Tel était d'ailleurs l'objet de la proposition de loi que j'avais déposée en avril 2005.
Il serait donc opportun que la loi précitée soit complétée par une modification du code du travail visant à ajouter au deuxième alinéa de l'article L. 212-16 la phrase suivante : " Un accord de branche ou d'entreprise ne peut pas retenir, pour les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, le Vendredi saint et le 26 décembre. "
Je souhaiterais que vous vous prononciez sur cette proposition, monsieur le ministre.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes.
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Monsieur le député, je sais à quel point ce sujet tient à coeur à l'ensemble des élus d'Alsace-Moselle. J'ai quelque souvenir d'un débat à ce propos dans le cadre de l'examen de la loi du 31 mars 2005 portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise, loi dont j'aurai l'occasion demain de faire un bilan devant la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, un an après sa mise en oeuvre.
Nous connaissons votre attachement au régime spécifique des jours fériés et chômés en Alsace-Moselle. L'ordonnance du 16 août 1892 en a énuméré neuf, dont deux ne figurent pas à l'article L. 222-1 du code du travail fixant les jours fériés de droit commun : le 26 décembre et le Vendredi saint. Quatre autres jours fériés ne figurant pas dans l'ordonnance du 16 août 1892 - le 14 juillet, le 1er mai et, fruits d'une histoire douloureuse, le 11 novembre et le 8 mai - sont également applicables en Alsace-Moselle. Ainsi, les onze jours fériés mentionnés à l'article L. 222-1 du code du travail, auxquels s'ajoutent le 26 décembre et le Vendredi saint, sont des jours fériés et chômés en Alsace-Moselle.
La loi du 31 mars 2005 portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise est venue rappeler expressément ces dispositions en indiquant que " dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, les jours fériés figurant dans l'ordonnance du 16 août 1892, ainsi que le 11 novembre, le 1er mai et le 14 juillet sont des jours chômés ". En conséquence, cette spécificité locale ayant été reconnue par le législateur, le risque de voir le 26 décembre et le Vendredi saint banalisés s'avère limité.
Quant à la journée de solidarité, sa fixation relève en principe de la négociation collective. Ce n'est qu'à titre subsidiaire, c'est-à-dire à défaut d'accord collectif prévoyant une autre date, que la journée de solidarité est fixée par la loi du 30 juin 2004 au lundi de Pentecôte. C'est pourquoi certaines grandes surfaces en Alsace-Moselle ont pu, par accord collectif, choisir d'effectuer la journée de solidarité le Vendredi saint.
Dans les petits commerces, la journée de solidarité doit théoriquement, à défaut d'accord collectif, être fixée au lundi de Pentecôte. Cela étant, le législateur a précisé que, pour les salariés ne travaillant pas ordinairement, en vertu de la répartition de leur horaire hebdomadaire de travail sur les différents jours de la semaine, le jour retenu pour la journée de solidarité, il appartenait à l'employeur de fixer une autre date, après consultation des institutions représentatives du personnel lorsqu'elles existent. Tel est majoritairement le cas dans les petits commerces où le lundi correspond généralement au jour de fermeture hebdomadaire de l'établissement. Dans ces conditions, l'employeur peut fixer un autre jour que le lundi de Pentecôte pour l'accomplissement de la journée de solidarité.
Il ne nous paraît pas en l'état qu'il y ait discrimination entre les grandes surfaces et les petits commerces. J'ai néanmoins demandé aux trois directeurs départementaux du travail de faire le point sur ces dossiers pour savoir s'il est nécessaire, comme vous le souhaitez, d'introduire un amendement complémentaire. Je vous tiendrai personnellement informé des conclusions de leur rapport.
Nous sommes ouverts à ce que ces jours soient pleinement reconnus puisque la loi du 31 décembre 2005 a pris en compte la spécificité de ce régime.
M. le président. La parole est à M. Gilbert Meyer.
M. Gilbert Meyer. Monsieur le ministre, j'observe que vous ne vous êtes pas fortement engagé. Je ne m'intéresse pas seulement à la différence de régime entre les grandes surfaces et les petits commerces. L'essentiel est ailleurs. Vous venez de souligner que la loi du 30 juin 2004 reconnaît les jours fériés énumérés dans l'ordonnance de 1892. Alors, pourquoi ne pas aller jusqu'au bout en consacrant définitivement le Vendredi saint et le 26 décembre comme jours fériés et chômés ? Pour cela, point n'est besoin d'une étude.

UMP 12 REP_PUB Alsace O