Texte de la QUESTION :
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M. Gilbert Meyer appelle l'attention de M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement sur la spécificité du régime des jours fériés et chômés en Alsace-Moselle. Le droit local, de par l'ordonnance de 1892, a énuméré neuf jours fériés. Deux d'entre eux sont ignorés par le code du travail, le lendemain de Noël, soit le 26 décembre, et le vendredi saint. Localement, le vendredi saint et le 26 décembre ont une signification particulière. Les banaliser en leur donnant une capacité juridique de « jour ouvrable » serait une entorse au droit local ci-dessus rappelé. La loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 permet, en substitution de la journée de solidarité du lundi de Pentecôte, de retenir un autre jour. Ainsi, des entreprises ayant fait l'objet d'un accord de branche ou d'une convention ou accord d'entreprise ont l'autorisation de choisir un autre jour ouvré que le lundi de Pentecôte. C'est ainsi qu'en Alsace-Moselle quelques grandes surfaces ont choisi d'ouvrir le vendredi saint en 2005 et en 2006. Ce choix crée un régime discriminatoire par rapport aux petits commerces, qui eux ne peuvent obtenir un accord de branche ou d'entreprise et doivent ouvrir le lundi de Pentecôte. Un aménagement de la loi du 30 juin 2004 visée permettrait de clarifier la situation. Il serait donc opportun que la loi précitée soit complétée par une modification correspondante du code du travail. Cette modification concernerait le deuxième alinéa de l'article L. 212-16 du code du travail, à travers une phrase rédigée ainsi : « Un accord de branche ou d'entreprise ne peut pas retenir, pour les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, le vendredi saint et le 26 décembre. » Il lui demande donc de bien vouloir se prononcer sur cette proposition.
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Texte de la REPONSE :
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REGIME DES JOURS FERIES EN ALSACE-MOSELLE M. le président. La parole est à M. Gilbert
Meyer, pour exposer sa question, n° 1582, relative au régime des jours fériés en
Alsace-Moselle. M. Gilbert Meyer. Monsieur le ministre
délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, je
souhaite vous interroger sur la spécificité du régime des jours fériés et chômés
en Alsace-Moselle. Le régime juridique du droit local en Alsace et en Moselle
a été créé en 1919 après la fin de la Première Guerre mondiale et s'applique aux
départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle. Ces dispositions, à
l'origine conçues pour être temporaires, ont été pérennisées par la loi du 1er
juin 1924. L'ordonnance de 1892 a énuméré neuf jours fériés. Deux d'entre
eux sont ignorés par le code du travail : le lendemain de Noël, 26 décembre, et
le Vendredi saint. Localement, ils revêtent une signification particulière et
les banaliser en leur donnant le statut juridique de jour ouvrable serait une
entorse au droit local. Or la loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 relative à la
solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées
permet, en substitution de la journée de solidarité du lundi de Pentecôte, de
retenir un autre jour. Des entreprises ayant fait l'objet d'un accord de branche
ou d'une convention ou accord d'entreprise ont ainsi l'autorisation de choisir
un autre jour ouvré que le lundi de Pentecôte. À ce titre, quelques grandes
surfaces ont choisi d'ouvrir le Vendredi saint en 2005 et en 2006, jour chômé en
Alsace-Moselle. Ce choix crée un régime discriminatoire par rapport aux petits
commerces, qui, eux, ne peuvent obtenir un accord de branche ou d'entreprise et
doivent ouvrir le lundi de Pentecôte. Le caractère légal du chômage des jours
fériés relevant du droit local, tels le Vendredi saint et le 26 décembre, ne
saurait être contourné par un accord de branche au sein des entreprises. Un
aménagement de la loi du 30 juin 2004 permettrait de clarifier la situation. Tel
était d'ailleurs l'objet de la proposition de loi que j'avais déposée en avril
2005. Il serait donc opportun que la loi précitée soit complétée par une
modification du code du travail visant à ajouter au deuxième alinéa de l'article
L. 212-16 la phrase suivante : " Un accord de branche ou d'entreprise ne peut
pas retenir, pour les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle,
le Vendredi saint et le 26 décembre. " Je souhaiterais que vous vous
prononciez sur cette proposition, monsieur le ministre. M. le
président. La parole est à M. le ministre délégué à l'emploi, au
travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. M. Gérard
Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion
professionnelle des jeunes. Monsieur le député, je sais à quel point ce
sujet tient à coeur à l'ensemble des élus d'Alsace-Moselle. J'ai quelque
souvenir d'un débat à ce propos dans le cadre de l'examen de la loi du 31 mars
2005 portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise,
loi dont j'aurai l'occasion demain de faire un bilan devant la commission des
affaires culturelles, familiales et sociales, un an après sa mise en
oeuvre. Nous connaissons votre attachement au régime spécifique des jours
fériés et chômés en Alsace-Moselle. L'ordonnance du 16 août 1892 en a énuméré
neuf, dont deux ne figurent pas à l'article L. 222-1 du code du travail fixant
les jours fériés de droit commun : le 26 décembre et le Vendredi saint. Quatre
autres jours fériés ne figurant pas dans l'ordonnance du 16 août 1892 - le 14
juillet, le 1er mai et, fruits d'une histoire douloureuse, le 11 novembre et le
8 mai - sont également applicables en Alsace-Moselle. Ainsi, les onze jours
fériés mentionnés à l'article L. 222-1 du code du travail, auxquels s'ajoutent
le 26 décembre et le Vendredi saint, sont des jours fériés et chômés en
Alsace-Moselle. La loi du 31 mars 2005 portant réforme de l'organisation du
temps de travail dans l'entreprise est venue rappeler expressément ces
dispositions en indiquant que " dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin
et de la Moselle, les jours fériés figurant dans l'ordonnance du 16 août 1892,
ainsi que le 11 novembre, le 1er mai et le 14 juillet sont des jours chômés ".
En conséquence, cette spécificité locale ayant été reconnue par le législateur,
le risque de voir le 26 décembre et le Vendredi saint banalisés s'avère
limité. Quant à la journée de solidarité, sa fixation relève en principe de
la négociation collective. Ce n'est qu'à titre subsidiaire, c'est-à-dire à
défaut d'accord collectif prévoyant une autre date, que la journée de solidarité
est fixée par la loi du 30 juin 2004 au lundi de Pentecôte. C'est pourquoi
certaines grandes surfaces en Alsace-Moselle ont pu, par accord collectif,
choisir d'effectuer la journée de solidarité le Vendredi saint. Dans les
petits commerces, la journée de solidarité doit théoriquement, à défaut d'accord
collectif, être fixée au lundi de Pentecôte. Cela étant, le législateur a
précisé que, pour les salariés ne travaillant pas ordinairement, en vertu de la
répartition de leur horaire hebdomadaire de travail sur les différents jours de
la semaine, le jour retenu pour la journée de solidarité, il appartenait à
l'employeur de fixer une autre date, après consultation des institutions
représentatives du personnel lorsqu'elles existent. Tel est majoritairement le
cas dans les petits commerces où le lundi correspond généralement au jour de
fermeture hebdomadaire de l'établissement. Dans ces conditions, l'employeur peut
fixer un autre jour que le lundi de Pentecôte pour l'accomplissement de la
journée de solidarité. Il ne nous paraît pas en l'état qu'il y ait
discrimination entre les grandes surfaces et les petits commerces. J'ai
néanmoins demandé aux trois directeurs départementaux du travail de faire le
point sur ces dossiers pour savoir s'il est nécessaire, comme vous le souhaitez,
d'introduire un amendement complémentaire. Je vous tiendrai personnellement
informé des conclusions de leur rapport. Nous sommes ouverts à ce que ces
jours soient pleinement reconnus puisque la loi du 31 décembre 2005 a pris en
compte la spécificité de ce régime. M. le président. La
parole est à M. Gilbert Meyer. M. Gilbert Meyer. Monsieur le
ministre, j'observe que vous ne vous êtes pas fortement engagé. Je ne
m'intéresse pas seulement à la différence de régime entre les grandes surfaces
et les petits commerces. L'essentiel est ailleurs. Vous venez de souligner que
la loi du 30 juin 2004 reconnaît les jours fériés énumérés dans l'ordonnance de
1892. Alors, pourquoi ne pas aller jusqu'au bout en consacrant définitivement le
Vendredi saint et le 26 décembre comme jours fériés et chômés ? Pour cela, point
n'est besoin d'une étude.
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