FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 1603  de  M.   Léonard Jean-Louis ( Union pour un Mouvement Populaire - Charente-Maritime ) QOSD
Ministère interrogé :  sécurité sociale, personnes âgées, personnes handicapées et famille
Ministère attributaire :  sécurité sociale, personnes âgées, personnes handicapées et famille
Question publiée au JO le :  09/05/2006  page :  4788
Réponse publiée au JO le :  10/05/2006  page :  3151
Rubrique :  handicapés
Tête d'analyse :  ESAT
Analyse :  rémunérations
Texte de la QUESTION : M. Jean-Louis Léonard attire l'attention de M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille sur la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées qui prévoit une revalorisation du statut et des rémunérations des travailleurs handicapés employés dans les entreprises adaptées. Cependant les engagements fixés par la loi ne sont pas accompagnés des mesures financières et en particulier aucune revalorisation des aides au poste. L'augmentation de la rémunération incombe donc totalement aux structures. L'impact de cette rémunération supplémentaire est très inquiétante pour l'équilibre financier des structures, qui sont dans l'incapacité de faire face à cette évolution. D'autre part, les travailleurs handicapés, dont les revenus vont certes augmenter, auront très probablement moins de ressources puisque cela va entraîner une diminution des aides complémentaires qui leur sont habituellement accordées comme l'allocation logement. Cela va à l'encontre de l'effet escompté par la loi.
Texte de la REPONSE :

BUDGET DES ETABLISSEMENTS ET SERVICES D'AIDE PAR LE TRAVAIL POUR LES PERSONNES HANDICAPEES

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Léonard, pour exposer sa question, n° 1603, relative au budget des établissements et services d'aide par le travail pour les personnes handicapées.
M. Jean-Louis Léonard. Monsieur le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, en votant, le 11 février 2005, la loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, nous avons voté une grande loi, saluée par l'ensemble du monde du handicap. Venant concrétiser une des grandes orientations fixées par le Président de la République en 2002, elle répondait aussi à une attente très forte.
Entre autres avancées, cette loi prévoit notamment, dans son article 38, une revalorisation du statut et de la rémunération des travailleurs handicapés employés par les structures de travail adaptées, notamment par les entreprises adaptées. Nous avons voté des deux mains cette bonne mesure, et nous nous en sommes tous d'autant plus félicités qu'elle s'accompagnait d'un renforcement des actions de formation et de l'accompagnement en milieu ordinaire, conforme aux souhaits de tous ceux qui, comme nous-mêmes, s'occupent de personnes handicapées.
Mais le problème est que l'augmentation de la rémunération, qui passe de 90 % à 100 % du SMIC, n'a pas été compensée par une quelconque revalorisation des aides au poste. Cette revalorisation des salaires, que nous avons imposée par la loi, aboutit à un surcoût 5 000 à 10 000 euros par an par travailleur handicapé, le complément de rémunération moyen s'élevant jusqu'ici à environ 11 650 euros par an. L'état actuel des projets de décrets prévoit une aide au poste d'un montant de 11 691 euros, soit un coût compensé de quarante et un euros. L'écart entre ce coût et les 1 300 euros imposés par la loi crée un grave problème. L'impact de cette charge supplémentaire, aussi bienvenue soit-elle du point de vue humain et social, est très dangereux pour l'équilibre financier de structures qui sont dans l'incapacité totale d'y faire face.
Permettez-moi de vous en donner quelques exemples, monsieur le ministre. Ma circonscription du pays rochelais compte en effet deux très importantes entreprises adaptées. Celle de Périgny emploie vingt-neuf équivalents temps plein, ce qui représente une charge salariale supplémentaire de 40 000 à 45 000 euros. Cette entreprise, spécialisée dans l'entretien des espaces verts, la peinture en bâtiment ou l'entretien ménager des locaux, ne pourra naturellement pas faire face à cet accroissement de ses charges, sauf à augmenter considérablement le coût de ses prestations. Pour l'atelier de Saint-Savinien, toujours en Charente-Maritime, qui emploie neuf équivalents temps plein en milieu rural parfaitement adaptés pour des travaux de ménages, le surcoût s'élèvera à 12 000 euros.
Personne ne conteste que l'activité marchande générée par le travail des structures adaptées intervenant dans un secteur concurrentiel doit couvrir une partie de leurs coûts ; mais on ne peut pas imaginer, monsieur le ministre, que les règles de la stricte concurrence puissent s'appliquer à ces établissements. Tout le monde sait que la productivité par heure travaillée dans ces établissements n'est en rien comparable à celle des entreprises du secteur marchand.
On mesure dans ces conditions l'aberration d'un système qui impose pratiquement à ces établissements d'augmenter de 15 % de leur productivité : un objectif aussi irréalisable revient à condamner à mort ces établissements ! Un tel résultat serait d'autant plus regrettable que ces entreprises se félicitaient de la reconnaissance et de l'encouragement qu'elles avaient trouvé dans ce texte. Il y a là une grave distorsion entre ce que nous avons voté et les dispositions budgétaires.
Je compte sur vous, monsieur le ministre, pour nous rassurer et nous rendre le courage de défendre cette loi, et surtout de continuer le travail que nous menons avec les personnes handicapées.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.
M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le député, vous avez rappelé l'importance de la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Cette loi vise à améliorer notablement la situation des personnes handicapées, en créant, conformément au souhait du Président de la République, un droit à la compensation du handicap. Elle comporte de nombreuses avancées, en matière d'accessibilité, de scolarisation, de compensation du handicap. L'emploi n'est pas oublié par ce texte, qui compte, non seulement des dispositions sur l'emploi en milieu ordinaire, mais aussi des mesures intéressant les entreprises adaptées et les centres d'aide par le travail.
S'agissant des entreprises adaptées, sur lesquelles porte votre question, la loi a fait l'objet de deux décrets et deux arrêtés du 13 février 2006. Ces textes reconnaissent aux travailleurs dans les entreprises adaptées le statut de salariés à part entière, ce qui était l'attente principale, non seulement des gestionnaires des " ateliers protégées ", ancienne appellation des entreprises adaptées, mais aussi des travailleurs et de leurs familles. Désormais, ces travailleurs ne pourront plus recevoir une rémunération inférieure au salaire minimum de croissance. Comme tous les salariés, ils recevront la totalité de leur rémunération de leur employeur.
Cette amélioration matérielle de la situation des travailleurs dans les entreprises adaptées a été rendue possible par la création d'une aide au poste, aide aux structures qui s'est substituée à l'ancienne garantie de ressources pour les travailleurs handicapés, aide à la personne. Le montant annuel de l'aide au poste apportée par l'État est supérieur au chiffre que vous avez cité, puisqu'il a été fixé, après discussion, à 11 837 euros, soit 80 % du SMIC. Il a été calculé à partir du niveau du salaire direct moyen versé par les ateliers protégés avant leur transformation en entreprises adaptées ; il prend notamment en compte le financement des accessoires de salaires et des charges. Ce montant représente une augmentation de 20 % par rapport à l'aide servie dans le système antérieur de la garantie de ressources pour les travailleurs handicapés. Les crédits consacrés à cette aide en loi de finances pour 2006 sont donc en augmentation de plus de 28 % par rapport à la dotation 2005. Ils permettront de financer cette année 19 100 postes équivalents temps plein, ainsi que 250 nouveaux postes, que nous continuons à créer dans ces entreprises.
De la sorte, les travailleurs en entreprises adaptées sont désormais des salariés comme les autres ; ils accèdent à l'ensemble des aides sociales, aides au logement comprises, correspondant à leur niveau de revenu.
Le Gouvernement entend également répondre aux difficultés que rencontrent certaines entreprises adaptées du fait de l'ouverture des marchés. Comme vous l'avez indiqué à l'instant, cette concurrence est de plus en plus forte. En effet, ces entreprises manufacturières à faible valeur ajoutée subissent de plein fouet la concurrence des pays émergents, et ont, dans la période récente, perdu des marchés importants au profit de ces derniers.
C'est la raison pour laquelle j'ai présenté, le 9 février dernier, un plan de soutien à la modernisation et au développement des entreprises adaptées. II vise à assurer la pérennisation des structures, d'accompagner les mutations nécessaires et de gérer les situations les plus difficiles.
Dès ce mois de mai, un contrat d'objectifs de trois ans doit être élaboré et signé entre l'État et chaque entreprise adaptée. C'est dans ce cadre que seront prévus les aides financières et les conseils en stratégie et en gestion de compétences nécessaires pour opérer les reconversions qui s'imposent et la conquête de nouveaux marchés.
Ce plan s'appuie sur une subvention de développement et d'accompagnement. Nous avons décidé de consacrer cette année dix millions d'euros supplémentaires au soutien aux entreprises adaptées par rapport à l'année 2005. L'ensemble des aides de droit commun aux entreprises peut également être mobilisé, ces structures étant désormais de véritables entreprises, au même titre que celles opérant en milieu de travail ordinaire.
Le 14 mars 2006, j'ai cosigné avec Gérard Larcher, une instruction invitant l'ensemble des services à faire preuve de la plus grande vigilance dans le traitement des situations difficiles.
Telle est, monsieur le député, la réponse que je pouvais apporter à la question très légitime que vous avez posée.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Léonard.
M. Jean-Louis Léonard. Je tiens, monsieur le ministre, à vous remercier d'avoir précisé ces éléments, qui ne se dégageaient pas très clairement des informations qui nous étaient parvenues. Il est vrai que les décrets d'application mettent un certain temps à atteindre nos provinces ! C'est peut-être faute de disposer de la ligne de TGV évoquée tout à l'heure par M. Bono que l'information ne va pas encore à 220 kilomètres heure chez nous ! Quoi qu'il en soit, monsieur le ministre, croyez bien que je suivrai attentivement la suite des événements.
Je suis particulièrement sensible u plan de soutien que vous venez d'annoncer, car il va permettre de lancer la contractualisation et nous donner une lisibilité à trois ans. Nous pourrons ainsi faire face aux engagements pris à la quasi-unanimité de ces bancs.

UMP 12 REP_PUB Poitou-Charentes O