DEBAT :
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EXTRADITION DE CESARE BATTISTI
M. le président. La parole est à M. Richard Mallié, pour le groupe UMP.
M. Richard Mallié. Ma question s'adresse à M. le garde des sceaux, ministre de la justice. Permettez-moi, monsieur le président, d'associer à cette question mes collègues Franck Gilard et Pierre Lellouche.
Le 6 juin 1978, le gardien de prison Antonio Santoro est abattu de deux balles dans le dos.
Le 16 février 1979, Lino Sabbadin, boucher, est assassiné froidement pour s'être opposé à un vol avec violence ; Pierluigi Torregiani, bijoutier, est assassiné pour les mêmes raisons, et son jeune fils présent sur les lieux reçoit une balle dans la colonne vertébrale, qui le laissera paraplégique.
M. Alain Marsaud. Eh oui !
M. Richard Mallié. Le 16 avril 1979, le policier Andrea Campagna est abattu de cinq balles à bout portant pour avoir participé à l'arrestation des assassins du bijoutier Torregiani.
En 1990, la justice italienne a condamné par contumace Cesare Battisti, ancien terroriste d'extrême gauche, à la réclusion à perpétuité pour ces meurtres.
Treize ans plus tard, le 3 janvier 2003, l'Italie demande l'extradition de Cesare Battisti, qui vit libre en France depuis fort longtemps (" Inadmissible ! " sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il y a quatre jours, M. le Premier ministre peut enfin signer le décret autorisant l'extradition de Battisti, ce dernier ayant épuisé toutes les voies de recours. Or, depuis le début de la procédure d'extradition, de multiples voix se sont élevées à gauche, celles des bien-pensants, celles des donneurs de leçons, celles des moralisateurs, celles des Verts et des groupes d'extrême gauche, en un mot, celles de l'opposition (Exclamations sur quelques bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Depuis dix mois, elles se sont répandues sans discontinuer dans la presse, multipliant les comités de soutien et les pétitions. Tout cela, non pour dénoncer ces assassinats odieux, mais pour fustiger notre gouvernement d'avoir donné suite à la demande italienne d'extradition...
M. le président. Monsieur Mallié, je vous prie de poser votre question !
M. Richard Mallié. ...et pour placer Battisti sous la protection de la ville de Paris,...
M. Alain Marsaud. C'est scandaleux !
M. Richard Mallié. ...en omettant scrupuleusement d'évoquer la vingtaine de meurtres qu'on lui attribue.
Face à cette polémique partisane, scandaleuse et choquante, je demande à M. le garde des sceaux de réaffirmer, pour ceux qui ne l'auraient pas entendue, la voix de la raison et de la responsabilité. La démocratie et l'État de droit commandent en effet de répondre favorablement à cette demande d'extradition (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le député, la voix de la raison ne peut appeler à autre chose qu'au respect du droit (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
L'Italie a effectivement demandé l'extradition de M. Battisti.
Plusieurs députés du groupe socialiste. Pas l'Italie, Berlusconi !
M. le garde des sceaux. Vous avez rappelé les faits qui ont été reprochés à M. Battisti et qui ont motivé sa condamnation. La cour d'appel de Paris a donné un avis favorable à cette extradition et, sur ma proposition, le Premier ministre a signé le décret d'extradition. C'est aussi simple que cela (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
Je voudrais faire trois rappels. Premièrement, M. Battisti a été condamné dans des conditions jugées conformes à la Convention européenne des droits de l'homme, après que l'Italie a modifié sa législation en 1989 pour se mettre en conformité avec cette convention. Deuxièmement, le Gouvernement considère que l'on ne peut pas, d'un côté participer à la construction d'un espace judiciaire européen permettant de lutter efficacement avec nos voisins européens contre le terrorisme et la grande criminalité, et de l'autre ne pas respecter nos engagements internationaux (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.) Troisièmement, le Gouvernement a respecté ses engagements, car c'est dans les traités internationaux que la parole de la France s'exprime (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
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