RÉGLEMENTATION DES APPORTS
DE FONDS DE CONCOURS
ENTRE COMMUNES
ET ÉTABLISSEMENTS PUBLICS
DE COOPÉRATION
INTERCOMMUNALE
M. le président. La
parole est à Mme Sylvia Bassot, pour exposer sa question, n° 162,
relative à la réglementation des apports de fonds de concours entre communes et
établissements publics de coopération intercommunale.
Mme Sylvia Bassot.
Monsieur le ministre délégué aux libertés locales, je souhaite appeler votre
attention sur les fonds de concours alloués par les collectivités. L'exclusivité
des compétences en matière d'intercommunalité peut parfois bloquer des dossiers,
notamment lorsque, dans le cadre des rapports entre EPCI et communes membres, la
notion d'intérêt communautaire n'est pas assez appréciée. En effet, en matière
d'intercommunalité, on est souvent allé trop vite du fait d'incitations
financières alléchantes. On se retrouve donc avec des EPCI de profits et non de
projets ; des EPCI qui ont pris des compétences qu'ils ne peuvent ou ne veulent
parfois pas exercer, notamment dans le domaine du développement économique.
Ces difficultés peuvent avoir des
répercussions cruciales pour certains territoires lorsque des emplois sont en
jeu. Ce genre de blocages, que l'on rencontre de plus en plus fréquemment,
pourrait être surmonté en autorisant les communes à verser des fonds de concours
aux EPCI dont elles sont membres, dans le respect du principe de spécialité et
du principe d'exclusivité. Des conventions permettraient aux EPCI d'être maîtres
d'ouvrages, sans que cela leur coûte un euro, les communes ayant la faculté de
verser aux EPCI la somme nécessaire au bouclage des dossiers. Les textes en
vigueur permettent aux EPCI d'apporter des fonds de concours à leurs communes
membres, mais le contraire est impossible.
Etes-vous prêt, monsieur le
ministre, à envisager, dans le cadre du projet de loi de décentralisation, une
modification des articles L. 5114-16, L. 5215-26, L. 5126-5 du code général
des collectivités territoriales et à instaurer la réciprocité des fonds de
concours, ce qui permettrait aux élus de se décarcasser comme ils le souhaitent
en faveur du développement économique ?
M. le président. La parole
est à M. le ministre délégué aux libertés locales.
M.
Patrick Devedjian, ministre délégué aux
libertés locales. Madame la députée vous avez assez bien décrit la
situation. Je rappellerai simplement l'état du droit.
Les textes en vigueur permettent
aux EPCI d'apporter des fonds de concours aux communes membres. En revanche, et
vous l'avez dit, l'inverse n'est pas possible : ces établissements ne peuvent
pas recevoir de financements de la part des communes. C'est ce qu'a confirmé un
arrêt du Conseil d'Etat du 14 janvier 1998, « communauté urbaine de
Cherbourg », qui a jugé illégal l'inscription au budget d'une commune d'une
somme destinée à contribuer au financement d'une compétence précisément
transférée au groupement, conformément au principe de spécialité - les
établissements publics de coopération intercommunale ne peuvent exercer que les
compétences qui leur ont été transférées -, conformément aussi au principe
d'exclusivité, lequel interdit à la commune ayant transféré une compétence de
continuer à l'exercer, ce qu'elle ferait dès lors qu'elle apporterait son
concours.
Les projets
intercommunaux doivent donc, en principe, recevoir un financement intercommunal,
et seulement intercommunal. Cela dit, cette règle, j'en conviens avec vous, peut
à l'usage apparaître parfois trop rigide et conduire à des situations localement
dommageables.
C'est pourquoi
l'éventualité d'une modification de cette législation afin d'ouvrir dans
certains cas, qu'il faudra déterminer, la possibilité pour une commune
d'apporter des fonds de concours aux établissements publics de coopération
intercommunale sera étudiée dans le cadre du projet de loi relatif à la
décentralisation, par lequel nous allons essayer de remettre un peu d'ordre dans
l'organisation des diverses dotations.
Il faudra toutefois prendre garde
- mais je serai très heureux de pouvoir compter sur votre collaboration
afin d'en discuter - à ne pas réinstituer les financements croisés. Tout le
débat sur la décentralisation a montré la nécessité, et chacun en était
d'accord, de limiter, à défaut d'interdire, les financements croisés en raison
de leur opacité et de leur complexité. Le problème est que, à chaque fois que
l'on essaie de les limiter, on ne manque pas, et souvent pour de bonnes raisons,
de s'ingénier à les réintroduire...
Il nous faudra donc essayer de
trouver un équilibre. La règle est sans doute trop rigide et il se présente
régulièrement des cas - celui-ci n'est pas le seul dont j'ai eu
connaissance - où un peu de souplesse permettrait de faire aboutir des
projets utiles en termes d'emplois.
M. le président. La
parole est à Mme Sylvia Bassot.
Mme Sylvia Bassot.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse qui laisse espérer la
fin des fonds de concours à sens unique et un assouplissement des textes
autorisant les fonds de concours des communes vers les EPCI dans le cas
spécifique des dossiers d'extension ou de création d'entreprise et de tout ce
qui concerne le développement économique.
Je me réjouis de votre position.
Dans cette perspective, ma collaboration vous est bien sûr acquise. J'ai à
l'idée plusieurs propositions que je compte formaliser en déposant très
prochainement une proposition de loi qui, je l'espère, sera utile au débat.