Texte de la REPONSE :
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SITUATION DE L'USINE OTOR PAPETERIE DE ROUEN M. le président. La parole est à M. Pierre
Bourguignon, pour exposer sa question, n° 1695, relative à la situation de
l'usine Otor Papeterie de Rouen. M. Pierre Bourguignon.
Monsieur le ministre délégué au budget et à la réforme de l'État, ce n'est pas
le rapporteur spécial des crédits des pouvoirs publics qui s'adresse à vous
aujourd'hui. Il le fera bientôt, car nous avons beaucoup de choses à échanger en
la matière, surtout après les récentes interventions du président de séance.
Non, aujourd'hui, c'est une question d'intérêt local que je veux poser, celle de
la situation de l'usine Otor Papeterie, située dans la banlieue rouennaise, plus
exactement à Saint-Étienne-du-Rouvray, dans la circonscription dont j'ai
l'honneur d'être député et où se trouve Sotteville-lès-Rouen, commune dont je
suis maire. Une nouvelle fois, la logique financière semble l'emporter sur la
logique industrielle. Le rachat d'Otor par le groupe Carlyle, l'un des plus
riches fonds d'investissement américains, a provoqué au sein de cette entreprise
de cartonnerie une vaste restructuration : 114 suppressions d'emploi annoncées,
auxquelles s'ajoutent 40 intérimaires réguliers. Les salariés de l'entreprise
et leurs familles refusent d'être les victimes de cette recherche de rentabilité
à court terme. Ils se battent depuis des mois pour sauver leur savoir-faire,
leur emploi et un outil de production que toutes les analyses jugent viable.
Face à eux, la direction d'Otor refuse d'évoquer toute possibilité
d'investissement de l'actionnaire principal. Il existe pourtant des projets
alternatifs au plan de sauvegarde de l'emploi, présentés par les salariés et les
syndicats, pour pérenniser l'activité de la papeterie sans engendrer de
suppressions d'emploi, notamment grâce à la remise en route de la machine 3. La
direction du groupe procède actuellement à une étude sur cette question, mais
nous sommes sans nouvelles depuis six mois. Cette entreprise est pourtant au
coeur d'un grand bassin d'emploi. Elle compte 300 emplois directs et 1 500
emplois induits. C'est l'ensemble du groupe, qui comprend 3 000 salariés, et 25
000 emplois dérivés qui risquent d'être affectés par cette restructuration,
d'autant plus qu'elle intervient dans un secteur d'activité - la filière papier
- déjà très touché en Normandie : 107 emplois sont menacés à Alizay et 50 chez
UPM-Kymmene à Grand-Couronne, également dans la banlieue rouennaise. Monsieur
le ministre, quelles mesures entendez-vous prendre pour sauver ces emplois ?
Allons-nous vers un dépeçage progressif et total du site, comme le craignent les
syndicats ? D'une manière plus générale, c'est toute l'industrie papetière
qui est mise à mal par des grands groupes sans aucun projet industriel. Ce
secteur, s'il n'a pas les mêmes préoccupations que celui de la métallurgie, est
néanmoins menacé d'éclatement. Certes, les responsables politiques n'ont pas
la prétention - je ne l'ai pas pour ma part - d'administrer l'économie, mais il
ne serait pas acceptable de donner un sentiment d'indifférence et
d'impuissance. M. le président. La parole est à M. le
ministre délégué au budget et à la réforme de l'État. M.
Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de
l'État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le député Bourguignon, votre
question traduit votre inquiétude sur la situation de l'usine Otor Papeterie de
Rouen. Comme l'ensemble de mes collègues du Gouvernement et, je le pense, comme
l'ensemble des députés, je suis particulièrement attentif aux situations locales
des entreprises, spécialement lorsqu'existent des risques pour l'emploi et
l'activité sur un territoire. C'est un combat que nous menons, les uns et les
autres, de notre mieux. Cette usine oeuvre dans un secteur difficile, celui
du papier léger. Les surcapacités mondiales conduisent les groupes à concentrer
leurs outils de production. Dans ce contexte, l'usine Papeterie de Rouen, qui
est composée de petites machines, est handicapée par rapport à ses
concurrents. Cependant, si vous me le permettez, je suis moins sévère que
vous sur le comportement de l'actionnaire à ce stade. En effet, je rappelle
qu'il a sauvé l'entreprise en y injectant 45 millions d'euros et qu'après quatre
années de procédures judiciaires, les syndicats saluaient, il y a tout juste un
an, l'arrivée de cet actionnaire qui disposait enfin d'une stratégie
industrielle. Vous ayant dit cela, j'ajoute que je comprends parfaitement
l'émotion des salariés face à la perspective de ce plan. Il va de soi que nous
suivons ce dossier de très près. D'abord, un contact a été pris avec la
direction de l'entreprise qui nous a confirmé vouloir construire un véritable
avenir pour la Papeterie de Rouen. En outre, François Loos, ministre de
l'industrie, a demandé à ses services, en lien avec ceux du ministère de
l'emploi, de recevoir le 6 juillet les représentants des salariés pour faire un
point sur ces discussions. Par ailleurs, je vous confirme que le Gouvernement
sera particulièrement vigilant sur la qualité des mesures d'accompagnement
social proposées par la direction dans le cadre du plan de sauvegarde de
l'emploi. En effet, lorsqu'une entreprise procède à des licenciements affectant
gravement un bassin d'emploi, elle est soumise à des obligations de
revitalisation issues d'une des dispositions majeures de la loi de cohésion
sociale. En clair, cela signifie qu'Otor devra agir en faveur du bassin
économique de Rouen. Et le site sur lequel l'entreprise est implantée dispose -
vous le savez, étant un député du département - de nombreux atouts pour cela,
notamment en termes d'infrastructures routières, ferroviaires et
fluviales. Les services de l'État sont, en liaison avec Otor, tout
particulièrement mobilisés pour attirer des projets de création d'entreprises
sur le site. Citons par exemple l'accord que vient de signer Otor avec le groupe
Veolia pour la réalisation d'un centre de tri qui pourrait employer jusqu'à 150
personnes. Enfin, l'État intervient de façon très structurante sur le bassin
de Rouen, notamment au travers de l'augmentation des capacités du port ou encore
par la résorption des friches arrière portuaires. Vous le voyez, monsieur le
député, la détermination de l'équipe gouvernementale est entière sur ce sujet
pour conforter le bassin rouennais dans ses ambitions économiques et, tout
particulièrement, pour rester vigilant sur la situation des personnels
d'Otor. M. le président. La parole est à M. Pierre
Bourguignon. M. Pierre Bourguignon. Monsieur le ministre, je
vous ai écouté avec attention, mais j'aimerais ajouter quelques éléments de
réflexion. La relative petite taille des machines à Saint-Étienne-du Rouvray
est un des éléments de souplesse dans la filière papier-carton, et c'est une
considération industrielle qu'il ne faudrait jamais oublier. Je suis avec
attention le partenariat avec Veolia. Il existe une chaudière biomasse de
l'autre côté de la boucle de la Seine, à La Chapelle d'Arblay Grand-Couronne. Le
type de contrat proposé par cette société nous permet de voir comment cela
pourrait se passer à Saint-Étienne-du-Rouvray. Mais attention : les délais sont
tels que ce n'est pas avant 2009-2010 que cet élément pourrait venir sur le
site. Nous ne devons également pas oublier que la filière papier en France
revêt une dimension importante dans les domaines de la culture et de la
protection de l'environnement et de la forêt. Là encore, il faut sans cesse, à
tous les niveaux, y compris celui de l'État, encourager la
réflexion. Monsieur le ministre, j'ai bien noté que, le 6 juillet, les
représentants des salariés seraient reçus par les services du ministre de
l'industrie.
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