Texte de la QUESTION :
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M. Armand Jung appelle l'attention de M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes sur l'intention de Kraft Foods France de supprimer 123 postes sur 380 à l'usine Suchard de Strasbourg. Il lui précise que cette suppression de postes devrait être suivie, d'ici à deux ans, de la fermeture définitive du site de Strasbourg, certes rentable mais jugé trop peu « profitable » par le groupe Kraft Foods. Il met l'accent sur la nécessaire mobilisation des pouvoirs publics et des collectivités territoriales, autour des représentants de l'intersyndicale, pour sauvegarder cette usine, véritable symbole strasbourgeois depuis de nombreuses années. Il lui demande de bien vouloir recevoir une délégation de représentants de l'intersyndicale de l'entreprise Suchard pour évoquer ce dossier avec eux, de vive voix, et de lui indiquer quelles autres pistes peuvent être suivies pour sauver cette usine et ses salariés.
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Texte de la REPONSE :
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SUPPRESSION D'EMPLOIS DANS L'ENTREPRISE SUCHARD A STRASBOURG M. le président. La parole est à M. Armand
Jung, pour exposer sa question, n° 1720. M. Armand Jung. Ma
question s'adresse à M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à
l'insertion professionnelle des jeunes. À l'approche des fêtes de fin
d'année, nombreux sont ceux qui se réjouissent déjà à l'idée de savourer
quelques chocolats. À Strasbourg, cette idée de fête, de partage et de
convivialité est cependant quelque peu ternie par les menaces qui pèsent
lourdement sur la fabrique de chocolats Suchard, implantée dans le quartier de
la Meinau depuis 1930. En effet, le 4 septembre 2006, le groupe Kraft Foods,
dont la marque Suchard fait partie, a annoncé son intention de supprimer 123
postes sur 380 à l'usine Suchard de Strasbourg qui, bien que rentable, n'est
plus jugée suffisamment " profitable " par la direction. Le groupe Kraft Foods,
à l'en croire, souhaite que le site de Strasbourg génère davantage de profits,
mais, étrangement, tout est fait pour que l'usine produise de moins en moins de
volumes et qu'aucune marchandise innovante n'y soit conçue. Au fil des années,
le site de Strasbourg est ainsi devenu l'un des plus petits sites du groupe dans
la catégorie " chocolat ", passant de 27 000 tonnes de chocolat produites en
1990 à 9 000 tonnes aujourd'hui. Des efforts salariaux considérables ont
pourtant été réalisés : un accord de minoration des primes et l'annualisation du
temps de travail, qui réduit de manière conséquente le recours aux heures
supplémentaires, a été signé fin 2004 par quatre syndicats sur cinq. En échange,
la direction s'était engagée sur le maintien des emplois en promettant de
rapatrier à Strasbourg 700 tonnes de production. Résultat : la rémunération a
baissé de 1 200 euros par an et le volume de production continue de diminuer.
Les engagements n'ont donc pas été tenus. Il est navrant de constater que
nous avons là une entreprise rentable depuis des années - portée par ses
salariés qui ont fait des sacrifices et travaillé sans relâche pour que leur
fabrique de chocolats engendre des bénéfices -, qui fait partie d'un groupe
mondialement connu, qui a les reins solides, qui génère des profits, mais dont
les effectifs vont au final être réduits et qui risque bien, d'ici à deux ans à
peine, de fermer ses portes ! Je comprends vraiment le dégoût des salariés de
l'usine Suchard de Strasbourg, victimes d'un système où même la rentabilité ne
suffit plus. Les cas similaires à celui de Suchard sont d'ailleurs de plus en
plus nombreux dans notre pays, à l'exemple, encore plus récent - n'est-ce pas,
monsieur le président ? -, de Depolabo à Strasbourg. Ces dossiers posent le
problème récurrent de la gouvernance des entreprises et du contrôle de leurs
dirigeants. Ils soulignent la nécessité d'une responsabilité sociale des
entreprises et, notamment, d'une plus grande transparence dans leur
gestion. Monsieur le ministre délégué aux relations avec le Parlement, les
salariés attendent plus que des mots : ils veulent un geste concret de l'État,
qui doit leur montrer qu'il ne les abandonne pas. Me confirmez-vous que 123
postes seront supprimés ? Comment accompagnerez-vous les salariés de l'usine
Suchard de Strasbourg et pouvez-vous m'assurer que les licenciés bénéficieront
des meilleures conditions en matière de prime et de reclassement ? M.
le président. La parole est à M. le ministre délégué aux relations avec
le Parlement. M. Henri Cuq, ministre délégué aux
relations avec le Parlement. Monsieur le député, vous appelez l'attention de
mon collègue Gérard Larcher sur la décision du groupe Kraft Foods de supprimer
de nombreux postes dans son établissement Suchard à Strasbourg. Vous craignez
une fermeture complète du site d'ici à deux ans et vous l'interrogez plus
particulièrement sur le nombre exact des emplois supprimés et les mesures
sociales d'accompagnement prévues. Le groupe Kraft Foods a effectivement
réduit la charge de cette usine dont la production annuelle de chocolat, qui
s'élevait à 15 000 tonnes il y a trois ans, est passée à 10 000 tonnes.
Toutefois, le président-directeur général de Kraft Foods France, que François
Loos a reçu la semaine dernière, a affirmé que la restructuration envisagée
permettrait à l'usine de " continuer à occuper une place stratégique dans
l'organisation commerciale et industrielle du groupe ". Il rejette toute idée de
fermeture de l'établissement. La procédure de consultation du comité
d'entreprise sur les aspects économiques et sociaux du plan de suppression de
postes a débuté le 13 septembre dernier. Les représentants du personnel vont
négocier au cours de la procédure une amélioration du plan en essayant de faire
réviser le nombre de suppressions d'emploi à la baisse et d'améliorer les
mesures d'accompagnement. C'est à son issue que le nombre des emplois supprimés
sera précisément fixé et que les mesures d'accompagnement social seront
connues. La direction départementale du travail, de l'emploi et de la
formation professionnelle du Bas-Rhin suit, vous le savez, monsieur le député,
avec une très grande attention les négociations en cours. Elle s'assurera de la
conformité à la législation du plan de sauvegarde de l'emploi qui en découlera
et contribuera à en améliorer le contenu. Par ailleurs, une fois la procédure
achevée, le préfet du Bas-Rhin établira avec la direction de Kraft Foods une
convention de revitalisation. Établie en concertation avec l'ensemble des
parties prenantes, cette convention précisera les actions de soutien de
l'activité économique du bassin d'emploi que Kraft Foods financera avec
l'objectif de créer autant d'emplois que l'entreprise en supprimera. Gérard
Larcher et François Loos veilleront, je puis vous l'assurer, à ce que la
stratégie actuelle de l'entreprise soit mise en oeuvre dans le respect des
salariés et des territoires touchés. Ils souhaitent que le groupe offre à cette
usine des perspectives de développements futurs et sont disposés, avec les
collectivités locales concernées, à aider tout projet d'investissement
permettant de pérenniser cette usine. M. le président. La
parole est à M. Armand Jung. M. Armand Jung. Je vous
remercie, monsieur le ministre, de ces précisions qui me semblent utiles mais
qui, malheureusement, ne peuvent que rassurer partiellement les dizaines de
salariés de l'usine Suchard concernés. Pour eux, Noël restera triste et
inquiétant.
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