FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 17694  de  M.   Méhaignerie Pierre ( Union pour un Mouvement Populaire - Ille-et-Vilaine ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  05/05/2003  page :  3443
Réponse publiée au JO le :  24/11/2003  page :  9035
Rubrique :  droit pénal
Tête d'analyse :  atteintes à la vie privée
Analyse :  droit à l'image. photographie
Texte de la QUESTION : M. Pierre Méhaignerie attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la nécessité d'une réforme du droit à l'image. La simple utilisation de l'image d'une personne, sans préjudice particulier pour celle-ci, est désormais répréhensible. Depuis peu, le « droit à l'image » est aussi revendiqué par les propriétaires de biens : les photographies d'animaux, d'immeubles, de bateaux, d'objets ou encore de paysages ne peuvent être montrées que sous réserve d'un accord écrit, appelant espèces sonnantes et trébuchantes. Les milliers de condamnations prononcées ces dernières années, à l'encontre aussi bien des photographes que des organisateurs d'expositions ou des éditeurs de presse et de livres, entravent de plus en plus les missions de pédagogie, de culture et d'information, qui incombaient jusqu'ici aux gens de l'image. Les procédés abusifs conduisent peu à peu à l'effacement de la mémoire iconographique d'une société et de son époque. La publication de photographies participe pourtant au débat démocratique. En conséquence, il est urgent qu'une réforme du droit à l'image intervienne, conciliant la liberté d'expression et le respect dû à la vie privée des personnes. C'est pourquoi il aimerait savoir si une telle réforme est envisageable.
Texte de la REPONSE : Le garde des sceaux a l'honneur de faire connaître à l'honorable parlementaire que l'image de la personne est protégée par l'article 9 du code civil relatif au respect de la vie privée et par l'article 16 de ce code consacré à la dignité de la personne humaine. Ainsi, la Cour de cassation décide que le consentement de la personne à la diffusion de son image est nécessaire quand celle-ci reproduit des moments de sa vie privée. De même, la haute juridiction sanctionne la publication de photographies représentant le corps et le visage d'une personne décédée. Le droit à l'image n'est toutefois pas absolu. La jurisprudence admet que le droit d'informer justifie, dans certaines circonstances, qu'une personne ne puisse pas s'opposer à la reproduction de son image lorsqu'elle est liée à un événement d'actualité. S'agissant du droit à l'image sur les biens, les juridictions autorisent l'exploitation de la photographie d'un bien tant qu'aucun trouble certain au droit d'usage ou de jouissance du propriétaire n'a été démontré. D'un point de vue pénal, le législateur n'a pas entendu incriminer toute fixation de l'image d'une personne. En effet, l'article 226-1 du code pénal tend à réprimer d'une peine d'un an d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende le fait de porter volontairement atteinte à l'intimité de la vie privée d'autrui. Sur ce fondement, le nombre de condamnations pénales prononcées n'a été que de 22 en 2001, contre 50 en 2000. S'agissant des dispositions de l'article 39 quinquies de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse qui réprime d'une peine de 15 000 euros d'amende le fait de diffuser une image ou des renseignements sur l'identité d'une victime d'agressions ou d'atteintes sexuelles sans son consentement, elles n'ont donné lieu à aucune condamnation pénale depuis 1999 et à seulement deux condamnations en 1998. Dans ce contexte, il apparaît que les dispositions légales en vigueur et la pratique judiciaire en ce domaine permettent de parvenir à un certain équilibre entre la protection de la vie privée des individus et le libre droit à la communication. Toutefois, la chancellerie, très attentive à cette question, ne manquera pas de s'associer à toute réflexion qui pourrait être entreprise en la matière.
UMP 12 REP_PUB Bretagne O