Texte de la QUESTION :
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M. Christian Decocq attire l'attention de Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité sur la préparation des contrats urbains de cohésion sociale. Actuellement, à Lille comme dans de nombreuses communes de France, les contrats urbains de cohésion sociale sont en préparation, pour certains, prêts à être signés pour d'autres. En dépit des nombreuses améliorations apportées par les CUCS, la détermination de la géographie prioritaire est sujette à de nombreuses interrogations. En effet, à Lille par exemple, où six quartiers sur dix sont classés en politique de la ville, des îlots concentrant de nombreuses et importantes difficultés mais appartenant à un quartier non repris dans la politique de la ville, ne peuvent bénéficier des efforts de l'État pour faire face et pour surpasser leurs problèmes, à l'image de l'îlot Winston Churchill dans le quartier du Vieux Lille. La politique de zonage exclut donc de fait des zones en grandes difficultés, sur la seule justification que le quartier de résidence n'est pas assez dans la souffrance. Par ailleurs, en n'accordant les aides qu'aux seules associations oeuvrant dans les quartiers prioritaires, cette politique encourage, malgré elle, le phénomène de ghetto, car cela n'encourage pas la mobilité. Ces effets non désirés doivent nous interroger sur le bien fondé de cette délimitation géographique de la politique de la ville, et conduire notre réflexion sur son éventuel remplacement par un dispositif plus centré sur la personne, ou sur le public accueilli pour ce qui concerne les associations. C'est pourquoi il lui demande comment elle pense pouvoir prendre en considération la légitime attente des habitants de ces quartiers dans les CUCS.
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Texte de la REPONSE :
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MISE EN OEUVRE DES CONTRATS URBAINS DE COHESION SOCIALE A
LILLE M. le président. La parole est à M.
Christian Decocq, pour exposer sa question, n° 1796. M. Christian
Decocq. Actuellement, à Lille comme dans de nombreuses villes de
France, les contrats urbains de cohésion sociale, les CUCS, sont en préparation
ou prêts à être signés. La détermination des zones éligibles aux aides prévues
dans le cadre de ces contrats a fait l'objet de discussions entre les
représentants de l'État en région et ceux des villes concernées. En dépit des
nombreuses améliorations permises par le dispositif des CUCS, notamment sur le
plan du financement, désormais en hausse et garanti, la détermination de la
géographie prioritaire suscite de nombreuses interrogations. À Lille par
exemple, où six quartiers sur dix sont classés en politique de la ville, des
îlots concentrant de nombreuses et importantes difficultés ne peuvent bénéficier
de l'aide de l'État pour surmonter leurs problèmes, sous prétexte qu'ils se
trouvent dans un quartier ne relevant pas de la politique de la ville. C'est le
cas de l'îlot Winston Churchill : bien qu'il remplisse tous les critères ouvrant
droit aux aides du CUCS, il n'en verra pourtant pas un centime parce qu'il est
situé dans le quartier du Vieux Lille, qui n'est pas reconnu comme
prioritaire. Une telle distinction par quartier est discutable, même si elle
est fondée sur des indicateurs de " souffrance ", puisqu'elle ne permet pas de
prendre en considération le quotidien des habitants de cet îlot. Alors qu'ils
souffrent des mêmes difficultés en termes d'emploi ou de scolarité que les
Lillois des quartiers reconnus par le CUCS, ils ne seront cependant pas aidés de
la même manière par l'État. Cette situation est source d'incompréhension et de
frustration pour les habitants et pour les responsables associatifs locaux.
C'est pourquoi, monsieur le ministre, je souhaite que vous m'indiquiez dans
quelle mesure l'îlot Winston Churchill pourrait bénéficier du CUCS
lillois. Cet exemple illustre les limites de la politique de zonage : si elle
permet d'aider concrètement les habitants de nombreux quartiers, elle en exclut
d'autres qui souffrent pourtant des mêmes difficultés, sur la seule
justification d'une géographie sélective. Cette politique de zonage comporte un
autre effet pervers : en limitant le bénéfice des aides aux associations
oeuvrant dans les quartiers prioritaires, elle encourage involontairement le
phénomène de ghetto. En effet, comme le soulignent un certain nombre d'études,
la mobilité est un des facteurs importants de lutte contre l'isolement dont
souffrent les habitants de ces quartiers, isolement qui concourt à accroître "
l'effet ghetto " et le sentiment d'exclusion. Ces effets pervers doivent nous
conduire à nous interroger sur le bien-fondé de la sectorisation géographique de
la politique de la ville, et à réfléchir sur son éventuel remplacement par un
dispositif plus centré sur la personne, ou sur le public visé en ce qui concerne
les associations. Comment le Gouvernement pense-t-il pouvoir prendre en
considération la légitime attente que les habitants de ces quartiers nourrissent
vis-à-vis des CUCS ? M. le président. La parole est à M. le
ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes
handicapées et à la famille. M. Philippe Bas, ministre
délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et
à la famille. Monsieur le député, je vous prie de bien vouloir excuser Mme
la ministre déléguée à la cohésion sociale, qui m'a prié de vous faire connaître
les éléments de réponse qu'elle m'a communiqués. Sans constituer une réponse
précise au cas de l'îlot Winston Churchill que vous venez d'évoquer, ils nous
fournissent un certain nombre d'indications plus générales qui nous permettront
d'avancer. Comme vous le savez, les contrats urbains de cohésion sociale, qui
succèdent aux contrats de ville, reposent sur quatre principes : un cadre
contractuel unique ; des priorités d'intervention, telles que l'accès à l'emploi
ou la réussite éducative ; la possibilité, inédite, de contractualiser sur trois
ans, ce qui met fin à la nécessité de renégocier continuellement les crédits ;
enfin, une évaluation systématique de ces contrats afin de mesurer l'efficacité
du dispositif. Ces nouveaux contrats sont l'occasion d'actualiser la
géographie prioritaire de la politique de la ville. Après que la délégation
interministérielle à la ville eut réalisé dans ce but une véritable photographie
de l'état des quartiers, les préfets ont eu, sur cette base, à définir
localement, en concertation avec les élus, la géographie des futurs contrats. Il
en résulte, à Lille, une géographie prioritaire particulièrement importante
puisqu'elle couvre 54 % de la population de la ville. Vous soulignez
cependant que cette nouvelle cartographie n'a pas retenu des quartiers qui
auraient dû l'être de votre point de vue, partagé par certaines associations et
par les habitants eux-mêmes. Je veux cependant préciser que certains quartiers
qui ne sont pas inclus dans le périmètre de ces contrats sont néanmoins
éligibles à des actions transversales. Le principe même de la politique de la
ville est certes de concentrer les moyens sur les territoires les plus en
difficulté, mais nous sommes attachés à ce que les crédits contractualisés par
l'État dans ce cadre n'excluent pas des actions destinées aux habitants de
quartiers situés hors de ces périmètres, dans un objectif de mobilité. Dans
certains cas, à la condition que les projets financés ne relèvent pas du droit
commun et qu'ils bénéficient clairement aux habitants des quartiers
prioritaires, ces crédits pourront également financer des actions destinées à un
public plus large, dans un objectif de mixité sociale. Nous avons le souci de
mieux articuler une priorité territoriale et une approche centrée sur la
personne. Le programme de réussite éducative, qui, avec 112 millions d'euros
inscrits au budget 2007, dispose de moyens très importants, illustre cette
démarche. Il vise à proposer un soutien individualisé aux enfants les plus en
difficulté et est destiné en priorité, mais non exclusivement, aux territoires
de la politique de la ville et aux réseaux d'éducation
prioritaire. L'ensemble des outils de la politique de la ville que le
Gouvernement a mis en place doivent permettre, me semble-t-il, de répondre aux
enjeux que vous évoquez, pour autant que la souplesse avec lesquels ils peuvent
être utilisés pour répondre aux besoins locaux se concilie bien avec la
nécessité d'affecter en priorité les moyens aux territoires les plus en
difficulté. M. le président. La parole est à M. Christian
Decocq. M. Christian Decocq. Je tiens à remercier M. le
ministre de cette réponse complète et documentée, qui a le double intérêt
d'éclairer l'aspect local de la question et de contribuer à la réflexion
indispensable qui aura lieu dans les mois prochains en vue des élections.
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