FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 1892  de  M.   Janquin Serge ( Socialiste - Pas-de-Calais ) QG
Ministère interrogé :  coopération
Ministère attributaire :  coopération
Question publiée au JO le :  10/02/2005  page : 
Réponse publiée au JO le :  10/02/2005  page :  948
Rubrique :  politique extérieure
Tête d'analyse :  Togo
Analyse :  situation politique
DEBAT :

TOGO

M. le président. La parole est à M. Serge Janquin, pour le groupe socialiste.
M. Serge Janquin. Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères.
" Avec lui disparaît un ami de la France qui était, pour moi, un ami personnel ", a déclaré le Président Jacques Chirac. Que Gnassigbé Eyadéma ait été un ami personnel de Jacques Chirac, seul ce dernier peut le dire.
M. Éric Raoult. Et de Mitterrand !
M. Serge Janquin. Il l'a remis à sa place à La Baule ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Qu'il ait été un ami de la France, qui se caractérise par des valeurs démocratiques, le respect de l'État de droit et des droits de l'homme et du citoyen, permettez-moi d'en douter.
Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Et votre ami Gbagbo ?
M. Serge Janquin. Le Togo vient de vivre un moment politique ubuesque et tragique. Le 6 février dernier, quelques heures après la mort du président Eyadéma, un successeur a été désigné par les forces armées, au mépris des règles fixées par la Constitution : il s'agit de Faure Eyadéma, l'un des fils du dictateur décédé. Les auteurs de ce coup de force ont bricolé un " pontage " institutionnel en l'installant manu militari à la présidence de la chambre des députés. L'intérim présidentiel est, en effet, selon la loi fondamentale togolaise, assuré par le président de l'Assemblée nationale, aujourd'hui démis et exilé.
Alpha Oumar Konaré, président de la commission de l'Union africaine, Mamadou Tandja, président de la CEDEAO, et le secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, ont immédiatement et fermement condamné la violation des règles constitutionnelles. Ce tour de passe-passe institutionnel est inacceptable. La République héréditaire n'est plus la République, et la solidarité démocratique africaine nous interpelle.
Témoin de violations des lois électorales lors des élections présidentielles de 1993, auxquelles j'assistais en tant qu'observateur, j'avais publiquement dénoncé cet état de fait avant de suspendre ma participation à la mission de l'Assemblée. Il y a deux ans, le Parti socialiste a vivement regretté les félicitations adressées par le Président de la République, Jacques Chirac, après la réélection dans des conditions tout aussi contestables du président Eyadéma. La mort de Eyadéma et le tollé international que suscite l'organisation de sa succession risquent fort de marquer dans la sous-région un nouveau recul de l'influence politique de Paris, influence déjà contestée en Côte-d'Ivoire (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Jean-Claude Lenoir et M. Jean Leonetti. Papamadit !
M. le président. Veuillez poser votre question, monsieur Janquin.
M. Serge Janquin. J'espère qu'au lendemain de cette farce institutionnelle à Lomé, le Gouvernement ne se contentera pas de suggérer comment le coup d'État pourrait être légitimé...
M. le président. Il faut conclure, monsieur Janquin !
M. Serge Janquin. ...et qu'il manifestera à l'égard du pouvoir en place au Togo fermeté démocratique et sanctions appropriées (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie.
M. Xavier Darcos, ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Le président Gnassingbé Eyadéma est décédé le 5 février dernier. Avec lui disparaît l'un des plus anciens responsables africains qui, parmi ses pairs, jouait un rôle important dans un grand nombre de médiations. Comme vous le savez, la constitution togolaise prévoyait que l'intérim de la présidence devait être assuré par le président de l'Assemblée nationale. Sous la pression militaire, la constitution a été révisée afin d'installer Faure Eyadéma, le fils du président, dans les fonctions de président de la République, jusqu'en 2008.
Contrairement à ce que vous affirmez, la France s'est montrée particulièrement vigilante. Elle a aussitôt pris contact avec les institutions internationales concernées, avec les États voisins du Togo, ainsi qu'avec la CEDEAO et son président. Par ailleurs, j'ai rencontré il y a deux jours le président Tandja à Niamey, avec qui j'ai évoqué cette question.
Faure Eyadéma a déclaré ce matin qu'il souhaitait organiser très rapidement des élections libres et démocratiques, qu'il voulait rouvrir les frontières du pays, et que le président de l'Assemblée nationale, qui se trouve aujourd'hui hors du Togo, y serait le bienvenu. Nous allons vérifier si ces choses sont justes. En ce moment même se tient à Niamey une réunion de la CEDEAO à laquelle nous sommes également très attentifs, qui doit vérifier si les promesses sont tenues. Si ce n'est pas le cas, la France jouera une fois de plus son rôle plein et entier dans le cadre des institutions internationales, en particulier dans le cadre de l'Union européenne, qui avait décidé de reprendre des négociations de partenariat avec le Togo à partir du mois d'avril prochain. Quoi qu'il en soit, la France encourage le respect de la légalité républicaine, au Togo comme ailleurs (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

SOC 12 REP_PUB Nord-Pas-de-Calais O