FERMETURE DE CLASSES
DANS LE DÉPARTEMENT DE LA LOIRE
M. le président. La
parole est à M. François Rochebloine, pour exposer sa question,
n° 190, relative à la fermeture de classes dans le département de la
Loire.
M. François
Rochebloine. Monsieur le ministre délégué à l'enseignement scolaire,
comme chaque année à pareille époque, les élus que nous sommes reçoivent des
délégations d'enseignants et de parents d'élèves préoccupés des conditions dans
lesquelles s'effectuera la prochaine rentrée scolaire dans le premier degré. Ces
préoccupations sont légitimes. N'est-il pas normal en effet que les
parlementaires soient sollicités dans la mesure où, votant le budget du
ministère de l'éducation, ils doivent pouvoir ensuite en apprécier concrètement
la traduction sur le terrain ?
Cette considération énoncée, j'en
viens, monsieur le ministre, au résultat d'observations que j'ai pu faire à
partir de la situation de mon département, celui de la Loire, et qui me semblent
pour le moins intéressantes.
Ce
département - comme d'autres, hélas ! - a été durement touché par les
crises économiques successives. Par voie de conséquence, il a perdu un grand
nombre d'habitants au cours des vingt dernières années, ce que le recensement
général de 1999 a montré. Par ailleurs, nous avons assisté à d'importants
déplacements de populations des villes-centres vers les zones rurales. Cela a eu
tout naturellement une incidence sur la gestion des effectifs d'enseignants et
sur le mouvement de fermeture et d'ouverture de classes. Ainsi, entre 1997 et
2002, 172 postes d'enseignant ont été rendus par l'inspection académique de
la Loire, tandis que l'on enregistrait une diminution des effectifs de 4
050 élèves, écoles maternelles et primaires confondues.
Aujourd'hui, pour la première fois
depuis vingt ans, le département enregistre une stabilisation de ses effectifs.
On table en effet pour la rentrée de 2003 sur 58 186 élèves au lieu de 58
197 lors de la dernière rentrée, soit une diminution de seulement onze
élèves. Or, voilà quelques semaines, l'inspection académique de la Loire a
annoncé qu'elle devait rendre 19 postes pour la prochaine rentrée, soit un
nombre presque identique à celui de l'an dernier qui était, rappelons-le, de 21,
alors qu'il y avait eu une diminution de 373 élèves. L'académie de Lyon ne
se voyant attribuer que 63 postes supplémentaires au lieu des 82
nécessaires pour prendre en compte les augmentations du nombre d'élèves dans les
départements du Rhône et de l'Ain, le département de la Loire est appelé à
fournir les 19 postes manquants dans le Rhône et l'Ain. Monsieur le
ministre, ces chiffres sont publics.
La Loire est-elle surdotée ?
Certainement pas ! En témoignent les 172 postes rendus au cours des six
dernières années : 34 en 1997, 20 en 1998, 35 en 1999, 38 en 2000, 24 en 2001 et
21 en 2002. L'examen du taux d'encadrement des élèves ne le laisse pas davantage
apparaître et je crois inutile de souligner les difficultés réelles de certains
secteurs du département.
Lorsque
l'on sort de cette logique comptable et que l'on analyse la situation au plus
près du terrain et de ses spécificités, on constate qu'une fermeture de classe
peut s'avérer catastrophique pour la vie d'un village ou d'un quartier. Ces
éléments ne sont malheureusement pas toujours pris en compte au niveau rectoral
et académique, ce qui est fort regrettable.
Monsieur le ministre, le budget de
l'enseignement scolaire 2003, sans être exceptionnel, est, avec
54 milliards d'euros - soit dit en passant, un montant supérieur au
produit du seul impôt sur le revenu -, un assez bon budget et il reste le
premier poste de dépenses de l'Etat.
Mille postes d'enseignant doivent
être créés cette année, monsieur le ministre. Dès lors, je considère que le
département de la Loire ne doit pas en rendre, comme on le lui demande. S'il
devait le faire, je me verrais dans l'obligation de dénoncer cette situation
avec force, car il s'agirait là d'une véritable anomalie, difficilement
compréhensible pour les parents, les enseignants et plus généralement l'opinion
publique. Mais je reste persuadé que nous n'en arriverons pas là et que le bon
sens l'emportera.
M. le président. La
parole est à M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire.
M. Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire.
Cher François Rochebloine, la question que vous posez revient bien souvent dans
les débats entre le ministre et les parlementaires : c'est celle de la carte
scolaire, et plus spécifiquement celle de la fermeture de classes dans le
département de la Loire.
Pour
commencer, il est de mon rôle de vous rappeler qu'aucune décision n'est prise
sans concertation avec les élus, les représentants des enseignants et les
parents d'élèves. Tous ceux qui ont à connaître de la carte scolaire sont
associés à cette concertation. Vous savez aussi, car vous êtes un parlementaire
expérimenté, que ces rééquilibrages au niveau national sont opérés en fonction
de la démographie et de données sociales et territoriales. Certains départements
verront donc des classes fermer, d'autres ouvrir, comme c'est le cas chaque
année, en raison des mouvements liés à l'évolution de la démographie scolaire
sur l'ensemble du territoire.
S'agissant du département de la
Loire, les effectifs du premier degré sont stables : on prévoit exactement 58
286 élèves pour la rentrée 2003 - soit onze élèves de plus
que l'an dernier, autant dire rien.
Reste qu'il nous faut bien rendre
des postes aux académies déficitaires, alors même que, dans les académies
excédentaires, il peut arriver que les effectifs restent stables. La décision de
retirer dix-neuf postes dans votre département peut vous surprendre, mais force
n'est de constater que, même après ce retrait, il restera, avec 5,38 professeurs
pour 100 élèves, supérieur à la moyenne nationale, laquelle n'est que de
5,34.
Précisons par ailleurs que
l'accueil en maternelle des enfants de deux ans sera maintenu, dans la
limite, il est vrai, des places disponibles, et que les effectifs moyens par
classe varieront entre vingt et un et vingt-trois élèves en élémentaire et
vingt-quatre à vingt-sept élèves en maternelle. Autrement dit, votre situation
reste au final plutôt favorable.
Enfin, la carte scolaire doit tenir
compte des zones rurales. Or les mouvements de population des vallées
industrielles du sud de votre département vers le centre plus rural conduisent à
créer des postes dans ces zones où la démographie progresse.
Je suis certain que ma réponse,
monsieur Rochebloine, ne vous satisfait pas. Je ne peux vous promettre de vous
rendre dix-neuf postes. Ou alors, s'il me fallait donner satisfaction à tous les
députés qui me le demandent, il faudrait que vous acceptiez une progression
beaucoup plus forte du budget de l'éducation nationale que vous trouvez déjà si
élevé... Reste, vous le savez, qu'il est toujours possible de nous revoir, de
rediscuter pour trouver un poste par ci, un poste par là et répondre aux
difficultés les plus criantes, car je souhaite évidemment que la représentation
nationale soit entendue.
M. le président. La
parole est à M. François Rochebloine.
M. François
Rochebloine. Monsieur le ministre, je vous remercie pour commencer des
explications que vous m'avez apportées. Certes, je vous en donne acte, la
concertation a eu lieu avec les élus et les enseignants. Le problème est qu'elle
s'est soldée par un échec, dans la mesure où personne ne peut accepter de devoir
rendre des postes alors que, pour la première fois depuis vingt ans, le
nombre d'élèves reste stable.
Vous avancez l'argument de notre
taux d'encadrement : 5,38 contre 5,35 en moyenne nationale. Encore
faudrait-il appliquer les mêmes critères partout !
Permettez-moi, en toute amitié, de
vous citer le cas d'un département qui vous est cher : la Dordogne.
Connaissez-vous son taux d'encadrement ? Allez, je vous l'indique : il est de
5,52, donc un peu au-dessus de la moyenne, et un peu au-dessus de celui de la
Loire. (Sourires.) Et que dire de celui de la
Corrèze - autre exemple pris au hasard ? Il est de 6,17 ! Voilà qui montre,
me semble-t-il, à quel point nous avons besoin de revoir cette question. J'ai
bien noté que vous n'étiez pas fermé à toute discussion. Ne rendriez-vous que
quinze postes sur dix-neuf, ce ne serait déjà pas mal. Pouvons-nous au moins
l'envisager ? Vous donneriez satisfaction au recteur et à l'inspecteur de
l'académie qui, je le sais, se bat quotidiennement pour essayer de préserver ses
postes. Et surtout, c'est cela le plus important, c'est cela qui m'a fait
réagir, vous donneriez satisfaction aux enfants qui seront accueillis dans le
département de la Loire. Je sais pouvoir compter sur vous, monsieur le
ministre.