Rubrique :
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étrangers
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Tête d'analyse :
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droits de l'homme et libertés publiques
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Analyse :
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jugements. zone d'attente. Roissy - Charles-de-Gaulle
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Texte de la QUESTION :
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M. François Asensi souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur la délocalisation du jugement des étrangers dans la zone d'attente de l'aéroport de Roissy - Charles-de-Gaulle. En effet, dans le projet de loi relatif « à l'entrée et le séjour des étrangers et à la lutte contre l'immigration clandestine », il est prévu qu'une salle d'audience soit spécialement aménagée dans les ports et les aéroports (art. 27). Dans les faits, cela reviendrait à délocaliser les audiences des étrangers non admis qui se tiennent actuellement dans les tribunaux et particulièrement au tribunal de Bobigny. Les audiences auraient lieu dans le bâtiment de la ZAPI 3 où, dès sa construction, une salle fut prévue à cet effet. Les magistrats pourraient ainsi statuer dans une salle d'audience délocalisée, ainsi que la loi de 1992 l'avait prévu mais dont le décret d'application n'avait pas été pris jusqu'alors. Sous couvert d'un traitement plus rapide et simplifié des dossiers, le transfert à Roissy des audiences 35 quater de l'ordonnance du 2 novembre 1945 pourrait constituer une violation des principes de publicité des débats, de l'impartialité et de l'indépendance des juges, fondements de notre système judiciaire et reconnus par la Convention européenne des droits de l'homme. Ce serait aussi une atteinte au cadre solennel du palais de justice, les tribunaux étant l'incarnation dans notre société de l'institution judiciaire. Par ailleurs, on peut s'interroger sur la pertinence de la mise en place d'une juridiction spécialisée qui marquerait une différence entre le traitement des nationaux et des autres. Il lui demande donc comment, dans ces conditions, il envisage de garantir l'égal accès au droit et aux droits de la personne humaine pour les nationaux et les étrangers.
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Texte de la REPONSE :
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La nouvelle rédaction de l'article 35 quater de l'ordonnance du 2 novembre 1945 issue de la loi sur la maîtrise de l'immigration et du séjour des étrangers en France et sur la nationalité prévoit le principe de la tenue des audiences à l'occasion desquelles il est statué sur le maintien en zone d'attente des étrangers souhaitant pénétrer irrégulièrement sur le territoire au siège du tribunal de grande instance, sauf lorsqu'il existe une salle spécialement aménagée sur l'emprise portuaire, aéroportuaire ou ferroviaire garantissant le respect du principe de publicité des audiences. C'est en 1992 que le Gouvernement prit l'initiative de créer une salle d'audience à l'aéroport de Roissy, dans la mesure où cet aéroport est la première frontière de France en termes de flux. Cette salle d'audience fut inaugurée en 2002. Le Conseil constitutionnel en a lui-même accepté le principe dans sa décision du 20 novembre 2003 en considérant que : « par elle-même, la tenue d'une audience dans une salle à proximité immédiate d'un lieu de rétention n'est contraire à aucun principe constitutionnel ; qu'en l'espèce, le législateur a expressément prévu que ladite salle devra "être spécialement aménagée pour assurer la clarté, la sécurité et la sincérité des débats et permettre au juge de "statuer publiquement ». C'est la raison d'ailleurs pour laquelle des travaux sont prévus pour améliorer l'aménagement de la salle d'audience existante sur le site aéroportuaire de Roissy, comme la construction d'une salle des pas perdus, l'agrandissement du greffe et la suppression de la clôture à cet endroit. Pour faciliter l'accès à la salle d'audience, des panneaux indicateurs seront disposés sur les routes d'accès au site et une ligne de bus en assurera la desserte. Par ailleurs, le ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales s'est engagé à faire procéder aux transports à destination de cette salle des magistrats et des fonctionnaires du tribunal de grande instance de Bobigny sur ses moyens propres. Il ne s'agit donc en aucun cas d'un tribunal de fortune, mais de locaux offrant d'excellentes conditions dans lesquels les avocats ont bien entendu toute leur place, puisque des bureaux leur sont réservés pour s'entretenir confidentiellement avec leurs clients. En cas de nécessité, et notamment si le nombre des affaires le rend nécessaire, le président du tribunal de grande instance peut décider de tenir une seconde audience au siège de ce tribunal le même jour que celle qui se tient dans la salle spécialement aménagée. Cette nouvelle possibilité traduit bien la volonté de donner les mêmes garanties procédurales aux étrangers maintenus en zone d'attente, que les audiences se tiennent au tribunal de grande instance ou bien dans la salle d'audience spécialement aménagée sur l'emprise aéroportuaire. A noter enfin que l'utilisation de cette salle d'audience doit permettre de redéployer les effectifs de police affectés aux missions d'escorte et d'épargner aux étrangers maintenus des déplacements fastidieux et de longues heures d'attente au tribunal.
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