DEBAT :
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DELOCALISATION DE COLGATE-PALMOLIVE
M. le président. La parole est à M. Arnaud Montebourg. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Arnaud Montebourg. Ma question s'adresse à M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
La firme internationale Colgate-Palmolive, qui emploie 1 400 personnes en France et a réalisé 2 milliards de dollars de profits en 2003, a récemment délocalisé depuis la France son siège social et ses centres de profit vers le canton de Genève, en Suisse, un État qui, comme chacun le sait, est ni plus ni moins un paradis fiscal.
Pour attirer en Suisse les profits de Colgate-Palmolive, le canton de Genève a engagé une politique brutale de dumping fiscal, en cassant littéralement le montant de son impôt sur les bénéfices : il l'a limité à un taux de 6 % pendant dix ans, quand celui de la France et des grands pays européens est d'environ 30 %.
Colgate-Palmolive inflige ainsi à nos caisses publiques un préjudice d'environ 40 millions d'euros par an, soit 3 euros par foyer fiscal, et fait payer au contribuable français une nouvelle augmentation de ses profits. Cela lui permet d'améliorer les dividendes versés à ses actionnaires et de financer des plans sociaux qui s'apprêtent à détruire 4 500 emplois en Europe.
Dans ces conditions, il serait utile, monsieur le ministre, que vous indiquiez à la représentation nationale ce que vous allez faire (" Rien ! " sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains) pour lutter contre cette forme renouvelée et contemporaine de racket. Avez-vous envoyé les protestations du Gouvernement français au Gouvernement helvétique ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Avez-vous déclenché ne serait-ce qu'une enquête fiscale contre Colgate-Palmolive ? Et si vous n'avez rien fait ou ne voulez rien faire, que restera-t-il au citoyen,...
Plusieurs députés du groupe des député-e-s communistes et républicains. Rien !
M. Arnaud Montebourg. ...sinon le boycott massif des produits Colgate, qui coûtent, je le rappelle, trois euros à chaque foyer fiscal français, au seul profit des actionnaires du groupe ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.
M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le député, j'enregistre une nouvelle d'importance : vous venez, si je comprends bien, de rejoindre le camp de ceux qui veulent voir les impôts baisser en France ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.-- Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Nous sommes déterminés à lutter par tous moyens utiles contre les évasions fiscales frauduleuses. Nous avons déjà agi dans ce sens l'année dernière, ...
M. Patrick Braouezec. Le résultat est là !
M. Jean-Pierre Blazy. Zéro !
M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. ...et nous prendrons en ce domaine toutes les mesures souhaitables.
Mais, au-delà du cas que vous citez, la vraie question, monsieur Montebourg, est de rendre notre pays plus attractif sur le plan fiscal tout en préservant notre modèle social. Lorsque, par exemple, nous avons à coeur d'aligner notre fiscalité sur la moyenne européenne, nous enrayons les délocalisations. C'est ce que nous avons fait l'année dernière avec l'impôt sur les sociétés. C'était aussi notre objectif lorsque nous avons décidé, à l'instar de l'Allemagne, de la Grande-Bretagne ou de l'Italie, l'exonération des plus-values de cession sur les sociétés cotées, une mesure sur laquelle les sénateurs socialistes se sont d'ailleurs abstenus. C'est dire si les mentalités évoluent en ce domaine !
M. Patrick Braouezec. Mais vous, vous continuez à licencier !
M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Sur tous ces sujets, la seule chose que je vous demande est de rester cohérents. On ne peut pas, d'un côté, regretter les délocalisations, ...
M. Arnaud Montebourg. Vers la Suisse !
M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. ...et, de l'autre, critiquer un gouvernement qui prend les mesures fiscales qui s'imposent pour rendre nos entreprises compétitives.
M. André Gerin. Non !
M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. C'est à cela que nous travaillons, et je me réjouis de pouvoir bénéficier de votre appui dans ce domaine, monsieur Montebourg. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
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