FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 2061  de  M.   Derosier Bernard ( Socialiste - Nord ) QG
Ministère interrogé :  Premier ministre
Ministère attributaire :  Premier ministre
Question publiée au JO le :  14/04/2005  page : 
Réponse publiée au JO le :  14/04/2005  page :  2907
Rubrique :  État
Tête d'analyse :  décentralisation
Analyse :  conséquences. services publics. zones rurales
DEBAT :

DECENTRALISATION

M. le président. La parole est à M. Bernard Derosier, pour le groupe socialiste.
M. Bernard Derosier. Monsieur le Premier ministre, je n'ose imaginer un seul instant que vous ne connaissiez pas la loi du 13 août 2004. Il est vrai que vous l'avez fait voter à la sauvette, en vous abritant derrière l'article 49-3 de la Constitution. Il est tout aussi vrai que cet acte II de la décentralisation que vous avez tenté de mettre en oeuvre s'est rapidement dégonflé pour se réduire à un simple transfert de responsabilités vers les collectivités territoriales, voire à un démantèlement pur et simple des services publics. (" Oh ! ", sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Aujourd'hui, vous accusez les exécutifs départementaux et régionaux de ne pas respecter la loi sous prétexte qu'ils n'ont pas signé les conventions provisoires de transfert de services. La loi est pourtant très claire : la commission de conciliation, prévue à cet effet, se réunira pour examiner les refus ; si ceux-ci persistent, c'est un arrêté du Gouvernement qui assurera les transferts - bel exemple de décentralisation, soit dit en passant. Ce que la loi n'avait pas prévu, c'est que quatre-vingts départements sur cent deux et la plupart des régions ne signeraient pas les conventions.
M. Jean-Pierre Soisson. C'est une honte !
M. Yves Nicolin. Ce sont des desperados !
M. Bernard Derosier. Vous allez sans doute dire que, à ce jour, plus d'une centaine de conventions ont déjà été signées, mais, si l'on en compte cinq par département et deux ou trois par région, cela ne représente qu'une centaine sur 6 ou 700 conventions. Avouez que c'est bien peu.
Dans ces conditions, monsieur le Premier ministre, allez-vous persévérer (" Oui ! " sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) dans la voie que vous semblez avoir choisie et imposer le fait du prince, ou, à l'inverse, pour sortir de l'impasse dans laquelle vous vous êtes engagé, avez-vous l'intention de rechercher, avec les départements et les régions, une solution au problème posé ?
Enfin, monsieur le Premier ministre, vous avez fait une déclaration époustouflante : " L'État se montrera généreux pour augmenter de l'ordre de 5 % la dotation globale des départements qui seront prêts à coopérer. " (" La question ! " sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Pouvez-vous nous dire sur quelle ligne budgétaire vous allez prendre les crédits qui vous permettront de verser ce bonus de 5 % aux collectivités qui ont signé ? (" La question ! " sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. Monsieur Derosier, posez votre question.
M. Bernard Derosier. Aucune loi n'a prévu cette prime. N'avez-vous pas là outrepassé vos droits, monsieur le Premier ministre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur le député, la loi sera respectée par tous les départements.
M. Henri Emmanuelli. On n'est pas à vendre !
M. le Premier ministre. Et ce n'est pas un président de département qui peut se mettre en dehors de la loi : il y a une République et une loi républicaine ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Je connais bien les processus de décentralisation.
M. Henri Emmanuelli. Oh non !
M. le Premier ministre. Quand j'étais président de région, j'ai été le premier à signer, avec Lionel Jospin, la convention Université 2000. J'ai été le premier à signer le contrat de plan avec Mme Voynet. Et j'ai été le premier à signer le contrat de plan avec Édouard Balladur et Charles Pasqua. Pourquoi ? Parce que quand il y a convention, il y a négociation, et tous ceux qui se mettent en dehors de la négociation...
M. Alain Néri. Seront punis !
M. le Premier ministre. ...se mettent en dehors de la défense des intérêts de ceux qu'ils représentent ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
Nous sommes dans une décentralisation républicaine.
M. Henri Emmanuelli. Non !
M. le Premier ministre. C'est donc une négociation entre l'État et les collectivités territoriales.
M. Richard Mallié. Comme en 1983 !
M. le Premier ministre. Vouloir faire de la décentralisation un front contre l'État, ce n'est pas être fils de Defferre et de Mauroy ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) C'est vouloir diviser les Français.
La convention, c'est une négociation. Aux départements, aux régions, qui ont engagé le processus de négociation, je dis que l'État...
M. Jean-Pierre Brard. Girondin !
M. le Premier ministre. ...est attentif et ouvert : s'il constate sur le terrain des situations déficitaires, c'est-à-dire anormales, des dysfonctionnements,...
M. Henri Emmanuelli. Ce n'est pas cela dont a parlé M. Derosier !
M. le Premier ministre. ...il se doit de les corriger, afin que dans la République tout le monde soit traité de la même façon. Mais, naturellement, l'État ne peut discuter qu'avec ceux qui sont autour de la table.
Je fais respecter la loi républicaine. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Il n'y a pas d'avantages pour les uns, d'inconvénients pour les autres : il y a seulement cette responsabilité coupable prise par un certain nombre de collectivités territoriales, qui veulent faire de la décentralisation un affrontement avec l'État. Ce n'est ni l'esprit de Gaston Defferre (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste), ni celui de l'acte II de la décentralisation, et de la sorte vous en arrivez à contester les bienfaits du contrat.
M. Henri Emmanuelli. Qu'on appelle le SAMU !
M. le Premier ministre. Ceux qui défendent la République et le droit ne peuvent que défendre le contrat,...
M. Henri Emmanuelli. Le SAMU !
M. le Premier ministre. ...et féliciter ceux qui négocient bien, dans l'intérêt de leurs habitants, des conventions pour leur département ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

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