FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 21228  de  M.   Warsmann Jean-Luc ( Union pour un Mouvement Populaire - Ardennes ) QE
Ministère interrogé :  affaires étrangères
Ministère attributaire :  affaires étrangères
Question publiée au JO le :  30/06/2003  page :  5046
Réponse publiée au JO le :  06/10/2003  page :  7619
Rubrique :  relations internationales
Tête d'analyse :  commerce international
Analyse :  zones de conflits. mesures de contrôle
Texte de la QUESTION : M. Jean-Luc Warsmann attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur le commerce illicite des ressources naturelles provenant des zones affectées par des conflits. De nombreuses associations non gouvernementales estiment nécessaire de prendre des mesures de contrôle destinées à s'opposer au commerce illicite des ressources naturelles provenant de zones affectées par des conflits, dès lors qu'il apparaît bien souvent que ce commerce contribue à faire perdurer, voire à aggraver ces conflits et les souffrances des populations civiles. Par conséquent, il demande au ministre des précisions sur ses intentions en cette matière.
Texte de la REPONSE : L'exploitation illégale des ressources naturelles alimente plusieurs conflits. Pour lutter contre ce fléau, la communauté internationale dispose d'un certain nombre d'instruments, et la France prend toute sa part dans leur mise en oeuvre. En premier lieu, il est nécessaire d'établir les faits de la façon la plus incontestable. C'est pourquoi le Conseil de sécurité des Nations unies décide parfois de créer des groupes d'experts chargés d'enquêter sur l'exploitation illégale des ressources naturelles et sur son rôle dans les conflits. De tels groupes d'experts existent aujourd'hui pour le Liberia et la République démocratique du Congo. Leurs travaux, auxquels la France apporte un soutien actif, montrent les liens étroits qui peuvent exister entre le pillage des ressources naturelles et les conflits armés. En second lieu, lorsque les liens entre le pillage des ressources naturelles et la poursuite d'un conflit sont établis, des mesures de sanctions et d'embargo peuvent être prises. Le Conseil de sécurité des Nations unies a ainsi imposé en 1998 un embargo sur les diamants bruts non certifiés en provenance de l'Angola, qui a été levé en 2002. Une mesure similaire prise en 2000 concernant la Sierra Leone a été levée en juin dernier en raison de la normalisation de la situation de sécurité dans ce pays. Au Liberia, un embargo sur les diamants bruts est en vigueur depuis 2001. Un embargo sur les bois tropicaux en provenance du Liberia a été décidé en mai dernier, avec notamment le soutien de la France. Des mesures spécifiques de sanctions (gel des avoirs, interdictions de voyager) peuvent en outre être prises contre les contrevenants à ces embargos (personnes physiques ou morales). La mise en place d'une certification d'origine - telle que celle prévue par le processus de certification des diamants bruts, dit « de Kimberley », qui a commencé à fonctionner le 1er janvier 2003 conformément à la Déclaration d'Interlaken adoptée le 5 novembre 2002 et dans lequel la France s'est activement investie - est de nature à empêcher que l'exploitation illégale de certaines ressources ne vienne alimenter les conflits. Une telle initiative avait été appelée de ses voeux par le Conseil de sécurité dans sa résolution 1295, qui traitait de la crise angolaise. La France demeure ouverte à de nouvelles initiatives de ce type si le Conseil de sécurité devait en décider. Outre la difficulté de leur mise en oeuvre universelle, il faut toutefois relever la lourdeur des mesures de contrôle économique : elles se traduisent par un mécanisme d'autorisation - géré en ce qui concerne les membres de l'Union européenne par la Commission - qui, pour être efficace, doit s'appliquer à l'ensemble du commerce mondial des produits concernés. De telles mesures d'autorisation préalable ne se justifient donc en principe que pour les ressources naturelles de haute valeur, et des garanties négociées dans un cadre régional, afin de rétablir la souveraineté des États concernés sur leurs ressources naturelles et d'organiser de façon transparente le commerce des ressources naturelles, sont d'une manière générale privilégiées. S'agissant de la limitation du commerce des armes, un certain nombre d'instruments existent déjà en vue de contrôler les échanges. L'exportation par la France de matériels de guerre est strictement contrôlée par les autorités françaises, sur la base - notamment - du décret-loi du 18 avril 1939 fixant le régime des matériels de guerre, armes et munitions, qui pose le principe d'une interdiction, et donc d'une procédure d'autorisation interministérielle. Au cours de l'évaluation des demandes d'agrément préalable (niveau « négociation » et « vente ») présentées par les industriels de la branche (qui doivent être eux-mêmes titulaires d'une « autorisation de fabrication et de commerce » spécifique), la commission interministérielle d'étude des exportations de matériel de guerre (CIEEMG) attache une importance particulière à l'examen de la situation intérieure, tant économique que politique et sociale, du pays destinataire de ces équipements, afin d'éviter qu'ils ne contribuent à la violation des droits de l'homme ou que leur acquisition ne mette en cause, notamment à raison de leur coût, son développement. Par ailleurs, outre ses obligations internationales contre la prolifération d'armes de destruction massive (MTCR, Wassenaar, groupe Australie, ...), la France applique strictement le code de conduite européen en matière d'exportations d'armements (conventionnels) adopté par les États membres de l'Union européenne à la suite d'une initiative franco-britannique en 1998. Ce code prévoit un échange d'informations (notification des refus d'exportation, système de consultation entre partenaires en cas de demande « globalement identique » présentée dans un autre pays) entre les Quinze, et instaure une liste de critères de refus qui font largement droit aux préoccupations relatives aux droits de l'homme et au développement durable ; parmi ces critères figurent en effet les droits de l'homme, la situation intérieure du pays et sa capacité financière. Au sein du groupe « exportation d'armes conventionnelles » de l'Union européenne (COARM), les réflexions se poursuivent concernant la valeur juridique du Code, l'amélioration du dialogue entre les États sur les refus et - plus largement - les politiques nationales d'exportation, ainsi que la coopération avec le Parlement européen et les organisations non gouvernementales à ce sujet. Enfin, on peut signaler l'adoption en juin 2003 d'une position commune sur le courtage qui incite les États à mettre en place un système de contrôle de l'intermédiation commerciale en matière d'armements, et les travaux en cours portant sur un futur règlement communautaire sur l'exportation de biens de police et de sécurité, c'est-à-dire destinés au maintien de l'ordre public. Aux Nations unies, la France promeut l'extension de la transparence du commerce des armes dans le cadre du registre des Nations unies sur les armes classiques. En outre, au Conseil de sécurité, la France a pris une part active dans l'adoption d'embargos sur les armes destinées à certaines zones de conflit. De tels embargos sont actuellement en vigueur à l'encontre de l'Irak, de la Somalie, de la Jamahiriya Arabe Libyenne (embargo suspendu depuis avril 1999), du Liberia, et des forces non gouvernementales agissant en Sierra Leone, au Rwanda et dans l'est de la République démocratique du Congo. Par rapport à des mesures stipulées dans des traités internationaux, il est à noter que de telles mesures d'embargo décidées par le Conseil de sécurité ont l'avantage de s'imposer dès leur adoption et à l'ensemble des États membres des Nations unies.
UMP 12 REP_PUB Champagne-Ardenne O