DEBAT :
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AUGMENTATION DES TARIFS DU GAZ M.
le président. La parole est à M. François Brottes, pour le groupe
socialiste. M. François Brottes. Monsieur le premier
ministre, chaque fois que l'État abandonne la gestion des entreprises publiques,
il n'y a plus aucun contrôle : l'entreprise est guidée par le seul intérêt de
ses actionnaires, et ce sont les Français qui trinquent ! (Approbation
sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s
communistes et républicains. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union
pour un mouvement populaire.) Votre méthode est maintenant connue : dans
un premier temps, vous critiquez la gestion publique et cherchez des poux dans
la tête du statut des personnels ; dans un deuxième temps, vous prenez des
mesures purement idéologiques et engagez la privatisation, puisqu'à vos yeux
seuls le privé et le marché sont performants ; dans un troisième temps, vous
subissez et acceptez l'augmentation des tarifs, en expliquant aux Français qu'à
chaque fois que les tarifs augmentent, il leur en coûtera moins cher. (Rires
sur les bancs du groupe socialiste.) Avouez que ça sent un peu
l'arnaque ! (Applaudissements sur les bancs du groupe
socialiste.) Pour la hausse colossale du prix du gaz que vous venez
d'autoriser, monsieur le Premier ministre, la ficelle est énorme. D'abord, la
nécessité de cette hausse est très contestable, compte tenu des contrats
d'approvisionnement sur le long terme en vigueur. Ensuite, les effets sur
l'activité industrielle de notre pays vont être considérables car, depuis
l'accélération de l'ouverture du marché de l'énergie, les tarifs pratiqués
deviennent insupportables et laissent prévoir bon nombre de délocalisations.
Enfin, le pseudo-rabais qui sert de rideau de fumée à cette augmentation - 33 %
en deux ans ! - est une tromperie pour ses bénéficiaires : ce n'est que reculer
pour mieux sauter. Pour tous les autres, l'impact va être lourd et
immédiat. Dans le logement locatif collectif, et donc dans le logement
social, dans les maisons de retraite et les hôpitaux, qui ont déjà du mal à
boucler leurs fins de mois, et dans les zones rurales, où l'on se chauffe
surtout au fuel et au propane, il vous faudra trouver une autre astuce. Pour
couronner le tout, monsieur le Premier ministre, le régulateur, favorable à la
hausse des tarifs, dénonce l'illégalité de votre manipulation de marketing
politique. Monsieur le Premier ministre, avec cette mesure qui s'ajoute à
toutes les autres augmentations des tarifs - notamment des loyers, de la santé
et des déplacements - et démontre l'impact négatif de la privatisation des
entreprises publiques, vous vous obstinez dans l'erreur. Ne trouvez-vous pas
indécent de ne laisser à nos concitoyens, pour augmenter les dividendes des
actionnaires, qu'une alternative à la hausse des tarifs : avoir froid l'hiver ?
(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des
député-e-s communistes et républicains. - Protestations sur les bancs du groupe
de l'Union pour un mouvement populaire.) M. le
président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances
et de l'industrie. M. Thierry Breton, ministre de
l'économie, des finances et de l'industrie. Que de démagogie, monsieur
Brottes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un
mouvement populaire. - Vives protestations sur les bancs du groupe
socialiste et sur certains bancs du groupe des député-e-s communistes et
républicains.) M. le président. Chers collègues, je vous
prie de laisser M. le ministre répondre ! M. le ministre de
l'économie, des finances et de l'industrie. Le prix du gaz augmente :
de 7 % en mai, de 13 % en novembre et de 9 % en mai suivant, soit de 30 % en un
an - mais en quelle année ? Cela ne vous rappelle rien, monsieur Brottes ?
C'était les 1er mai et 1er novembre 2000 et le 1er mai 2001 !
(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement
populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Si nous ne
vous avons pas critiqués alors, c'est parce que vous appliquiez une formule qui
existe depuis douze ans. S'agissait-il de favoriser le grand capital, les
actionnaires ? Que nenni ! (Exclamations et huées sur les bancs du groupe
socialiste.) L'entreprise, alors, n'en était pas une : il s'agissait du
service public. Un peu de réalisme et de bon sens ! Il faut expliquer aux
Français la situation. Évitez l'idéologie, à trois semaines d'un congrès qui
s'annonce décidément difficile. Revenons-en à la réalité. La formule qui
existe depuis douze ans imposait, hélas, une augmentation mécanique de 12 %. Le
Premier ministre, Dominique de Villepin, m'a demandé de prendre contact avec
l'entreprise et de rechercher avec elle quelles mesures commerciales pourraient
en limiter l'impact. Nous nous occupons de tous les Français, qui risquent de
souffrir cet hiver de l'augmentation du prix du gaz. L'entreprise a proposé des
mesures commerciales très fortes, qui permettent de lisser cette hausse durant
l'hiver, pour la ramener en moyenne à 3,8 % pour l'ensemble des foyers français,
avec deux garanties : pour tous les Français qui habitent dans des logements de
moins de 100 mètres carrés, il n'y aura pas d'augmentation et, pour trois
millions d'entre eux, il y aura même une baisse. Voilà la réalité. (Vives
exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s
communistes et républicains.) Il ne faut certes pas s'en satisfaire. J'ai
donc décidé, à la demande du Premier ministre, de convoquer l'ensemble des
grands acteurs du secteur gazier, pour trouver enfin avec eux une solution aux
problèmes que vous n'aviez pas traités, lisser les hausses erratiques du prix du
gaz et mieux préparer l'avenir, au-delà de l'hiver. Voila la réalité,
monsieur le député. De grâce, assez d'idéologie ! (Vifs applaudissements sur
les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Vives
protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s
communistes et républicains.)
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