FINANCEMENT DU SERVICE D'ENLÈVEMENT
DES ORDURES MÉNAGÈRES
M. le président. La
parole est à M. Alain Marty, pour exposer sa question n° 244, relative
au financement du service d'enlèvement des ordures ménagères.
M. Alain Marty.
Plusieurs structures intercommunales et des usagers m'ont saisi du problème du
financement des services d'enlèvement et de traitement des ordures ménagères.
Nous savons tous que les
contraintes réglementaires qui pèsent sur les collectivités les ont amenées à
réaliser des investissements très lourds ces dernières années pour créer ou pour
moderniser des centres d'enfouissement technique, des plates-formes de
compostage, des déchetteries, ou pour mettre en oeuvre le tri ; et, demain,
elles devront probablement financer l'installation d'incinérateurs. Du reste,
pour faire face à ces dépenses, elles ont toutes choisi de se regrouper dans des
structures intercommunales.
Pour
assurer le service d'enlèvement et de traitement des ordures ménagères, les
collectivités disposent de deux modes de financement : la taxe ou la redevance.
Cette fiscalité, qui a augmenté de 120 % en dix ans, pèse lourdement sur les
ménages, puisqu'elle représentait environ 5 milliards de francs en 2000.
Aussi, étant donné l'importance des enjeux auxquels elles sont confrontées, les
collectivités ont besoin de disposer d'un mode de financement clair.
J'évoquerai brièvement les
avantages et les inconvénients des deux systèmes.
La redevance apparaît sans doute
comme le moyen le plus équitable, mais il n'est pas sans inconvénients. En
effet, son recouvrement suppose l'élaboration d'un rôle. Quant à son produit, il
est partiellement aléatoire, puisqu'il y a forcément des impayés. C'est pourquoi
nombre de collectivités préfèrent recourir à la taxe, qui a un rendement assuré.
Celle-ci est d'ailleurs devenue le quatrième impôt local, puisqu'en 2000
elle représentait 21 % du montant de la taxe foncière sur les propriétés
bâties.
Toutefois, la taxe
présente elle aussi un inconvénient car elle est assise sur une base qui n'a pas
forcément de lien direct avec le service rendu : la valeur cadastrale. En
revanche, elle présente un avantage pour les collectivités : étant donné que le
service rendu ne relève pas d'un service public à caractère commercial et
industriel, ce service n'a pas à être financé intégralement par la taxe. Ainsi,
certaines collectivités ont recours à la fiscalité, dans le cadre du budget
général, pour lisser le coût de la réalisation de divers investissements
Compte tenu de l'existence de deux
modes de financement différents, n'aurions-nous pas intérêt à envisager une
seule forme de contribution, qui soit la plus égalitaire possible et corresponde
exactement au service rendu ? D'où la lettre que j'ai adressée le
17 décembre dernier à M. Alain Lambert pour lui demander que s'engage
une réflexion sur l'évolution des deux systèmes.
S'agissant de la taxe, ne serait-il
pas possible de tenir compte de la qualité du service rendu, car ce n'est pas le
même partout ? De même, l'assiette de la taxe, qui repose uniquement sur la
valeur cadastrale, ne pourrait-elle pas prendre en compte le nombre de personnes
par foyer ? Si de telles modifications étaient adoptées, la taxe aurait tendance
à se rapprocher de la redevance.
Quant à cette dernière, ne
pourrait-elle pas bénéficier d'un dispositif de recouvrement similaire à celui
applicable à la taxe ?
Mais, dès
lors, les deux systèmes seraient si proches l'un de l'autre que l'on pourrait
envisager de les fusionner. Aussi, plutôt que de les modifier, ne pourrait-on
pas créer un nouveau système permettant aux collectivités de faire face à leurs
charges très lourdes en matière d'enlèvement et de traitement des ordures
ménagères.
Je demande donc s'il
n'est pas possible d'engager une réflexion sur la fusion des deux systèmes. Je
me tiens d'ailleurs à la disposition de M. le ministre délégué au budget.
De même, la commission des affaires économiques, de l'environnement et du
territoire est tout à fait prête à participer à cette réflexion et à faire des
propositions pour tenter d'harmoniser le système de recouvrement des
prélèvements opérés pour financer les services d'enlèvement et de traitement des
ordures ménagères.
M. le président. La parole
est à M. le ministre délégué aux libertés locales.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales. En
effet, monsieur le député, l'élimination des déchets ménagers est financée par
deux recettes spécifiques : la taxe ou la redevance. Vous avez parfaitement
décrit le système.
La taxe est
un impôt additionnel à la taxe foncière dont le produit est librement déterminé
par la commune ou par l'EPCI qui bénéficie de l'ensemble de la compétence en
matière d'élimination et de valorisation des déchets et qui assure au moins la
collecte. Elle ne prend en considération, comme vous l'avez indiqué, ni la
capacité contributive du propriétaire redevable ni le volume des déchets
produits. Toutefois, elle présente l'avantage d'assurer, d'une part, une
certaine solidarité entre les administrés et, d'autre part, une stabilité du
produit perçu à ce titre par les collectivités.
Par ailleurs, s'il existe une
différence dans l'importance du service rendu sur le territoire communal ou
intercommunal, la commune ou l'EPCI peuvent définir des zones de perception de
taxe avec des taux différents, en application d'un arrêt ancien du Conseil
d'Etat, l'arrêt Sieur Chèze, du 28 février 1934.
La redevance, quant à elle, est
calculée en fonction du service rendu, et son montant global doit être déterminé
de telle sorte qu'il couvre le coût total de la gestion des ordures ménagères.
De plus, elle doit permettre de facturer à l'usager, et non au contribuable, ce
que coûtent réellement la collecte et l'élimination de ses déchets, selon le
principe pollueur-payeur.
La
redevance apparaît plus équitable que la taxe, mais son coût de gestion et plus
élevé, car la commune, ou l'EPCI compétent, doit établir le fichier des
assujettis et supporter la charge des impayés, sans bénéficier, évidemment, des
services du Trésor.
Le
dispositif actuel de financement du service d'élimination des déchets permet de
faire face à l'augmentation très sensible du coût du service et offre par
ailleurs aux élus la possibilité de choisir le modèle de financement le plus
approprié aux situations locales.
Cependant, comme vous l'avez
souligné avec raison, il n'est pas exempt de critiques. Le report de trois ans
du régime transitoire, prévu par la loi de finances de 2003, doit être
l'occasion de moderniser les modes de financement de la collecte et du
traitement des ordures ménagères, ainsi que d'étudier, notamment, la
personnalisation de la taxe, les modalités de fixation des tarifs de la
redevance et son mode de recouvrement.
Cette réforme, qui doit
impérativement intervenir dans le délai de trois ans fixé par la loi de
finances, se fera, comme il se doit, en concertation avec les élus locaux, qui
sont les principaux acteurs en ce domaine.
M. le président. La
parole est à M. Alain Marty.
M. Alain Marty.
Monsieur le ministre, je vous remercie de ces précisions. Les collectivités
territoriales expriment une forte attente et les pistes que vous esquissez me
paraissent aller dans le bon sens.