FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 2718  de  M.   Besson Éric ( Socialiste - Drôme ) QG
Ministère interrogé :  défense
Ministère attributaire :  défense
Question publiée au JO le :  10/05/2006  page : 
Réponse publiée au JO le :  10/05/2006  page :  3172
Rubrique :  État
Tête d'analyse :  fonctionnement
Analyse :  affaire Clearstream
DEBAT :

AFFAIRE CLEARSTREAM

M. le président. La parole est à M. Éric Besson, pour le groupe socialiste.
M. Éric Besson. Monsieur le président, comme le garde des sceaux, nous sommes attachés au secret de l'instruction. Mais mon collègue Paul Quilès a posé une question qui portait sur le fonctionnement des pouvoirs publics et touchait à des questions que la ministre de la défense avait elle-même abordées à la télévision.
Dans ces conditions, madame la ministre, nous ne comprenons pas votre silence, d'autant qu'il nous a semblé, en vous regardant, que vous aviez plutôt envie de répondre. Êtes-vous ici encore libre de votre parole ou vous a-t-on interdit de vous exprimer ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Pour vous donner une seconde chance de respecter les droits du Parlement, comme dans toutes les grandes démocraties modernes, je vais relire la question de mon collègue Paul Quilès et renoncer à la mienne, qui portait sur la situation économique.
M. Alain Néri. Très bien !
M. Éric Besson. Madame la ministre, le feuilleton qui défraye la chronique a pris une tournure inquiétante avec le mélange d'affaires de personnes et de mise en cause de services essentiels au fonctionnement de l'État républicain. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Je connais comme vous, madame, le ministère de la défense et je sais l'émoi que suscitent les remous de cette triste affaire auprès des militaires mais aussi de l'ensemble de nos concitoyens.
Il y a quelques jours, vous avez déclaré sur France 2 " avoir été visée " par l'affaire Clearstream. Indépendamment de ce qui vous atteint personnellement et qui ne concerne pas mon propos, il apparaît que votre conseiller pour le renseignement et les opérations spéciales a joué un rôle, qui n'est pas encore élucidé, dans le déroulement de cette affaire.
Je voudrais donc savoir si votre conseiller a entrepris des actions concernant des personnalités politiques sans vous en avertir et, si tel est le cas, à la demande de qui.
Je voudrais savoir aussi comment la DGSE, qui est placée sous votre autorité, a été impliquée dans cette affaire. Ce service de l'État a-t-il été utilisé pour une opération dont vous-même avez laissé entendre hier qu'elle répondait exclusivement aux intérêts d'une " ambition personnelle ou carriériste " ?
Je voudrais savoir enfin pourquoi la Commission consultative du secret de la défense nationale, qui comprend des parlementaires, n'a pas été saisie de la demande, formulée le 5 août 2005 par le juge chargé de l'affaire, de lever le secret défense sur les listings informatiques saisis au siège d'EADS et placés sous scellés. Comment se fait-il que ces documents aient été rendus publics ? Auriez-vous levé le secret défense sans passer par la Commission du secret défense ?
Au-delà de ces trois questions se pose celle, encore plus grave,...
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Besson ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Éric Besson. ...de savoir comment vous entendez assurer que notre système de renseignement reste, comme la Constitution et la tradition républicaine le commandent, " au service exclusif de la Nation " ?
M. le président. Merci, monsieur Besson...
M. Éric Besson. Je ne donnerai pas la conclusion puisque le président me l'interdit...
M. le président. Oui, nous la connaissons déjà !
M. Éric Besson. ...mais je vous remercie, madame la ministre, de répondre personnellement à cette question. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. C'est précisément ce qu'elle va faire.
Mme la ministre de la défense, vous avez la parole. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense. Monsieur le député, il n'y a en effet aucune raison pour que je ne réponde pas (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Union pour la démocratie française) dans le domaine de mes compétences et en respectant le secret de l'instruction.
M. Jean-Christophe Lagarde. Bravo, madame la ministre !
Mme la ministre de la défense. Le ministère de la défense est régi par des textes et je tiens, comme ministre et comme juriste, à ce que les règles de fonctionnement de l'État et la loi soient respectées.
Mme Martine David. Nous aussi !
Mme la ministre de la défense. Lorsque nous avons été saisis d'un listing comprenant le nom de personnes du ministère de la défense, une enquête a été menée, sur proposition du général Rondot, dans les strictes limites de notre domaine de compétences, lequel englobe soit les actions menées à l'extérieur du territoire national, soit les actions de personnels du ministère de la défense. Le général Rondot a reçu des instructions en ce sens.
Plusieurs députés du groupe socialiste. De qui ?
Mme la ministre de la défense. Des instructions de moi, bien entendu, c'est-à-dire de respecter les compétences du ministère de la défense et d'enquêter dans ce domaine.
Par ailleurs, si la Commission consultative du secret de la défense nationale n'a pas été saisie d'un certain nombre de demandes, c'est uniquement parce que, jusqu'à ce jour, les demandes précises ne m'ont pas été transmises ainsi que le prévoit la procédure. (" Ah ! " sur les bancs du groupe socialiste.)
Par conséquent, là aussi, la loi est respectée. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Quant à mes propos d'hier, ils n'avaient d'autre but que de rappeler ce qu'est notre vocation et notre mission à tous : oublier nos ambitions personnelles et nos préoccupations de carrière. (Rires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Vous comme nous, mesdames et messieurs les députés, sommes au service d'une seule ambition, qui est celle de nos concitoyens, et celle de la France. Je préférerais qu'on ne l'oublie pas. (Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Mme Martine David. Dites-le à Sarkozy !

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