FINANCEMENT DES NOUVELLES MISSIONS
DE LA POLICE MUNICIPALE
M. le président. La
parole est à Mme Cécile Gallez, pour exposer sa question, n° 279,
relative au financement des nouvelles missions de la police municipale.
Mme Cécile Gallez. Ma
question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité
intérieure et des libertés locales. Maire d'une ville de 11 188 habitants,
dans un arrondissement qui a subi de plein fouet l'arrêt des houillères et de la
sidérurgie, où le taux de chômage dépasse 22 % depuis vingt-cinq ans, j'ai dès
mon élection réclamé une présence plus importante de la police nationale, mais
l'Etat m'a plusieurs fois répondu que ma commune était trop petite pour voir sa
demande prise en considération. Rappelons pourtant qu'elle compte 35 % de
logements sociaux.
Ma devise
étant qu'il vaut mieux prévenir que guérir, je me suis dotée d'une police
municipale, une des premières de l'arrondissement de Valenciennes. Depuis deux
ans, il y a un poste de police de proximité, où la population peut déposer
plainte, par exemple, sans être obligée de faire six à sept kilomètres, comme
c'était le cas auparavant. Nous devons compenser le manque d'effectifs de la
police nationale car, bien que la délinquance ait baissé de 10 %, il nous manque
encore au moins quinze agents et officiers supérieurs. Heureusement, grâce à la
compétence des policiers, grâce aussi à l'action de M. le procureur de la
République et à la collaboration de la population et des concierges d'immeubles
HLM, nous parvenons à réduire la délinquance, notamment chez les jeunes et
surtout les mineurs.
Au tout
début, la police municipale avait été plutôt mal acceptée. Mais aujourd'hui,
grâce à sa présence quotidienne et à sa connaissance du terrain, elle travaille
en parfaite intelligence et complémentarité avec la police nationale.
Malheureusement, au fur et à mesure que de nouvelles attributions viennent
s'ajouter aux anciennes, la charge de travail augmente considérablement. Ainsi,
dans ma ville, le traitement de quelque 900 cartes d'identité,
340 passeports et 50 cartes de séjour par an représente
755 heures de travail, sans compter le temps passé à l'accueil du public ou
au téléphone. Il faudra maintenant y ajouter la gestion des timbres amendes, qui
nous coûte d'ores et déjà 1 752 euros de fournitures, la mise en place
d'une régie d'Etat, la gestion des fourrières automobiles, la rétention des
permis de conduire pour des excès de vitesse supérieurs à 40 km/h et la
gestion des objets trouvés. Cela m'oblige à recruter un policier et peut-être un
agent administratif supplémentaire, voire à agrandir les locaux.
Monsieur le ministre,
envisagez-vous d'étendre encore le pouvoir et le rôle des polices municipales à
l'avenir ? Dans la mesure où leur action évite bien souvent à la police
nationale d'intervenir sur leur territoire, l'Etat ne pourrait-il pas aider les
communes qui consentent cet effort, en leur accordant par exemple un supplément
de DGF ou de DSU ?
M. le président. La
parole est à M. le ministre délégué aux libertés locales.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales. Madame
la députée, vous avez appelé l'attention du ministre de l'intérieur sur le
financement des polices municipales, notamment dans votre commune de
Saint-Saulve.
Je note d'abord
que, tout en vous félicitant de la bonne collaboration des polices nationale et
municipale, des magistrats et des acteurs de la vie locale, vous souhaitez voir
augmenter les effectifs de la circonscription de sécurité publique de
Valenciennes.
Je crois devoir
vous rappeler que l'effectif nécessaire au bon fonctionnement de ce service a
été fixé à 286 agents du corps de maîtrise et d'application. Or il est
actuellement de 290 gardiens et gradés, assistés de 79 adjoints de
sécurité. Ainsi que le ministre de l'intérieur vous l'a écrit dans un récent
courrier, vous pouvez être assurée que la situation de la circonscription de
sécurité publique de Valenciennes sera examinée avec un soin tout particulier
lors de la préparation des prochains mouvements de personnels.
Pour ce qui concerne les pouvoirs
des polices municipales, le ministre de l'intérieur signera très prochainement
une circulaire récapitulant leurs compétences. Cette circulaire sera l'occasion
de repréciser les pouvoirs dévolus aux policiers municipaux, soit que ces
pouvoirs existent déjà mais sont mal connus, soit qu'ils aient été étendus par
la loi du 18 mars 2003 sur la sécurité intérieure.
D'ores et déjà, une circulaire en
date du 24 mars 2003 a été envoyée aux préfets, précisant toutes les
dispositions de la loi du 18 mars 2003. Celles-ci sont immédiatement
applicables, et au premier rang les articles du titre III de la loi, visant
à accroître les pouvoirs des maires et des agents de police municipale.
Le dispositif ainsi prévu apparaît
pour l'instant suffisamment satisfaisant pour qu'il ne soit pas actuellement
envisagé une nouvelle extension des missions des polices municipales.
Je tiens également à préciser que
la loi du 15 avril 1999 relative aux polices municipales prévoit que
l'instauration des polices municipales est une simple faculté offerte aux
collectivités.
C'est la raison
pour laquelle j'attire votre attention sur le fait que la dotation globale de
fonctionnement, qu'il s'agisse de sa composante forfaitaire ou de celles
obéissant à un objectif de péréquation - dotation de solidarité urbaine et
dotation de solidarité rurale - ne constitue pas le bon vecteur pour
compenser le coût des missions des polices municipales. Cette dotation globale
et libre d'emploi, qui s'inscrit ainsi dans l'esprit de la décentralisation, n'a
pas vocation à soutenir telle ou telle politique publique spécifique. S'agissant
de la dotation forfaitaire, son principe même ne s'accommode pas de
réévaluations périodiques et différenciées selon les collectivités en fonction
de l'évolution de certaines de leurs charges.
S'agissant de la dotation de
solidarité urbaine, non seulement celle-ci n'est attribuée qu'aux communes qui y
sont éligibles, ce qui ne recoupe pas le périmètre des communes possédant une
police municipale, mais elle évolue selon les collectivités uniquement en
fonction de critères liés à l'objectif désormais constitutionnel de péréquation,
dans lesquels ne sauraient entrer en ligne de compte les frais occasionnés par
les polices municipales.
En
outre, il n'est pas envisagé de créer de dotation spécifique au sein de la DGF
afin de couvrir les coûts de la prise en charge des frais mentionnés
précédemment. Il faut en effet relever que le contexte actuel va plutôt dans le
sens d'un renforcement des dotations globales et non dans celui d'une remise en
place de mécanismes de subventions spécifiques, qui ne correspondent pas aux
objectifs de libre administration des collectivités locales et de simplification
des dotations.
Conformément à
l'esprit de la décentralisation, nous évoluons vers des dotations de plus en
plus globales, de plus en plus forfaitaires, qui affirment le principe de la
libre administration, donc de la libre disposition de ces dotations.
Quant à la dotation générale de
décentralisation, elle représente un différentiel de financement constaté à la
suite d'un transfert de compétences. L'article L. 1614-1 du code général
des collectivités territoriales dispose en effet que tout accroissement des
transferts de compétences effectué entre l'Etat et les collectivités
territoriales est accompagné du transfert concomitant par l'Etat aux communes,
aux départements et aux régions des ressources nécessaires à l'exercice normal
de ces compétences. L'article L. 1614-4 du même code énonce que la
compensation des charges transférées s'effectue par un transfert d'impôts d'Etat
et, pour le solde, par l'attribution d'une dotation générale de
décentralisation. Le champ d'application de ces dispositions est donc
strictement encadré : celles-ci ne s'appliquant qu'aux seuls transferts de
compétences, elles ne sauraient de ce fait être utilisées comme une dotation
spécifique pour les polices municipales.