Texte de la QUESTION :
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M. Yves Nicolin appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur l'éventualité de permettre à La Poste, dans la discussion sur son nouveau contrat de plan avec l'État, de se développer dans trois domaines où elle est absente aujourd'hui : le crédit immobilier sans épargne préalable, le crédit à la consommation et l'assurance de dommages. De telles mesures inquiètent les professionnels des services bancaires qui y voient une concurrence directe. Par ailleurs, cette décision poserait trois graves problèmes : la création d'un nouvel acteur bancaire continuant à bénéficier de privilèges importants et exempté de contraintes financières et prudentielles auxquelles sont soumises les entreprises bancaires et financières du secteur concurrentiel, la confiscation de la valeur ajoutée et des emplois du secteur concurrentiel au profit d'une entité de service public, qui ne résoudrait en rien les problèmes d'emploi et de rentabilité de La Poste, car ce serait des emplois bancaires qui seraient transférés et non des emplois de postiers qui seraient reclassés, enfin, une remise en cause profonde du système bancaire et financier français, confronté déjà à une concurrence européenne très forte, et dont les efforts de compétitivité en font pourtant aujourd'hui l'un des éléments de solidité de notre économie. En outre, il ne semble pas que cela soit une solution pour maintenir un réseau de service public et de proximité, notamment en zone rurale puisque la demande de crédit se concentre surtout au niveau des agglomérations urbaines. Il lui demande donc de bien vouloir préciser les intentions du ministère en la matière.
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Texte de la REPONSE :
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La Poste est aujourd'hui un acteur important dans le domaine des services financiers aux particuliers. La diminution régulière de ses parts de marché, du fait d'une gamme incomplète de services est un motif de préoccupation pour son actionnaire. Cette activité est par ailleurs régie par des règles qui dérogent au droit commun des établissements de crédit. Il appartient par conséquent à l'État, en tant qu'actionnaire de l'établissement public et en tant que régulateur du secteur financier de clarifier le rôle de La Poste en matière de services financiers et de créer un cadre nouveau de gestion responsable et transparent. Dans ces conditions, l'État et La Poste ont décidé, dans le cadre du contrat de plan 2003-2007, du principe de la création en 2005, dans des conditions de droit commun, d'un établissement de crédit portant l'ensemble de l'activité et permettant un pilotage financier conforme aux standards de marché, soumis à la réglementation et aux contraintes prudentielles de droit commun, assurant la comparabilité avec les concurrents, garantissant l'opposabilité des comptes aux tiers et permettant ainsi de vérifier la conformité de l'activité aux règles et conditions de concurrence en vigueur, aux niveaux national et communautaire. L'établissement de crédit recourra pour son activité commerciale et de production aux moyens en personnel de La Poste dans le cadre de conventions de services, qui devront exclure toute distorsion de concurrence, en particulier en assurant une juste rémunération de La Poste et de son réseau par l'établissement. Sous ces conditions, l'établissement de crédit pourra octroyer en 2005 des prêts immobiliers sans épargne préalable. Cette extension de la gamme des services financiers ne concerne donc ni le crédit à la consommation, ni l'assurance dommage. Le respect de ces conditions sera évalué par l'État à intervalles réguliers. Une première évaluation, qui associera des experts extérieurs, sera conduite en 2006. Bien entendu, la mise en oeuvre de ces orientations suppose des évolutions législatives et réglementaires. Par ailleurs, si le marché du crédit à l'habitat est largement concurrentiel, La Poste assure déjà une part significative de la distribution de crédits immobiliers. L'extension des services financiers de La Poste qui a été décidée par le Gouvernement ne devrait donc n'avoir qu'un impact progressif et limité sur le système bancaire et financier français. C'est d'ailleurs ce que démontre l'étude réalisée à la demande du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie par le cabinet AT Kearney. En outre, la présence de La Poste sur le territoire permet dans certaines zones, notamment rurales, d'assurer une concurrence souhaitable en termes de bon fonctionnement du secteur bancaire et de protection de l'intérêt des consommateurs. Cette évolution n'est pas propre à la France comme le montre la création dans de nombreux pays européens de « banques postales » dans les années récentes. L'État, dans son rôle de régulateur du secteur financier, doit naturellement porter toute l'attention nécessaire sur les modalités concrètes de cette évolution.
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