DEBAT :
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SMIC ET SALAIRES DES GRANDS PATRONS M. le président. La parole est à M. Jacques
Desallangre, pour le groupe des député-e-s communistes et
républicains. M. Jacques Desallangre. Monsieur le Premier
ministre, une échéance fondamentale approche, qui concerne plus de trois
millions de nos concitoyens, une échéance qui détermine la vie quotidienne de
près de 17 % de la population active de notre pays. Cette échéance, c'est le 1er
juillet, date de la revalorisation annuelle du SMIC. Il y a encore en France
plus de trois millions de personnes qui vivent avec moins de 1 000 euros par
mois pour un travail à temps plein, et quelques centaines de milliers de femmes
et d'hommes survivent avec encore moins en raison d'un emploi à temps partiel.
Les salariés les plus modestes sont concernés par ce qui devrait être un
plancher commun de rémunération mais, à ce jour, plus de soixante branches
professionnelles restent hors la loi avec des minima salariaux inférieurs au
SMIC. Ces rémunérations sont injustes dans un pays riche comme le nôtre. Il
faut en conséquence, dès demain, porter le SMIC à 1 500 euros. (" Plus ! 2
000 ! 3 000 ! " sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement
populaire.) Cela vous paraît impossible et vous préféreriez 1 500 euros
en 2012 ? Soyez raisonnables. Ce serait hypocrite car cela ne représente qu'une
augmentation de 3 % par an, c'est-à-dire 1 % de plus que l'inflation.
(Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement
populaire.) Cela vous semble irréaliste au regard de la capacité de notre
économie et de nos entreprises ? Mais nos grandes entreprises ont vu leurs
profits augmenter de 33 % en 2005, et les 9 milliards de cette mesure seraient
facilement absorbables par l'économie française. Il n'y aurait pas assez
d'argent pour les smicards alors que, dans le même temps, les grands patrons se
gavent de stock-options, de " golden hello ", de parachutes dorés ? Quelques
chiffres : M. de Castries, PDG d'Axa, a touché 47 millions d'euros en 2005, soit
2 600 années de SMIC à 1 500 euros. M. Arnault, PDG de LVMH, 91 millions d'euros
: 5 000 années de SMIC à 1 500 euros. En 2006, M. Zacharias, PDG de Vinci, a
touché 173 millions d'euros : 9 000 années de SMIC à 1 500 euros. M.
Lucien Degauchy. Démagogie populiste ! M. Jacques
Desallangre. À côté, les 5,5 millions d'euros de M. Noël Forgeard sont
une misère, mais il a vendu ses titres à la veille d'une culbute du cours, sans
savoir, bien sûr, que, le lendemain, il allait annoncer quelque chose de
catastrophique pour l'entreprise qu'il dirige... Ça améliore ! La réponse est
donc simple : oui, l'économie française peut dès demain supporter un SMIC à 1
500 euros. Après la réponse, voici la question, monsieur le Premier ministre
: allez-vous profiter de la revalorisation du 1er juillet pour porter le SMIC de
1 217 à 1 500 euros et pousser le patronat à partager son pactole indécent ?
(Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et
républicains.) M. le président. La parole est à M. le
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. M. Thierry
Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
La priorité du Gouvernement, monsieur le député, c'est l'augmentation du
pouvoir d'achat. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) En
quatre ans, la revalorisation du SMIC a représenté plus d'un mois de salaire
supplémentaire. Bien sûr, on essaie toujours de faire plus. Vous avez parlé
des entreprises et de leurs directions. Même si je mesure l'émotion derrière vos
propos, partagée par un certain nombre de nos compatriotes, même si je ne
partage pas les propos que vous avez tenus, je voudrais replacer votre question
sous l'angle de la responsabilité. Premièrement, la responsabilité de
l'entreprise, c'est de servir ses clients, ses salariés et, après, ses
actionnaires : dans cet ordre. Deuxièmement, la responsabilité suppose la
transparence. Dans la loi sur la modernisation de l'économie, qui a été adoptée
par votre assemblée il y a un an, j'ai souhaité que la transparence la plus
totale soit faite sur la rémunération des actionnaires et des dirigeants.
(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Troisièmement, la
responsabilité suppose le contrôle. C'est la responsabilité des conseils
d'administration de prendre les mesures qu'il convient lorsque, comme on l'a vu
dernièrement, il y a des excès. Quatrièmement, responsabilité et
participation. Un vote des actionnaires en assemblée générale est désormais
obligatoire lorsqu'une rémunération lie le dirigeant à l'entreprise par le biais
d'une convention ou d'une convention réglementée. Cinquièmement,
responsabilité et partage. Ce sera dans le cadre de la loi sur la participation
que je présenterai prochainement avec Gérard Larcher et qui sera, je l'espère
bientôt votée au sein de cet hémicycle, afin que tout le monde puisse bénéficier
d'actions, les salariés comme les autres. (Applaudissements sur plusieurs
bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M.
Christian Bataille. Partagez le salaire de Forgeard !
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