Texte de la QUESTION :
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Mme Françoise Imbert attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie et du développement durable sur l'extinction progressive des tortues d'Hermann, seule espèce française de tortues terrestres. En effet, cette espèce décroît très fortement, du fait notamment de la disparition de son habitat naturel. Aujourd'hui, seuls les éleveurs de tortues d'Hermann permettent leur reproduction, Or, la législation actuelle rend condamnable tout détenteur de ces animaux, ainsi que leur vente ou leur cession. Une fédération francophone pour l'élevage et la protection des tortues vient d'être créée, elle regroupe officiellement les éleveurs de tortues et assure une gestion saine et organisée de l'espèce. Aussi, elle lui demande si le Gouvernement entend prendre des dispositions afin de réétudier les possibilités d'élevage de cette tortue et de garantir ainsi la sauvegarde de cette espèce.
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Texte de la REPONSE :
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Le ministre de l'écologie et du développement durable a pris connaissance, avec intérêt, des questions relatives à la protection de la tortue d'Hermann. Autrefois commune dans tout le sud de la France, la tortue d'Hermann a vu la répartition de ses populations sauvages peu à peu réduite à trois noyaux : l'un, à proximité de la frontière espagnole, semble avoir disparu, un autre, dans le Var, est très menacé, et seul celui de Corse semble échapper pour l'instant à cette évolution défavorable. La disparition de milieux compatibles avec le maintien de populations sauvages de tortues d'Hermann progresse par modification ou par destruction ; elle constitue la plus fondamentale des menaces auxquelles est exposée cette espèce. Les graves incendies qui ont frappé le sud de la France l'an dernier ont mis en évidence la fragilité de la petite faune dans les milieux exposés. Leur impact est considérable sur les biotopes et extrêmement dommageable à la faune et à la flore en général comme il l'a été, dans le département du Var, vis-à-vis de populations de tortues d'Hermann déjà très fragiles, à dynamique de recolonisation extrêmement lente et dont le domaine vital se restreint toujours plus. Par chance, l'impact des feux de l'été 2003 sur les populations de tortues d'Hermann du département du Var semble avoir été modéré : cela tient essentiellement au hasard de la propagation des feux qui se sont tous, à quelques exceptions près, dirigés vers des zones peu occupées par cette espèce. Les principaux noyaux de population n'ont pas été touchés (vallée de la Molle et vallée de la Malière), ou bien ne l'ont été que de façon très marginale (plaine des Maures). On peut donc estimer à moins de 10 % l'impact vraisemblable de ces feux sur les effectifs actuels des tortues d'Hermann de ce département. Les travaux de débroussaillage destinés à prévenir les incendies peuvent eux-mêmes représenter un danger car, lorsqu'ils sont effectués de façon inadaptée, les machines tuent ou blessent les animaux qui se tapissent à leur passage. Bien d'autres facteurs défavorables peuvent encore intervenir, par exemple les captures illégales, ou à l'inverse, le fait de lâcher des animaux dans la nature sans avoir pris toutes les précautions nécessaires pour favoriser leur insertion convenable dans ces milieux et y prévenir des risques d'épizootie. Tous ces facteurs se conjuguent pour mettre en péril les dernières populations sauvages de tortues d'Hermann du département du Var, au point de les menacer d'extinction. Cette dynamique défavorable doit être inversée. Un rapport de décembre 2003, rédigé par des ingénieurs généraux, évoque les points forts de la reconstitution des milieux et présente tout un ensemble de mesures et de recommandations relatives à la prévention et à la lutte contre l'incendie ; leur mise en place pourrait être coordonnée par la création d'un comité inter-régional et inter-services, chargé de faciliter la mission sur la politique et les actions de prévention qui a été confiée à la délégation à la protection de la forêt méditerranéenne. D'ores et déjà, le conservatoire de la forêt méditerranéenne vient d'être doté d'un crédit de 11 millions d'euros pour l'année 2004. Par ailleurs, dans le cadre de la restauration écologique des sites, la direction régionale de l'environnement de la région Provence - Alpes - Côte d'Azur finalise cette année un plan de restauration de la tortue d'Hermann, qu'elle finance à hauteur de 80 000 euros en 2004. En marge de leurs populations sauvages, beaucoup de tortues d'Hermann vivent sur des terrains privés et s'y reproduisent, ou bien sont élevées chez de nombreux particuliers dont les associations ont constitué la fédération francophone pour l'élevage et la protection des tortues (FFEPT). Cette fédération annonce regrouper 24 associations et souhaite participer à la sauvegarde de cette espèce aux côtés des pouvoirs publics. Consciente des risques auxquels des réintroductions et des renforcements de population mal conduits ont exposé les populations sauvages de tortues d'Hermann dans un passé récent, la FFEPT n'a pas demandé le renouvellement de telles opérations. En revanche, elle souhaite une libéralisation des textes qui encadrent les échanges de tortues d'Hermann afin de permettre aux amateurs de développer leur activité dans la légalité ; elle estime que la reproduction de ces tortues en captivité constituerait une alternative aux trafics illégaux. La tortue d'Hermann est une espèce protégée au titre, notamment, des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'environnement. En application de cette loi, toutes les actions sur les spécimens de cette espèce et en particulier leur transport, leur vente ou leur achat sont interdites. Ces dispositions, qui visent à protéger les populations sauvages, s'opposent au développement de l'élevage par des amateurs puisqu'elles leur interdisent d'échanger ces animaux. En revanche, leur détention n'est pas interdite même en cas de reproduction. La crainte que des gens soient assimilés à des délinquants, parce qu'ils ont des tortues d'Hermann dans leur propriété, n'est donc pas fondée. Lorsque des tortues d'Hermann sont détenues dans des zoos ou des centres d'élevage, les articles L. 413-1 à L. 413-5 du code de l'environnement, relatifs aux établissements détenant des animaux d'espèces non domestiques, s'appliquent également. En raison des fortes contraintes auxquelles sont soumis ces établissements (autorisation d'ouverture préfectorale, certificat de capacité pour leur responsable, contrôle par l'administration), l'application des règles relatives aux échanges d'animaux y est plus souple que vis-à-vis des particuliers.
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