Texte de la QUESTION :
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M. Michel Charzat appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice,
en matière de rémunération des gérants de tutelle. Il rappelle que non seulement la rémunération des gérants de tutelle auxquels est confiée une mesure de protection d'un incapable majeur n'a pas été réévaluée depuis l'arrêté du 14 février 1983, mais qu'en outre elle ne couvre qu'une très petite partie des missions assurées. L'arrêté précité du 14 février 1983 fixe comme suit la rémunération des actes accomplis en application de l'article 500 du code civil : 3 % du produit pour la tranche des revenus annuels inférieurs à 2 286,74 euros ; 2 % du produit pour la tranche des revenus annuels compris entre 2 286, 75 euros et 6 860,21 euros ; 1 % du produit pour la tranche des revenus annuels supérieurs à 6 860,22 euros. Les actes visés par l'article 500, alinéa 1, du code civil sont les suivants : le gérant de tutelle perçoit les revenus de la personne protégée et les applique à l'entretien et au traitement de celle-ci, ainsi qu'à l'acquittement des obligations alimentaires dont elle pourrait être tenue. S'il y a un excédent, il le verse à un compte qu'il doit faire ouvrir chez un dépositaire agréé. Chaque année, il rend compte de sa gestion directement au greffier en chef du tribunal d'instance dont relève le majeur ; pour les actes accomplis en application de l'article 500, alinéa 2, et article 501, l'arrêté du 4 mars 1970, modifié par l'arrêté du 8 janvier 1971, accorde une rémunération spécifique pour les ventes ainsi que les opérations de réparation ou d'entretien d'un patrimoine immobilier, mais il ne précise rien pour les autres actes (achat, succession...). Sachant qu'il est bien rare qu'un incapable majeur dispose d'un montant annuel de ressources supérieur à 10 000 euros, la rémunération du gérant s'élève dans ce cas à 191,45 euros pour l'année (et 15,95 euros par mois). Le coût horaire des prestations, dans la région parisienne, est fixé par l'ensemble des juges des tutelles à 45 euros. De ce fait le tarif de l'arrêté du 14 février 1983 rémunère le gérant pour 20 minutes de travail par mois pour ce majeur. L'association gestionnaire, gérante de tutelle, répartit les tâches entre ses différents délégués. Or le rapport Favard (avril 2000) et l'étude de l'Ecole nationale de la magistrature (juillet 2002) définissent un temps de travail minimum mensuel de 4 h 30 (pour le premier) et de 5 h 30 (pour la seconde) par délégué pour chacun des majeurs. Ce délégué doit en effet gérer, placer les ressources et le patrimoine d'un majeur tout en prenant soin de sa personne (relations avec lui et son entourage familial, contacts médical et social...). Á ce temps du délégué s'ajoute le temps de travail du personnel administratif et comptable ainsi que les frais de structure (loyer, électricité, chauffage, téléphone, fax, affranchissement, informatique...) évalués à 20 % du budget de l'association. C'est pourquoi le rapport définitif du groupe de travail interministériel sur le dispositif de protection des majeurs présidé par M. Favard conclut : « Avec un tel barème, pour percevoir un peu plus de 76,22 euros par mois, les ressources du majeur devraient dépasser 6 250,41 euros. C'est dire que la rémunération réelle des gérants de tutelles passe par des indemnisations complémentaires revêtant les formes les plus variées (du 1 % sur les ventes, devenu la règle, à des vacations aussi démultipliées que possible), à la discrétion des juges qui n'en peuvent mais, en l'état d'une telle situation et qui n'ont pas tous les mêmes réactions pour y face ». Face à ce problème et aux nombreux dysfonctionnements relevés par de nombreux rapports sur le sujet, le gouvernement précédent avait élaboré sur la base d'une longue concertation une profonde réforme des tutelles. Ce projet de loi, présenté au conseil des ministres du 30 janvier 2001, présente toujours la même acuité. C'est pourquoi il lui demande quelle suite il entend lui donner.
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Texte de la REPONSE :
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Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que le Gouvernement, soucieux d'adapter le dispositif de protection des majeurs en considération des évolutions économiques et sociales intervenues depuis la loi du 3 janvier 1968, a entrepris une réforme globale du droit des majeurs vulnérables. S'agissant de ses aspects financiers, un groupe de travail associant l'ensemble des praticiens a été mis en place par le ministère délégué à la famille afin de redéfinir le dispositif actuel de financement de la protection, lequel résulte de textes épars et comporte d'importantes imperfections pouvant conduire à des situations inéquitables. Tirant les conséquences du projet de réforme du code civil préparé sous l'égide de la chancellerie qui supprime les notions de mesure d'État et de gérance de tutelle pour les remplacer par une mesure unique confiée à un délégué à la protection des majeurs, qu'il soit une association tutélaire, un gérant de tutelle privé ou d'un établissement de traitement, le groupe de travail a préconisé une uniformisation des modalités de financement. Sera ainsi instauré un mécanisme unique de prélèvement sur les revenus des personnes protégées, progressif par tranche de revenu, complété par un financement public en cas d'insuffisance de ressources. Une rémunération supplémentaire ne pourra être autorisée par le juge des tutelles qu'à titre exceptionnel, pour l'accomplissement d'un acte ou d'une série d'actes requérant des diligences particulièrement longues ou complexes.
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