DEBAT :
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ASSASSINAT D'ANNA POLITKOVSKAÏA M.
le président. La parole est à M. Christian Kert. M.
Christian Kert. Monsieur le Premier ministre, depuis des semaines et
des mois, une femme vivait, fragile et dans la peur, au coeur de Moscou, car
elle se savait menacée de mort. Samedi dernier, dans l'après-midi, Anna
Politkovskaïa a été lâchement assassinée à son domicile. Journaliste de
talent et de conviction, elle a payé au prix de sa vie le courage de ses
engagements au service des droits de l'homme. Le moins que l'on puisse dire,
c'est que la réaction officielle russe a été lente et réservée dans une
circonstance aussi tragique. Il est vrai que, dans ses articles, cette
correspondante de guerre n'hésitait pas à s'élever contre certaines dérives du
pouvoir russe, notamment en ce qui concerne la guerre en Tchétchénie et la
corruption des fonctionnaires. M. Maxime Gremetz. Et
Djibouti ? M. Christian Kert. Sa mort est due au fait
qu'elle voulait écrire l'honneur de la Russie, témoigner de la liberté de la
presse, écrire l'histoire de tous ceux qui ont un jour osé élever la voix dans
cet empire. La France, qui peut légitimement s'honorer de porter face au
monde une tradition de défense des droits de l'homme, se doit de faire part de
son émotion et de sa colère. Cette émotion et cette colère, monsieur le Premier
ministre, ne doivent pas s'émousser : depuis 1992, 42 journalistes sont morts en
Russie. Nous avons entendu votre réaction immédiate à ce drame. M.
Guy Teissier. Un assassinat sauvage ! M. Christian Kert.
Avez-vous depuis obtenu des informations que nous ignorerions sur les
circonstances du meurtre ? M. Maxime Gremetz. Bien sûr
! M. Christian Kert. De quelle façon entendez-vous faire
part au président Poutine de l'émotion ressentie en France jusqu'au plus humble
de nos concitoyens, quel que soit son univers politique ? M. Maxime
Gremetz. Ce crime est l'oeuvre des conservateurs et des mafieux
! M. le président. Monsieur Gremetz, je vous en
prie. M. Christian Kert. Comment comptez-vous aider
l'opinion internationale à peser de façon déterminante sur les autorités russes
pour que la lumière soit réellement faite sur cet assassinat ?
(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement
populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) M. le
président. La parole est à M. le Premier ministre. M.
Dominique de Villepin, Premier ministre. Je veux vous dire ma
très grande émotion, une émotion que, je le sais, nous partageons tous, devant
l'assassinat d'Anna Politkovskaïa. C'était une grande journaliste, engagée dans
la défense des droits et des libertés. C'était aussi une conscience qui avait le
courage de regarder la vérité en face, y compris en ce qui concerne le drame de
la Tchétchénie. Nous souhaitons que les autorités russes fassent toute la
lumière, et le plus rapidement possible, sur cette assassinat, et que leurs
auteurs en répondent devant la justice. Une enquête a été lancée. Elle doit
aller jusqu'au bout. L'OSCE et le Conseil de l'Europe, dont la mission en
matière de liberté de la presse et de défense des droits de l'homme est
essentielle, apporteront bien sûr toute leur contribution. Je veux le dire
clairement devant les représentants de la démocratie : la liberté de la presse
ne se discute pas, ne se négocie pas. Elle est une condition fondamentale de la
liberté publique, que la France contribuera à défendre partout, et auprès de
tous ses interlocuteurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union
pour un mouvement populaire, du groupe Union pour la démocratie française et sur
quelques bancs du groupe socialiste.) M. Bernard Roman.
Et Genestar à Paris-Match ? M. le président.
Monsieur Roman, un peu de dignité.
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