FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 2901  de  M.   Durand Yves ( Socialiste - Nord ) QG
Ministère interrogé :  éducation nationale
Ministère attributaire :  éducation nationale
Question publiée au JO le :  12/10/2006  page : 
Réponse publiée au JO le :  12/10/2006  page :  6026
Rubrique :  enseignement maternel et primaire
Tête d'analyse :  pédagogie
Analyse :  apprentissage de la lecture
DEBAT :

LIBERTE D'EXPRESSION
DANS L'EDUCATION NATIONALE

M. le président. La parole est à M. Yves Durand, pour le groupe socialiste.
M. Yves Durand. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Avec vous, monsieur le ministre, l'éducation nationale va-t-elle devenir la Grande Muette ?
M. Lucien Degauchy. On n'entend qu'elle !
M. Yves Durand. Voilà quelques semaines un chercheur reconnu comme l'un des spécialistes les plus compétents en sciences de l'éducation, M. Roland Goigoux, a été, sur votre injonction, purement et simplement interdit de cours. Sous quel prétexte ? Parce qu'il avait écrit un livre, par ailleurs jugé excellent par tous les spécialistes, dans lequel il émettait quelques critiques sur vos recommandations en matière de lecture. Je note d'ailleurs qu'au cours d'un colloque au Collège de France, s'étaient également manifestées sur le même sujet des réserves. Cependant, les protestations unanimes contre cette mesure n'y ont rien changé puisque, il y a quelques jours, un inspecteur du département du Nord a été convoqué chez le recteur de l'académie de Lille pour être rappelé à l'ordre, pour le même motif. (" Très bien ! " sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Au-delà de ces deux cas personnels, il s'agit là d'une atteinte intolérable à la liberté de la recherche et d'une marque supplémentaire de mépris envers le travail des enseignants, qui ont devant eux des classes de plus en plus surchargées du fait de la suppression massive de postes dans l'éducation nationale depuis 2002. (" Démago ! " sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Alors que vous annoncez une nouvelle vague de plus de 8 000 suppressions de postes pour la rentrée prochaine, il est courant de dénombrer dès cette année plus de trente élèves dans des classes de cours préparatoire. C'est bien là le véritable obstacle à une bonne maîtrise de l'apprentissage de la lecture. (" La question ! " sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Non content de retirer aux enseignants les moyens de faire leur métier, vous mettez en cause leur travail et leurs compétences. Est-ce pour masquer, monsieur le ministre, votre échec en matière éducative que vous attaquez ainsi les enseignants ? (" La question ! " sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur le ministre, votre seule ambition est-elle de mettre au pas les enseignants et les chercheurs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - " Scandaleux ! " sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
M. Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le député, j'aurais pu attendre de vous davantage de mesure et de sérénité pour parler de la belle mission que remplit l'éducation nationale. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur divers bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
J'aurais pu attendre de votre part beaucoup plus d'inquiétude face aux 20 % de jeunes qui arrivent en sixième sans savoir lire. (" Eh oui ! " sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) C'est cela notre préoccupation commune, à l'éducation nationale et à la représentation nationale.
J'aurais pu attendre de votre part aussi quelque inquiétude au vu des résultats des tests des journées d'appel de la défense, qui révèlent que 15 % des jeunes entre seize et dix-huit ans, presque des adultes donc, sont en grande difficulté s'agissant de la lecture.
M. Christian Bataille et M. Patrick Lemasle. Répondez à la question !
M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. C'est cela, monsieur le député, que vous auriez dû dénoncer. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur divers bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
Je sais que les enseignants ont une tâche extrêmement difficile, qui mérite mieux que des polémiques, qui mérite du respect, beaucoup de respect. (" Répondez à la question ! " sur plusieurs bancs du groupe socialiste.) Et c'est précisément par respect envers cette tâche que je leur ai donné des programmes plus simples, plus efficaces, et fondés scientifiquement.
M. Patrick Lemasle. Vous ne répondez pas à la question !
M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Ces programmes, monsieur Durand, seront appliqués.
M. Guy Geoffroy. Très bien !
M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. La mission des cadres, notamment des inspecteurs, est d'accompagner les enseignants, de leur permettre de bien assimiler ces programmes, de les épauler.
Alors que penser quand on lit dans une revue qu'un inspecteur est carrément contre les textes officiels ? (" C'est scandaleux ! " sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Que vont penser les parents, qui confient leurs jeunes à l'éducation nationale pour que celle-ci non seulement les instruise mais également prépare leur insertion professionnelle ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.) Ce sont ces sujets que vous auriez dû aborder, monsieur Durand.
M. Patrick Lemasle et M. Patrick Roy. Vous ne répondez pas.
M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Oui, un recteur fait actuellement une enquête administrative, dont j'aurai à connaître dans quelques jours, et cela est bien normal. C'est la beauté de la fonction publique, monsieur Durand, que d'avoir à la fois des droits et des devoirs. Les droits, ce sont les avantages de la fonction publique. Les devoirs, c'est notamment le respect des textes officiels. (" Très bien ! " sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
C'est cela la beauté et la noblesse de la fonction publique. En ne parlant que de ses droits sans parler de ses devoirs, monsieur Durand, vous affaiblissez la fonction publique. (Applaudissements et huées sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.- Applaudissements sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

SOC 12 REP_PUB Nord-Pas-de-Calais O