Texte de la QUESTION :
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M. Michel Bouvard attire l'attention de Mme la ministre déléguée à l'industrie sur l'évolution inquiétante du coût de l'énergie électrique pour les industriels, gros consommateurs dans les secteurs où il n'existe pas d'énergie alternative, comme l'électrométallurgie, l'aluminium, etc. En effet, les renouvellements des contrats arrivés à échéance se traduisent par de fortes hausses de la part des producteurs dans un marché où l'ouverture des frontières et la déréglementation facilitent, en raison de l'insuffisance de production au niveau européen par rapport à la consommation, une hausse des prix et des mouvements spéculatifs, et peut-être même des ententes entre producteurs. La France, dont la production était excédentaire en raison du choix du programme électronucléaire effectué par le général de Gaulle et Georges Pompidou et qui de ce fait offrait de bonnes conditions aux industriels, se trouve ainsi fragilisée et menacée par la désindustrialisation dans ce secteur. Il souhaite donc connaître les dispositions que le Gouvernement entend prendre, en liaison avec la Commission européenne, pour faire face à cette situation, la première disposition pouvant concerner un renforcement des contrôles sur le marché de l'énergie électrique et la possibilité pour les industriels de bénéficier à nouveau de contrats à long terme de la part des producteurs, intégrant une tarification prenant en compte les possibilités d'adapter leur consommation aux périodes de pointe dans l'alimentation du marché.
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Texte de la REPONSE :
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La loi du 10 février 2000 sur la modernisation et le développement du service public de l'électricité a offert la possibilité aux industriels gros consommateurs d'énergie de choisir librement leur fournisseur d'électricité, et donc de négocier, s'ils le souhaitent, avec les concurrents d'EDF pour tenter d'obtenir des prix plus avantageux. Après avoir préalablement déclaré leur éligibilité auprès du ministère de l'industrie, certains gros consommateurs d'électricité ont choisi de renoncer à bénéficier des tarifs régulés d'EDF et de faire valoir ce droit à l'éligibilité alors que les prix de marché, sur la base desquels les producteurs élaborent leurs offres commerciales, étaient très bas. Leur niveau, issu de la rencontre sur un marché européen entre une demande limitée et une offre abondante, était en outre notablement inférieur aux coûts de production sur lesquels se fondent les tarifs proposés par le monopole. La hausse actuelle des prix de marché de l'électricité est liée à la hausse des coûts de production au niveau européen, avec une hausse de près de 60 % du prix du charbon en 2003, mais elle résulte aussi des mécanismes de marché. Elle relève ainsi d'une anticipation par les opérateurs des investissements qui seront nécessaires pour le renouvellement de leurs installations de production à laquelle s'est ajoutée l'intégration d'une prime de risque liée à la situation caniculaire de l'été 2003. Par ailleurs, l'anticipation des surcoûts de production dus à la mise en place imminente des permis d'émission de gaz à effet de serre, dans le cadre des engagements pris à Kyoto, pèse aussi sur les prix. S'il est vrai qu'en France la structure du parc de production essentiellement nucléaire et hydraulique préserve les opérateurs des surcoûts des permis d'émission, la logique du marché concurrentiel, dont la mise en place a été encouragée par les gros consommateurs d'énergie, incite cependant les opérateurs à s'aligner sur les niveaux de prix des fournitures disponibles en Europe où se forme un prix de marché moyen. Pour les entreprises grosses consommatrices d'électricité, le poste lié à l'énergie représente une part importante du budget. L'augmentation actuelle du prix de l'électricité est ainsi susceptible d'entraîner des répercussions importantes sur la rentabilité de ces industries et, par conséquent, sur la santé de l'économie française. Il convient donc d'analyser en profondeur le fonctionnement des marchés, les déterminants structurels du prix de l'électricité et d'évaluer comment concilier le libre jeu de la concurrence et le maintien de la compétitivité des industries françaises. La France portera cette question au niveau européen, notamment dans le cadre du mémorandum que le Gouvernement adressera prochainement à ses collègues européens sur la politique énergétique pour notre continent. Au plan national, une mission sur ce sujet a été confiée au conseil général des mines et à l'inspection générale des finances. Elle étudiera en particulier les pistes possibles pour améliorer le fonctionnement du marché et accroître les bénéfices qu'en retirent les consommateurs, à travers notamment le développement de contrats de long terme, une participation des gros consommateurs aux investissements dans des moyens de production sur lesquels ils auraient alors des droits de tirage, ou encore la mise en place d'un observatoire européen de l'électricité qui permettrait de mieux appréhender en temps réel les corrélations entre les prix de l'électricité en Europe.
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