DÉLOCALISATIONS D'ENTREPRISES
M. le président. La
parole est à M. Rodolphe Thomas, pour exposer sa question,
n° 332, relative aux délocalisations d'entreprises.
M. Rodolphe Thomas.
Madame la ministre déléguée à l'industrie, la production industrielle doit être
au coeur des préoccupations françaises. En effet, les suppressions d'emplois
touchent de très nombreux secteurs de l'industrie et plus particulièrement ceux
à forte main-d'oeuvre. Cela s'explique notamment par la concurrence de nombreux
pays étrangers dans lesquels le coût de cette main-d'oeuvre est moins élevé que
dans notre pays. La tentation de la délocalisation est grande, et de nombreuses
entreprises n'y résistent pas. Dans certains secteurs d'activité, elles y sont
d'ailleurs très fortement incitées. J'attire en particulier votre attention sur
les pressions que subissent de nombreuses entreprises sous-traitantes de la part
de grands équipementiers automobiles. Ces derniers n'hésitent pas à leur
demander d'aller s'implanter dans les pays de l'Europe de l'Est, lesquels ne
sont pas aujourd'hui en mesure de fournir une production de haut niveau.
De très nombreuses petites
entreprises, souvent familiales, s'interrogent quant à leur avenir :
doivent-elles aller s'implanter dans les pays d'Europe de l'Est, là où les coûts
de fabrication sont moindres ? Cela pose la question de notre capacité à
conserver durablement une activité de production. Comment préserver les emplois
en France ? Aujourd'hui, des aides financières peuvent être attribuées à des
entreprises désireuses de s'installer à l'étranger pour y conquérir de nouveaux
marchés et y vendre des produits made in France.
Faudra-t-il, demain, franchir un pas supplémentaire et octroyer des aides, comme
certains le demandent déjà, à des entreprises françaises qui feront fabriquer
dans des pays à bas coût de main-d'oeuvre des produits destinés principalement
au marché français ? Madame la ministre, la survie durable des entreprises
françaises passerait-elle par de telles mesures ?
M. le président. La
parole est à Mme la ministre déléguée à l'industrie.
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie. Monsieur le
député, le ralentissement que nous avons subi depuis l'été dernier tient, pour
une large part, aux tensions internationales. Celles-ci ont évidemment pesé sur
la confiance et la demande des entreprises. L'industrie, fortement exposée à
l'international, en pâtit particulièrement. La production industrielle a stagné
au second semestre 2002, avec des conséquences défavorables sur l'emploi :
85 000 pertes d'emploi salarié dans l'industrie sur l'année 2002.
Il convient cependant de noter que
l'activité et l'emploi ont mieux résisté dans le reste de l'économie, en raison
notamment de la bonne tenue de la consommation en services, et que la production
industrielle s'est, en outre, raffermie depuis le début de cette année, en
raison notamment d'un rebond de la consommation de produits manufacturés. Les
dernières enquêtes de conjoncture suggèrent un redémarrage des investissements
industriels cette année - plus 6 % en valeur en 2003, d'après la
dernière enquête de l'INSEE.
Par
ailleurs, il ne faut pas exagérer la concurrence qu'exercent les pays dits à
faible coût de main-d'oeuvre. La faiblesse relative des salaires s'y accompagne
généralement d'une faiblesse relative de la productivité. Bien sûr, je n'ignore
pas les difficultés particulières que rencontrent certains secteurs comme le
textile, mais il faut rappeler que notre industrie continue à bénéficier, dans
l'ensemble, d'un bon niveau de compétitivité extérieure, comme le note un
rapport récent du Conseil d'analyse économique.
J'ajouterai que le ralentissement
conjoncturel récent nous a frappés d'autant plus fort que les réformes qui
s'imposaient n'ont pas été conduites pendant la période de croissance forte dont
la France a profité. Il nous a frappés d'autant plus fort que le gouvernement
précédent n'a eu de cesse d'augmenter les prélèvements et les contraintes
administratives inutiles, cela alors même que ceux-ci régressaient, au
contraire, dans les autres pays européens.
Dans ce contexte, notre priorité est
bien de soutenir durablement l'activité et l'emploi, notamment dans l'industrie,
en réduisant les réglementations inutiles - c'est le sens de
l'assouplissement des 35 heures et de la suspension de la loi dite de «
modernisation sociale » -, en redynamisant la création d'emplois
d'entreprise - c'est notamment le sens du plan de mon collègue Renaud
Dutreil -, en soutenant les mesures contenues dans le plan « innovation »
que j'ai préparé en étroite coopération avec Mme Claudie Haigneré, enfin en
allégeant les charges : la loi de finances de 2003 prévoit près de
3 milliards d'euros d'allégements en faveur des entreprises cette
année - allégements sur les bas salaires, contrats-jeunes, taxe
professionnelle. Cet effort d'allégement, comme vous le savez, monsieur le
député, sera résolument poursuivi en 2004 et les années qui suivront.