Texte de la QUESTION :
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M. Pierre-Louis Fagniez attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le suivi des hommes responsables de violences conjugales. Tandis que certaines statistiques estiment que 420 000 hommes exerceraient des violences sur leur compagne, seulement 300 d'entre eux sont accueillis chaque année dans la demi-douzaine des centres spécialisés pour hommes violents qui existent en France. De surcroît, cette démarche est rarement accomplie spontanément, mais est généralement consécutive au départ de l'épouse. Tandis qu'il reste de coutume en France d'aider les femmes battues, l'accent pourrait davantage porter sur la prévention. À Douai par exemple, les maris violents sont placés d'office sur décision de justice dans un centre d'hébergement afin de prendre conscience de leurs actes. Les résultats sont prometteurs avec un très faible taux de récidive. Il souhaiterait donc savoir s'il pense encourager la généralisation de cette mesure à l'ensemble de notre territoire.
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Texte de la REPONSE :
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Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que le traitement judiciaire des auteurs de violences conjugales constitue une priorité gouvernementale. Sur le plan civil, la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004 relative au divorce instaure un dispositif nouveau pour la protection d'un époux victime de violences conjugales. Celui-ci pourra, avant même de déposer une requête en divorce, saisir en urgence le juge aux affaires familiales pour solliciter, au terme d'une procédure contradictoire, l'éviction du domicile conjugal de son conjoint. Sur le plan pénal, l'éloignement des auteurs de violences conjugales est prévu par la loi à toutes les étapes de la procédure. Au stade pré-sentenciel, dans le cadre d'une comparution par procès-verbal ou d'une ouverture d'information judiciaire, le prévenu peut être placé sous contrôle judiciaire par le parquet avec interdiction de paraître en certains lieux et d'entrer en relation avec la victime par quelque moyen que ce soit. Le non-respect de ces interdictions peut être sanctionné par l'incarcération du conjoint violent. Au stade sentenciel, le tribunal peut assortir la peine d'emprisonnement prononcée à l'encontre du conjoint violent d'une mesure de sursis avec mise à l'épreuve imposant les interdictions susvisées. Au stade post-sentenciel, le non-respect de ces interdictions est susceptible d'entraîner la révocation du sursis avec mise à l'épreuve prononcée par la juridiction de jugement. En outre, la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité prévoit l'obligation pour l'autorité judiciaire compétente d'informer les parties civiles en cas de cessation de l'incarcération de l'auteur de l'infraction dont elles ont été victimes, que cette incarcération découle d'un placement en détention provisoire ou d'une condamnation définitive à une peine d'emprisonnement ferme. Il y a lieu de préciser que cette remise en liberté peut être assortie de l'interdiction pour l'auteur d'entrer en relation avec la victime lorsqu'un tel contact paraît devoir être évité. En application des règles de droit et de procédure susmentionnées et dans un souci de protéger les victimes comme de responsabiliser les auteurs de violences conjugales, de nombreuses pratiques innovantes sont mises en oeuvre par les parquets. L'on peut ainsi citer à titre d'exemples un projet de centre de traitement des auteurs de violences conjugales, l'obligation pour les auteurs de participer à des groupes de parole composés d'un sociologue, d'un psychologue et d'autres auteurs, une action pré-sentencielle en milieu ouvert visant la prise en charge des auteurs de violences conjugales souffrant d'alcoolémie chronique. Afin d'harmoniser ces pratiques sur l'ensemble du territoire national et dans le cadre du conseil national d'aide aux victimes, la création d'un groupe de travail interministériel sur les violences conjugales piloté par le ministère de la justice et réunissant magistrats, médecins, avocats, policiers, gendarmes et associations d'aide aux victimes a été décidée. Ce groupe de travail a pour objectif la réalisation d'un guide de bonnes pratiques à destination des magistrats du siège et du parquet ainsi que de l'ensemble des professionnels concernés.
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