FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 35482  de  M.   Chatel Luc ( Union pour un Mouvement Populaire - Haute-Marne ) QE
Ministère interrogé :  commerce extérieur
Ministère attributaire :  commerce extérieur
Question publiée au JO le :  09/03/2004  page :  1734
Réponse publiée au JO le :  15/06/2004  page :  4457
Date de changement d'attribution :  31/03/2004
Rubrique :  commerce extérieur
Tête d'analyse :  exportations
Analyse :  vins. perspectives
Texte de la QUESTION : M. Luc-Marie Chatel souhaiterait attirer l'attention de M. le ministre délégué au commerce extérieur sur la situation des producteurs nationaux de vins. La baisse des ventes de vin n'est pas limitée au seul marché national, la situation se montre plus préoccupante encore s'agissant des exportations. D'après les chiffres de l'onivins pour l'année 2003, les ventes à l'étranger de vin d'appellation ont enregistré une baisse d'environ 9 %, alors que les vins de pays ont progressé de 7 %. Plusieurs facteurs semblent expliquer ces résultats, forts inquiétants pour de nombreux producteurs français. Un aspect, négligé des débats actuels, mérite toutefois d'être mis en lumière. Dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), l'accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) a consacré, en 1995, une protection spécifique et multilatérale des vins et spiritueux au titre de la propriété industrielle. Cette innovation est le fruit de l'initiative que la France (soutenue par les Communautés européennes et la Confédération Helvétique) a défendu durant les négociations commerciales du cycle de l'Uruguay (1986-1994). Les producteurs peuvent s'opposer à l'utilisation des expressions écrites « genre bordeaux » ou « imitation Calvados ». Ce haut niveau de protection se trouve toutefois affecté par quelques tempéraments. A titre d'exemple, le quatrième aliéna de l'article 24 de l'accord sur les ADPIC a introduit une clause dite du « grand-père » qui épargne les usurpations anciennes aux vins et spiritueux lorsqu'elles ont fait l'objet d'un usage continu et similaire (au minimum dix ans avant l'entrée en vigueur de l'accord). Les indications telles que « Champagne californien » ou « Chablis californien » échappent aussi à la protection multilatérale. Par ailleurs, de nouvelles discussions, sous le contrôle du conseil des ADPIC, se sont ouvertes en 1996 pour créer un système multilatéral de notification et d'enregistrement (SMNE) des indications géographiques pour les vins et les questions en rapport avec les spiritueux. Les Communautés européennes ont proposé l'instauration d'un système d'enregistrement centralisé à l'OMC et destiné à constituer une base mondiale de données. La délégation des États-Unis s'est, entre autres, opposée fermement à ce système. Lors de la conférence ministérielle de Doha, il avait été précisé qu'un accord définitif, sur cet aspect, devait intervenir au plus tard à la 5e conférence ministérielle de Cancun de septembre 2003. L'échec de cette conférence et de la réunion du conseil général de l'OMC qui s'est tenue à Genève en décembre 2003, n'ont pas permis la conclusion d'un accord. Compte tenu de ces éléments qui intéressent directement les producteurs français de vins et spiritueux, il souhaite savoir quelle est la position de la France et quel est le stade d'avancement des négociations du cycle multilatéral du développement sur ce sujet.
Texte de la REPONSE : Le ministre délégué au commerce extérieur est conscient des difficultés que connaissent aujourd'hui les vins français non seulement sur le marché national mais encore sur les marchés extérieurs. Confrontés à la concurrence des vins du Nouveau Monde, nos ventes de vins ont diminué en volume de 3,4 %, avec une forte décrue de mars à septembre. Les vins tranquilles d'appellation ont connu une année 2003 très difficile, avec une perte de plus de 8,6 % par rapport aux volumes réalisés en 2002, tandis que les vins de pays ont progressé de 7 %. En outre, aux États-Unis, la situation des vins français aura été très préoccupante. La conjoncture économique mondiale a accéléré la baisse des exportations et la perte de compétitivité de vins tranquilles, y compris de vins de pays, aggravant leurs difficultés structurelles. Mis à part quelques cas comme les vins de Bordeaux (grands crus 2000), le champagne et le cognac, toutes les autres catégories ont enregistré des pertes comprises entre 15 et 30 %. Le ministre délégué au commerce extérieur a pris la mesure des difficultés que connaissent actuellement les vins français aux États-Unis et il a décidé, en concertation avec la profession, de soutenir les actions de promotion et de commercialisation des professionnels du vin notamment aux États-Unis. Le ministre s'est d'ailleurs rendu à la convention des grossistes à Las Vegas (Wine and Spirits Wholesalers Association) en avril 2004 pour rencontrer les importateurs américains de vins français afin de définir les modalités les plus efficaces de soutien à la promotion et à la commercialisation. La France participera également au salon Vinexpo à Chicago, en juin 2004, considéré aussi comme incontournable dans le secteur des vins et spiritueux. Parallèlement des actions de sensibilisation et d'information ont été organisées en coordination avec UBIFRANCE pour préparer les exportateurs français à l'entrée en vigueur, en décembre 2003, de la loi américaine sur le « bioterrorisme » : organisation d'un séminaire d'information le 22 octobre dernier ; plusieurs réunions en province en partenariat étroit avec les chambres de commerce et d'industrie. Au-delà des opérations de soutien exceptionnelles mises en oeuvre par le ministre délégué au commerce extérieur, il est indispensable de lever les entraves à l'accès au marché et de garantir une meilleure protection des indications géographiques. Le ministre délégué au commerce extérieur rencontre très régulièrement ses homologues du monde entier pour les convaincre de l'importance d'un tel registre. Et la France est évidemment favorable à l'extension de la protection des indications géographiques à d'autres produits. Certains pays sont intéressés et notamment certains pays en développement pour défendre par exemple le riz basmati ou le thé darjeeling. L'accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) de l'OMC prévoit d'ores et déjà que les vins et spiritueux bénéficient d'une protection supérieure à celle des autres produits. C'est pour consolider et renforcer cette protection additionnelle que le cycle de Doha vise la constitution d'un système multilatéral de notification et d'enregistrement des indications géographiques, dont le principe est d'ailleurs déjà inscrit dans I'ADPIC (art. 23-4). Les négociations progressent difficilement et les oppositions restent très marquées entre les États-Unis et l'Australie notamment qui privilégient une base de données informative et sans valeur juridique alors que l'Union européenne recherche une solution juridiquement plus contraignante. Le Gouvernement a d'ailleurs demandé au sénateur de la Manche, M. Jean Bizet, de lui faire des propositions afin de mieux assurer le respect et la promotion des indications géographiques agroalimentaires à l'échelle internationale. L'échec de la conférence ministérielle de Cancun n'offre que de très incertaines perspectives à court et même à moyen terme pour progresser sur le sujet sensible de la protection des indications géographiques à l'échelon multilatéral. Cependant, il reste un des sujets offensifs de l'Union européenne dans le cadre des négociations multilatérales en cours. En outre, celle-ci conserve des ambitions importantes sur la question du registre et de ses effets juridiques. Mais conscient des difficultés de cette, négociation, le ministre délégué au commerce extérieur soutient très fortement les négociations d'accords bilatéraux et régionaux dans le secteur des vins et spiritueux qui permettent de négocier des avancées dans le domaine de la propriété intellectuelle (protection réciproque des indications, géographiques) et d'établir la reconnaissance des pratiques oenologiques (c'est-à-dire les techniques d'élaboration des vins). C'est ainsi que les services du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie suivent avec attention les négociations en cours de l'accord de libre-échange entre l'Union, européenne et les quatre pays du Mercosur qui devra comporter un accord vin très important, en particulier pour obtenir l'élimination des usurpations d'appellations d'origine française en Argentine. Ils suivent également avec intérêt les difficiles négociations de l'accord vin entre l'Union européenne et les États-Unis qui vise plus spécifiquement l'élimination de l'utilisation des semi-génériques (dont l'appellation Champagne) aux États-Unis.
UMP 12 REP_PUB Champagne-Ardenne O