RÉVISION DE LA POLITIQUE AGRICOLE COMMUNE
M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.
M. André Chassaigne.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.
La Commission européenne vient de confirmer ses intentions concernant la révision à mi-parcours de la politique agricole commune, reprenant le dispositif déjà présenté par Franz Fischler en juillet dernier, et rejeté alors par l'ensemble des syndicats agricoles de notre pays. Il propose notamment le découplage des aides par rapport aux produits, avec un paiement par exploitation, unique et transférable, ce qui créerait les conditions d'une très forte réduction de la production dans les régions et les secteurs fragiles, la baisse du prix d'intervention des céréales et du prix de soutien du lait, avec des conséquences graves sur le revenu des producteurs, déjà victimes d'une réduction des prix inacceptables, sans que cela profite au consommateur, un gel des terres par la mise en jachère de 10 % des surfaces, ce qui accentuera la désertification dont souffrent déjà nos zones rurales.
Plus qu'une révision, il s'agit en fait d'une réforme de fond dans un sens ultra-libéral, inféodant davantage encore la politique agricole commune à l'Organisation mondiale du commerce, pour garantir à l'agro-industrie des matières premières à bas prix et augmenter les profits de la grande distribution.
Dans ce contexte, le gouvernement français se doit de préciser sa position.
Maintenez-vous, monsieur le ministre, ce que vous avez affirmé dans cette enceinte le 5 novembre dernier, à savoir : « La PAC est d'ores et déjà assurée de perspectives claires la protégeant de toute remise en cause radicale » ?
Par ailleurs, quelle réponse apportez-vous aux organisations syndicales favorables à une réforme immédiate de la PAC, rejetant à la fois le projet Fischler et le statu quo, et faisant le choix d'une politique agricole fondée sur des prix rémunérateurs et la maîtrise des productions, pour que les paysans puissent vivre dignement de leur métier ? Enfin, quelles mesures comptez-vous préconiser pour que l'Europe s'oppose aux importations abusives, respecte la préférence communautaire et lutte contre la concurrence déloyale des prix mondiaux ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.
M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de
la pêche et des affaires rurales. Monsieur le député, vous avez posé, à fort juste titre, la question du prix mondial en matière agricole. Chacun sait bien que ce prix ne correspond à aucun équilibre, ni économique, ni social, ni environnemental. C'est pourquoi nous refusons ce mythe du prix mondial. C'est vrai chez vous à Saint-Amant-Roche-Savine. C'est vrai à Bruxelles, où je l'ai dit la semaine dernière. C'est vrai aussi à Washington, où je l'ai dit aux autorités américaines que j'ai rencontrées dans le cadre des discussions préparatoires à la négociation devant l'Organisation mondiale du commerce.
Oui, nous avons un modèle agricole européen à défendre, fondé sur des prix équitables et sur une maîtrise des productions. Ne doutez pas, monsieur le député, de notre résolution, dans le cadre de la négociation devant l'Organisation mondiale du commerce, à ne pas céder au tout-libéralisme qui serait destructeur pour notre modèle agricole européen.
S'agissant de la politique agricole européenne, nous avons tracé des perspectives claires à Bruxelles sur le plan budgétaire, puisque les Quinze se sont entendus au mois d'octobre pour fixer un volume de dépenses agricoles entre 2003 et 2013. Pour le reste, nous sommes désormais entrés dans une discussion sur une adaptation de cette politique, qui ne constituera pas une réforme fondamentale. Ce que nous souhaitons, c'est éviter la baisse des prix, comme vous l'avez dit, sur les céréales et sur le lait, et la jachère, mais fortifier le développement rural et refuser le découplage total des aides.
Telle est, monsieur le député, la politique du Gouvernement à cet égard. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie.)