Texte de la QUESTION :
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M. Alfred Marie-Jeanne attire l'attention de Mme la ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies sur les répercussions de la politique en matière de recherche dans les régions de Guadeloupe, de Guyane et de Martinique. La situation des chercheurs est menacée à double titre, d'une part en raison des mesures de politique générale les concernant, d'autre part, en raison de l'excentration par rapport aux courants scientifiques ressentie avec une particulière acuité dans les laboratoires. En premier lieu, l'amputation des crédits de recherche conduit à différer, voire à abandonner certains axes de recherche, à empêcher le renouvellement du personnel après mutation ou départ à la retraite et à provoquer une diminution des capacités d'encadrement et de formation à la recherche. Depuis plusieurs années, les budgets théoriquement accordés aux universités et aux organismes de recherche ne sont, en réalité, plus intégralement versés. Dès lors, le nombre de postes de chercheurs ou d'enseignants-chercheurs titulaires offerts aux concours publics diminuent depuis 2002 au point que les personnes partant à la retraite sont à peine remplacées pour l'année 2004. Sur ces questions liées au budget et au personnel, les mesures préconisées sont le versement des sommes dues aux organismes de recherche au titre des budgets antérieurs, la création de postes de jeunes chercheurs en 2004 et l'initiation d'un collectif budgétaire pour la recherche. En second lieu, dans le contexte de ces régions, la ressource immatérielle a une place primordiale. Or, plusieurs constats s'imposent. Le milieu scientifique évoque le manque de perspective pour les doctorants de l'université des Antilles et de la Guyane, la faible participation des enseignants aux échanges scientifiques et la production scientifique limitée. Malgré les infrastructures universitaires performantes et la qualité des enseignements, la difficulté de susciter l'intérêt des jeunes étudiants pour le troisième cycle dans cette université est patente. Au surplus, le décalage entre les ambitions affichées et la situation réelle des chercheurs en Guadeloupe, en Guyane et en Martinique existe malheureusement. Cela a indéniablement des incidences en matière de recherche et de développement. Le soutien par les collectivités territoriales à l'activité de certains laboratoires scientifiques et certaines initiatives sectorielles ont permis de considérer davantage les nécessités de l'adaptation de la recherche. Mais face à leurs réalités budgétaires, le désengagement de l'État serait mal compris et très mal venu. Il souhaite connaître les mesures prévues en vue d'améliorer notablement la recherche et la situation des chercheurs et scientifiques dans ces régions.
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Texte de la REPONSE :
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Les difficultés budgétaires et de recrutement évoquées ont touché l'ensemble de la recherche nationale. Elles ont trouvé une réponse positive grâce aux mesures annoncées par le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche et le ministre délégué à la recherche dès leurs prises de fonctions dans le nouveau Gouvernement, avec la mise à disposition des crédits antérieurement gelés, mais surtout la restauration des 550 emplois statutaires de chercheurs, d'ingénieurs et de techniciens supprimés en loi de finances initiale 2004, qui ont été rétablis au niveau initialement prévu. De plus, l'annonce d'un contingent supplémentaire de 1 000 recrutements prévus dans l'enseignement supérieur témoigne de la priorité accordée à ce domaine par le Gouvernement pour résoudre positivement la période de crise que nous venons de traverser. En outre, les chercheurs présents dans les départements français d'Amérique (DFA) ne sont nullement tenus à l'écart des courants scientifiques. En effet, l'ouverture naturelle du monde de la recherche, ses modes de fonctionnement en réseaux, la pluridisciplinarité et la complémentarité des actions, combinées aux moyens offerts par les nouvelles technologies de l'information et de la communication, ont supprimé les obstacles qui pouvaient surgir de l'éloignement géographique des équipes. Grâce à ces outils, les DFA sont tout autant au contact des courants scientifiques évoqués que n'importe quelle région de métropole. Par ailleurs, la présence d'établissements publics nationaux de recherche est aussi une garantie scientifique et institutionnelle d'une bonne intégration de ces équipes dans l'activité de recherche au meilleur niveau. Concernant les manques de perspectives en matière d'emploi des doctorants de l'université Antilles-Guyane (UAG), il convient de souligner que, pour la majorité d'entre eux, ils envisagent leur carrière dans l'enseignement supérieur : l'effort consenti pour les recrutements à venir devrait sensiblement améliorer ces perspectives de débouchés. S'agissant de l'insertion des doctorants dans le monde de l'entreprise, il convient de rappeler que le tissu économique spécifique des DFA où prédominent les très petites entreprises pose des problèmes d'adéquation entre l'offre et la demande, tant sur le plan qualitatif que quantitatif. Néanmoins, une initiative récente de l'école doctorale de l'UAG mettant en contact direct les doctorants et les entreprises est porteuse de progrès dans ce domaine. Par ailleurs, pour juger de l'étendue de la production scientifique dans les départements d'outre-mer, il conviendrait de préciser les critères d'évaluation retenus, en rappelant que l'essentiel des activités de recherche développées dans les DFA concerne des sujets appliqués au contexte local et en prise avec la demande économique et sociale donnant moins matière à publications académiques que d'autres types de recherches. Il apparaît au contraire que d'immenses progrès ont été accomplis tant dans le domaine de l'agronomie tropicale, de la santé, de la prévision des risques naturels, de la pêche, de l'aquaculture et de l'environnement, pour ne citer que quelques exemples ; ces avancées, directement profitables aux populations concernées, sont le fruit de recherches menées principalement par les organismes de recherche dont les activités sont conduites en étroite collaboration avec les acteurs économiques locaux. A ce titre, le rôle et le soutien financier indispensable que peuvent apporter les collectivités territoriales sont fondamentaux. S'agissant, enfin, des mesures susceptibles d'améliorer la situation des chercheurs et des activités de recherche outre-mer, il faut rappeler qu'indépendamment des spécificités de ces régions, les recherches qui s'y déroulent font l'objet d'un tout non seulement national, mais européen, et la Commission européenne n'a pas manqué de s'intéresser au potentiel de recherche et développement des régions ultrapériphériques dans une remarquable étude parue en 2002. La situation décrite et l'analyse qui en est faite démontrent le potentiel, la valeur ajoutée et les performances des recherches développées outre-mer, Antilles-Guyane comprises, même si de nombreux domaines peuvent être naturellement améliorés. Le Président de la République et le Gouvernement ont réaffirmé le caractère prioritaire que la recherche-développement revêt pour la France : les mesures lancées à la fin de l'année 2003 conjointement par le ministère chargé de la recherche et le ministère chargé de l'industrie dans le cadre du plan innovation, les mesures récemment annoncées sur les recrutements et la mise à niveau actuelle et future des moyens de la recherche, la mobilisation du monde scientifique dans la perspective de la loi d'orientation et de programmation de la recherche, qui sera soumise au Parlement à l'automne prochain, sont autant d'éléments permettant de constater les améliorations apportées dans le cadre d'une politique nationale et communautaire, dont les DFA sont partie intégrante, consistant, à l'horizon 2010, à consacrer 3 % du PIB aux dépenses de recherche et de développement.
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