Texte de la QUESTION :
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M. Jean-Luc Préel interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la surtaxation de succession entre époux. Le veuvage est un drame humain majeur. Il induit de graves conséquences financières. Alors que les frais fixes (loyer etc.) demeurent inchangés, les ressources diminuent fortement. La loi de décembre 2001 avait légitimement renforcé les droits du conjoint survivant en lui conférant automatiquement l'usufruit des biens du conjoint décédé ou un quart en pleine propriété. Au contraire, la loi de finances pour 2004 vient d'augmenter fortement les droits de succession entre époux par un abaissement du seuil. Ainsi, les survivants âgés de soixante et un à soixante-dix ans seront taxés à partir de 190 000 euros (un deux pièces à Paris). Ce choix de taxer l'usufruit au moment où le conjoint survivant entre dans une ère de fragilité est vécu comme illégitime et contre-productif. La solution envisagée pourtant par le ministère n'est certainement pas un changement de régime matrimonial. Un changement pour simple motif fiscal n'est pas légitime. De plus, cette modification est longue et peu opératoire (accord des enfants, familles recomposées...). En conséquence, il lui demande si le Gouvernement ne pourrait pas au contraire alléger, ou mieux supprimer, les droits de succession entre époux et si cette suppression ne serait pas la bonne réponse technique et politique à un drame humain et financier.
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Texte de la REPONSE :
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La loi du 3 décembre 2001 relative aux droits du conjoint survivant accorde au conjoint survivant de nouveaux droits en matière successorale. Ainsi, en présence d'enfants issus des deux époux, le conjoint survivant a la faculté d'opter pour l'usufruit de la totalité des biens de la succession ou pour un quart de ces biens en pleine propriété. Par ailleurs, le conjoint survivant a désormais la garantie d'une jouissance gratuite pendant un an de l'habitation qu'il occupait à titre principal avec son époux et dispose sur ce même bien et sauf volonté contraire du défunt d'un droit viager d'habitation. S'agissant des droits de succession, la loi de finances pour 2004 a actualisé le barème fixant les valeurs respectives de l'usufruit et de la nue-propriété. Cette réforme était souhaitée de longue date par le Parlement et les professionnels. En effet, les valeurs respectives de l'usufruit et de la nue-propriété étaient jusqu'au 31 décembre 2003 fixées par un barème datant de 1901. L'archaïsme de ce barème conduisait à la surtaxation des enfants en cas de succession ou de donation. La loi de finances pour 2004 permet désormais une plus juste évaluation des parts transmises respectivement aux usufruitiers et aux nu-propriétaires, prenant acte de la constante augmentation de l'espérance de vie. Ce nouveau barème est sans effet sur le montant global des droits dus sur une succession. À ce titre, plus de 85 % des successions entre conjoints ne donnent lieu à aucune taxation. En outre, un conjoint survivant âgé de soixante-douze ans qui reçoit l'usufruit total de la succession n'est taxable que si le patrimoine commun des époux excède 500 000 euros. Toutefois, l'augmentation de la valeur de l'usufruit du conjoint survivant peut, effectivement, dans certains cas, donner lieu à une taxation accrue mais celle-ci n'est que la contrepartie de la baisse de la taxation de la nue-propriété dont bénéficient les enfants. En effet, le Gouvernement a fait le choix de favoriser la transmission des patrimoines aux générations nouvelles en vue de favoriser la transmission anticipée des patrimoines. Par ailleurs, en cas de difficultés pour acquitter les droits résultant de la déclaration de succession, un régime légal de paiement fractionné d'une durée de cinq ans est applicable. Cette durée est portée à dix ans pour les droits à la charge du conjoint du défunt lorsque l'actif héréditaire comprend, à concurrence de 50 % au moins, des biens non liquides tels que les immeubles. Enfin, la suppression totale des droits de mutation à titre gratuit entre époux entraînerait une perte budgétaire pour l'État, ce qui n'est pas envisageable compte tenu des contraintes budgétaires actuelles.
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