FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 36736  de  M.   Perruchot Nicolas ( Union pour la Démocratie Française - Loir-et-Cher ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  30/03/2004  page :  2435
Réponse publiée au JO le :  01/06/2004  page :  4098
Date de changement d'attribution :  31/03/2004
Rubrique :  droit pénal
Tête d'analyse :  libération conditionnelle
Analyse :  expertises préalables
Texte de la QUESTION : M. Nicolas Perruchot souhaite attirer l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les carences des expertises encadrant la libération conditionnelle d'un détenu. S'il ne s'agit pas ici de faire le procès d'un dispositif judiciaire qui a fait ses preuves, il reste que l'on peut parfois s'interroger sur le bien-fondé de l'octroi de cet allégement de peine. En effet, il arrive encore trop souvent que l'individu libéré sous condition, et tout juste sorti de prison, soit de nouveau l'auteur d'un crime. Il convient donc aujourd'hui de remédier efficacement à cette faille de la justice française en palliant les carences d'un tel dispositif. Il lui demande ainsi de bien vouloir lui indiquer quelles alternatives seraient envisageables pour combler l'insuffisance des expertises menées en amont, censées éviter tout risque de récidive après une libération conditionnelle.
Texte de la REPONSE : Le garde des sceaux, ministre de la justice fait connaître à l'honorable parlementaire que la prévention de la récidive est au centre des préoccupations du ministère de la justice et que, tout comme lui, il considère que la libération conditionnelle, en évitant une sortie sans préparation et sans contrôle judiciaire, est un outil important pour prévenir la récidive. En ce sens, l'expertise psychiatrique, diligentée en amont de la décision d'octroi d'une libération conditionnelle, est effectivement un des éléments permettant de connaître la dangerosité de la personne et le risque éventuel de récidive. Dans ce souci de prévenir toute commission de nouvelle infraction dans le cadre d'un aménagement de peine, l'arsenal législatif actuel rend obligatoire le recours à l'expertise psychiatrique dans un nombre non négligeable de cas. Ainsi, sur la délicate question des délinquants sexuels, la loi du 1er février 1994 puis celle du 17 juin 1998 ont complété l'article 722 du code de procédure pénale relatif aux mesures d'aménagement de peine en indiquant que les personnes condamnées pour meurtre et assassinat précédés de viol, tortures ou actes de barbarie perpétrés à l'encontre d'un mineur, ou pour viol simple ou aggravé, agression sexuelle ou atteinte sexuelle ne peuvent se voir accorder une mesure d'aménagement de peine ou une permission de sortir sans expertise psychiatrique préalable. L'expertise doit être réalisée par trois experts lorsque la personne a été condamnée pour viol, meurtre ou assassinat d'un mineur de 15 ans. Dans les autres cas, la faculté laissée au juge de l'application des peines de diligenter une expertise lorsqu'il l'estime nécessaire est amplement utilisée, en particulier pour les longues peines et quelle que soit l'infraction à l'origine de la condamnation. Il n'en demeure pas moins que le garde des sceaux est conscient que le recours à l'expertise psychiatrique n'a de sens que si l'expertise est de qualité. Un groupe de travail mené par le ministère de la justice et le ministère de la santé a d'ailleurs récemment souligné dans un rapport sur « la prise en charge des auteurs d'infractions sexuelles soumis à une injonction de soins dans le cadre d'une mesure de suivi socio-judiciaire » la nécessité d'améliorer la qualité et la pratique des expertises pénales. En effet, les autorités judiciaires font régulièrement face à un manque d'experts psychiatres spécialisés dans le domaine de l'expertise pénale, et plus spécifiquement en matière de délinquance sexuelle. Dans ces conditions, le ministère de la justice et le ministère de la santé ont conjointement décidé la mise en place d'un groupe de travail thématique, composé principalement de magistrats, de conseillers d'insertion et de probation, de psychiatres et de psychologues, en charge de clarifier les objectifs et les champs de l'expertise psychiatrique et psychologique. Il devra également définir concrètement un protocole d'expertise pénale incluant les éléments d'information attendus par les magistrats. Enfin, il fera toute proposition visant à remédier au manque d'experts psychiatres. Toutefois, si l'expertise psychiatrique apporte à l'autorité judiciaire un éclairage sur la personnalité du condamné, le juge de l'application des peines ou la juridiction régionale de la libération conditionnelle ne sont pas liés par les conclusions de l'expertise et s'appuient sur de nombreux autres éléments pour fonder leur décision : audition des victimes, caractère adapté du projet de sortie, enquête sur le contrat de travail et sur l'hébergement, comportement en détention. Plus généralement, la prévention de la récidive dans le cadre des aménagements de peine se fonde également sur le renforcement du contrôle judiciaire à l'issue de l'incarcération. La durée de la libération conditionnelle ne pouvant pas être supérieure à la durée de la peine non exécutée prolongée d'un an, dans un maximum de 10 ans, la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité a ouvert à la juridiction de jugement la possibilité d'allonger la durée du suivi socio judiciaire qui pourra utilement prendre la suite des mesures d'aide et de contrôle de la libération conditionnelle et ainsi soumettre le condamné à un contrôle le plus long possible.
UDF 12 REP_PUB Centre O