FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 370  de  M.   Paillé Dominique ( Union pour un Mouvement Populaire - Deux-Sèvres ) QOSD
Ministère interrogé :  agriculture, alimentation et pêche
Ministère attributaire :  agriculture, alimentation et pêche
Question publiée au JO le :  26/05/2003  page :  3974
Réponse publiée au JO le :  28/05/2003  page :  4244
Rubrique :  commerce et artisanat
Tête d'analyse :  grande distribution
Analyse :  relations avec les fournisseurs
Texte de la QUESTION : Les relations entre producteurs et la grande distribution ont besoin d'une plus grande transparence. Or, force est de constater, dans ce domaine, que les dérives ont conduit les organisations agricoles à engager des actions sur le terrain, dénonçant « le racket de la grande distribution ». Le Gouvernement a annoncé de nouvelles mesures et a renforcé depuis la fin de l'année passée les contrôles initiés par la DGCCRF. Cependant aucun dossier ne semble avoir encore été examiné par la commission d'examen des pratiques commerciales. D'aucuns s'interrogent sur sa réelle utilité. Néanmoins, des procédures judiciaires sont en cours dans plus de la moitié des départements. Toutes les enseignes sont concernées. Les faits portent sur la surpénalisation des conditions générales de vente, l'absence de contrats de coopération commerciale, le paiement avant prestation, la facturation de services fictifs ou disproportionnés... Aujourd'hui, le renforcement des procédures de contrôle apparaît incontournable car, par crainte de déréférencement, peu de fournisseurs se hasardent encore dans des procédures au résultat incertain. M. Dominique Paillé demande à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales de lui indiquer l'évolution de ce dossier, notamment au regard de l'aboutissement des procédures en cours et s'il envisage des mesures nouvelles pour garantir la clarification des relations commerciales, mieux faire appliquer le droit de la concurrence, sanctionner toutes les pratiques abusives et ainsi redonner confiance aux consommateurs et agriculteurs afin que ces derniers puissent vivre décemment de leur travail.
Texte de la REPONSE :

RELATIONS COMMERCIALES
ENTRE LA GRANDE DISTRIBUTION
ET SES FOURNISSEURS

    M. le président. La parole est à M. Dominique Paillé, pour exposer sa question, n° 370, relative aux relations commerciales entre la grande distribution et ses fournisseurs.
    M. Dominique Paillé. Monsieur le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, je souhaite vous interroger sur les relations entre les producteurs agricoles et la grande distribution. Ce domaine qui relève tout à la fois de votre compétence et de celle de votre collègue Renaud Dutreil.
    Ces relations souffrent à l'évidence d'un certain nombre de dérives auxquelles les organisations agricoles, quelles qu'elles soient, se sont violemment opposées par des actions spectaculaires sur le terrain, dénonçant ce qu'elles appellent « le racket de la grande distribution ».
    Le Gouvernement a annoncé des mesures nouvelles et a renforcé, depuis l'année passée, les contrôles exercés par la DGCCRF. Pourtant, aucun dossier n'a jamais, à ma connaissance, été étudié par la commission d'examen des pratiques commerciales, au point que certains en viennent à s'interroger sur la réelle utilité de cette instance. Des procédures judiciaires sont néanmoins en cours dans plus de la moitié des départements. Toutes les enseignes sont concernées ; les faits portent sur la surpénalisation des conditions générales de vente, l'absence de contrats de coopération commerciale, le paiement avant prestation, la facturation de services fictifs ou disproportionnés, et bien d'autres sujets encore.
    Le renforcement des procédures de contrôle apparaît aujourd'hui incontournable et même indispensable. Par crainte de se voir déréférencer, nombre de fournisseurs hésitent à se hasarder dans des procédures aux résultats très incertains. Pouvez-vous, monsieur le ministre, vous informer sur l'évolution de ce dossier, notamment au regard de l'aboutissement des procédures en cours, et nous indiquer si le Gouvernement envisage de prendre des mesures nouvelles pour garantir la clarification des relations commerciales, mieux faire appliquer le droit à la concurrence, sanctionner toutes les pratiques abusives et redonner ainsi confiance aux consommateurs comme aux agriculteurs producteurs, afin que ces derniers aient le sentiment de pouvoir décemment vivre de leurs productions ?
    M. Michel Hunault et M. Mansour Kamardine. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.
    M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Monsieur le député, vous soulevez là un sujet de préoccupation constant dans mon action à la tête du ministère chargé de l'agriculture, sujet que je partage avec le secrétaire d'Etat chargé de la consommation, et dont le conflit de la fin de l'année entre le monde agricole et la grande distribution a rappelé l'extrême sensibilité.
    Ainsi que vous le savez, la loi du 15 mai 2001 sur les nouvelles régulations économiques a fait évoluer le cadre de notre action. Le respect des dispositions du titre II relatif à la moralisation des pratiques commerciales a fait l'objet de contrôles effectués par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, sous forme d'une enquête nationale sur les caractéristiques de la coopération commerciale. Cette enquête a permis de collecter des informations auprès de toutes les centrales de référencement et d'achat pour la période de 1999 à 2003, et auprès de plus de deux cents fournisseurs dans quarante-six départements. Les rapports d'enquête ont été exploités et ont déjà donné lieu à dix-neuf assignations en cours relevant du droit civil et regroupant des pratiques systématiques contraires à la loi, ainsi qu'à deux cent cinquante procès-verbaux.
    S'agissant de la commission d'examen des pratiques commerciales, sa composition, conformément au souhait de la profession agricole, a été élargie et garantit désormais une représentation directe des producteurs agricoles. Composée également de parlementaires et de représentants des administrations, cette instance a pour fonction d'observer l'évolution de ces pratiques, d'identifier celles qui sont abusives et de favoriser l'adoption de pratiques contractuelles équilibrées. Elle a, à ce titre, récemment transmis ses préconisations sur le projet de circulaire relatif à la négociation commerciale.
    Cette circulaire, publiée par mon collègue Renaud Dutreil le 25 mai dernier, a pour objectif, en redonnant un espace de négociation entre les partenaires, de revenir sur les dérives constatées sur les marges arrière et de mieux les contrôler à l'avenir.
    S'agissant du droit de la concurrence dans les relations commerciales avec la production agricole, le Sénat, lors de sa séance du 27 mars 2003, a adopté plusieurs amendements au projet de loi sur l'initiative économique. Il a notamment inséré un article additionnel instaurant un nouveau dispositif visant à interdire les prix de cession abusivement bas, désormais considérés comme un délit civil, en particulier lorsqu'ils sont pratiqués en situation de crise conjoncturelle des produits agricoles sensibles, telle que définie dans le code rural.
    Ce dispositif consiste à introduire une action en responsabilité et réparation du préjudice subi devant le tribunal compétent. Les ministres en charge de l'agriculture et de l'économie peuvent demander le prononcé d'une amende civile de 2 millions d'euros maximum, au nom du trouble apporté à l'ordre public économique. La notion de prix abusivement bas sera appréciée par le juge au regard notamment du coût de production des produits.
    L'objectif de ce nouveau dispositif est de protéger les agriculteurs contre les pratiques tarifaires prédatrices mettant en péril la survie des exploitations agricoles en période de crise conjoncturelle. Sont visés le vendeur mais aussi l'acheteur qui fait pratiquer ces prix abusivement bas.
    Grâce à ce dispositif et à plusieurs autres amendements dont j'espère que l'Assemblée nationale confirmera l'adoption, notamment pour l'amélioration et l'extension des dispositions prévues par la loi NRE, les engagements que nous avons pris avec le secrétaire d'Etat chargé de la consommation au nom du Gouvernement, à la fin de l'année dernière, seront tenus. Nous disposerons d'instruments nouveaux qui nous permettront de mieux répondre aux difficultés récurrentes rencontrées par le secteur des produits frais. Ainsi, l'intérêt de l'agriculteur rejoindra celui du consommateur.
    Parmi toutes ces dispositions sur lesquelles l'Assemblée nationale aura l'occasion de se prononcer dans les semaines qui viennent, il en est une particulièrement importante qui concerne les interprofessions. En effet, moraliser et rendre plus équitables les relations entre la production et la distribution suppose évidemment d'appliquer efficacement les différents, textes, notamment ceux qui résultent de la loi sur les nouvelles relations économiques ; mais cela suppose aussi, du côté de la production, un effort pour mieux organiser des filières qui, en l'état actuel des choses, le sont fort mal. L'outil législatif dont nous serons désormais dotés nous permettra précisément de renforcer ces interprofessions.
    Tels sont, monsieur le député, les quelques éléments de réponse que je voulais vous apporter.
    M. Michel Hunault et M. Mansour Kamardine. Très bien !

UMP 12 REP_PUB Poitou-Charentes O