FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 37397  de  M.   Dupré Jean-Paul ( Socialiste - Aude ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  13/04/2004  page :  2915
Réponse publiée au JO le :  14/11/2006  page :  11957
Date de changement d'attribution :  02/06/2005
Rubrique :  système pénitentiaire
Tête d'analyse :  établissements
Analyse :  conditions de détention
Texte de la QUESTION : M. Jean-Paul Dupré attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation préoccupante de nos établissements pénitentiaires. Avec 61 032 personnes incarcérées à la date du 1er mars 2004, le nombre de détenus dans les prisons françaises a atteint un nouveau record. Le taux d'occupation des établissements, déjà élevé en février (124,5 %), est devenu préoccupant en mars (126 %). Dans certains établissements, le taux d'occupation serait même supérieur à 200 % indique-t-on de source syndicale : 220 % à Bayonne, 226 % à Loos, 235 % à Toulon. Cette situation a valu à la France d'être sévèrement stigmatisée par le comité anti-torture (CPT) du Conseil de l'Europe, qui dénonce par ailleurs des conditions de détention qui s'apparentent à « un traitement inhumain et dégradant ». Outre les risques qu'elle comporte en matière de sécurité, en particulier pour les personnels de l'administration pénitentiaire, cette situation est parfaitement indigne d'un pays comme le nôtre. Il lui demande donc quelles mesures urgentes il compte mettre en oeuvre pour y remédier.
Texte de la REPONSE : Le garde des sceaux, ministre de la justice informe l'honorable parlementaire qu'il partage sa préoccupation quant à la situation des personnes détenues au regard des conséquences de la surpopulation des établissements pénitentiaires. Mais il n'est pas conforme à la réalité de parler de situation parfaitement indigne d'un pays comme la France pour l'ensemble des établissements pénitentiaires en généralisant comme tel ou tel rapport orienté le fait. Les établissements pour peine, c'est-à dire ceux qui accueillent les détenus condamnés à des peines de plus d'un an, fonctionnent dans de bonnes conditions et ne connaissent pas de surpopulation. Les difficultés rencontrées concernent certaines maisons d'arrêt qui accueillent des prévenus, des détenus condamnés à de courtes peines et des détenus en attente d'affectation dans les établissements pour peine. La principale réponse apportée est la construction de places supplémentaires, afin de supprimer le surencombrement que connaissent certains établissements pour offrir des conditions d'hébergement décentes et respectueuses de la dignité des personnes. À cet effet, un effort sans précédent a été consenti depuis la loi n° 2002-1138 d'orientation et de programmation pour la justice (LOPJ) du 9 septembre 2002 qui comporte diverses dispositions relatives à la mise en oeuvre d'un programme de construction d'établissements pénitentiaires avec la création de 13 200 places. Ces investissements permettront de disposer à partir de 2008 - 2009 du nombre de places adapté aux besoins de notre société. En attendant la livraison des 13 200 places programmées dans la LOPJ, un dispositif d'accroissement de la capacité d'accueil des établissements actuels a été engagé depuis 2 ans. L'amélioration des conditions de détention constitue le second axe majeur de la LOPJ. La volonté exprimée à cet égard par le législateur se décline en une série de mesures destinées à améliorer les conditions de détention et à optimiser la prise en charge des détenus, notamment pour leur préparation à la sortie. Ainsi la LOPJ prévoit la création d'unités hospitalières psychiatriques sécurisées (UHSA) en établissement de santé pour permettre la prise en charge des détenus dont les facultés mentales sont altérées. Ces nouvelles unités, dont les premières devraient ouvrir en 2008, sont au carrefour de deux impératifs, l'humanisation, avec une prise en charge adaptée sur le plan médical, et la sécurité, afin d'éviter les évasions de détenus depuis les hôpitaux psychiatriques. De même, pour les soins somatiques, huit unités hospitalières sécurisées interrégionales (UHSI) sont prévues, quatre sont à ce jour opérationnelles. L'administration pénitentiaire participe à leur fonctionnement avec le concours des personnels sanitaires et des forces de l'ordre sans que l'impératif de sécurité ne heurte celui de la qualité des soins. S'agissant des conditions d'exercice du droit de visite pour les familles, le Garde des Sceaux réaffirme qu'il porte une grande attention à cette question, le maintien des liens familiaux constituant un élément important de réinsertion sociale. En conséquence, le ministère de la justice poursuit ses efforts en vue d'améliorer les conditions matérielles d'accueil des familles visitant leurs proches incarcérés, notamment par l'aménagement d'espaces enfant au sein des parloirs. Par ailleurs, l'administration pénitentiaire développe un partenariat avec les acteurs associatifs tant à l'échelon national que sur le plan local. Enfin, depuis 2003, le ministère de la justice a créé, à titre expérimental, des unités de visites familiales (UEVF). Trois sites expérimentaux ont été retenus : le centre pénitentiaire pour femmes de Rennes (ouverture en septembre 2003), la maison centrale pour hommes de Saint-Martin-de-Ré (ouverture en avril 2004) et celui de la maison centrale de Poissy (ouverture en décembre 2005). Ce dispositif permet aux personnes détenues condamnées à de longues peines et ne bénéficiant pas de permissions de sortir, de recevoir pendant plusieurs heures, voire plusieurs jours, les membres de leur famille dont leurs enfants, dans des conditions satisfaisantes d'intimité. Le bilan de cette expérience s'est révélé très probant, tant aux personnes détenues qui en bénéficient avec leur famille, qu'aux personnels des établissements concernés. Il a donc été décidé de pérenniser ce dispositif et de l'étendre à d'autres établissements pour peine. Ainsi, dès septembre 2006, des unités de visites familiales ouvriront dans quatre nouveaux établissements : les centres de détention ou quartiers centres de détention d'Avignon-Le Pontet, Liancourt, Meaux-Chauconin et Toulon-La Farlède. En outre, ce dispositif sera intégré dans la conception des futurs programmes immobiliers pénitentiaires. Parallèlement, la prison ne pouvant constituer la seule réponse pénale à la délinquance, le ministère de la justice s'est résolument engagé dans une politique de dynamisation des aménagements de peine. La loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, a réformé en profondeur le régime de l'application des peines et introduit des dispositions de nature à encourager ces mesures. Entre 1993 et 2003, 15 000 aménagements de peine étaient en moyenne régulièrement prononcés. La politique volontariste développée par l'administration pénitentiaire auprès des magistrats a permis de constater une augmentation de 16 % entre l'année 2003 et l'année 2004, puis à nouveau une nouvelle augmentation de 6 % entre l'année 2004 et l'année 2005 (19 141 aménagements de peines ont été accordés en 2005). Le placement sous surveillance électronique a été notamment développé et au 1er août 2006, 12040 personnes ont bénéficié de cette mesure depuis son expérimentation en octobre 2000.
SOC 12 REP_PUB Languedoc-Roussillon O