FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 383  de  Mme   Saugues Odile ( Socialiste - Puy-de-Dôme ) QOSD
Ministère interrogé :  affaires sociales, travail et solidarité
Ministère attributaire :  affaires sociales, travail et solidarité
Question publiée au JO le :  02/06/2003  page :  4140
Réponse publiée au JO le :  04/06/2003  page :  4383
Rubrique :  emploi
Tête d'analyse :  emplois jeunes
Analyse :  aides-éducateurs. perspectives
Texte de la QUESTION : Mme Odile Saugues attire l'attention de M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité sur les conséquences de la suppression des emplois-jeunes et des aides-éducateurs, notamment dans les quartiers urbains les plus fragiles socialement. Ainsi, dans le quartier de la Gauthière à Clermont-Ferrand, de nombreuses actions ont pu voir le jour grâce à la présence de trente-deux emplois jeunes ou aides-éducateurs, dont seize sont présents en permanence sur le quartier, dans les associations et les établissements scolaires. Des ateliers informatiques ont vu le jour, des échanges internationaux se sont développés, le partenariat avec les associations du quartier et entre les associations et les écoles a été conforté, des animations culturelles ont été mises en place, la surveillance et la sécurité ont été accrues, notamment dans les deux écoles et le collège du quartier, tous classés en zone d'éducation prioritaire. De nombreux projets ont pu se concrétiser grâce à ces aides-éducateurs et emplois et ont été financés par les collectivités locales et les services de l'Etat. La disparition de ces emplois va non seulement pénaliser ces jeunes et leurs familles, mais elle porte atteinte à l'équilibre du quartier et remet en cause des activités et des services qui étaient reconnus et appréciés de tous les habitants qui souffrent d'un certain isolement. Alors que le Gouvernement entend poursuivre la politique de la ville, en réactivant les zones franches pour tenter d'encourager les activités économiques, malgré les effets d'aubaine que l'on connaît, elle lui demande de lui indiquer pourquoi les activités associatives, culturelles et éducatives ne bénéficient pas de la même considération.
Texte de la REPONSE :

CONSÉQUENCES DE LA SUPPRESSION
DES EMPLOIS-JEUNES
ET DES AIDES-ÉDUCATEURS

    M. le président. La parole est à Mme Odile Saugues, pour exposer sa question, n° 383, relative aux conséquences de la suppression des emplois-jeunes et des aides-éducateurs.
    Mme Odile Saugues. Madame la ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle, les emplois-jeunes ont particulièrement démontré leur utilité dans les secteurs urbains les plus fragiles et chacun d'entre nous sait très bien que, pour encourager la mise en place d'une politique de la ville volontariste, le facteur humain est déterminant. Grâce à ce dispositif, de nombreuses associations qui oeuvrent dans les quartiers les plus démunis de nos villes ont pu multiplier, d'ailleurs avec le soutien de l'Etat et des collectivités locales, les missions de prévention, de réinsertion, d'animation, d'accompagnement, qui ont rencontré un vif succès. Ces emplois ont souvent permis de fédérer de nombreuses actions, qui, bien souvent, n'étaient pas suffisamment coordonnées. C'est aussi le cas pour les aides-éducateurs. Tous les élus qui ont, dans leur circonscription, des établissements classés en zone d'éducation prioritaire savent très bien le travail formidable effectué par ces jeunes et le soutien qu'ils ont apporté aux équipes enseignantes.
    Je prendrai pour seul exemple le quartier de la Gauthière à Clermont-Ferrand, que je connais tout particulièrement pour y avoir vécu vingt-sept ans. Avec l'aide de trente-deux emplois-jeunes ou aides-éducateurs, dont seize sont présents en permanence dans le quartier, au sein des associations et des établissements scolaires, de nombreuses actions ont pu y voir le jour : des ateliers informatiques ont été créés, des échanges internationaux se sont développés, le partenariat avec les associations du quartier et celui entre les associations et les écoles ont été confortés, des animations culturelles ont été mises en place, la surveillante et la sécurité ont été accrues, notamment dans les deux écoles Jean-de-La Fontaine et Charles-Perrault ainsi qu'au collège de La Charme, tous classés en zone d'éducation prioritaire.
    La disparition programmée de ces emplois va non seulement pénaliser ces jeunes et leurs familles, mais aussi porter atteinte à l'équilibre du quartier en remettant en cause des activités et des services qui étaient reconnus et appréciés de tous les habitants qui souffraient d'un certain isolement. Alors que le Gouvernement entend poursuivre la politique de la ville en réactivant les zones franches pour tenter d'encourager les activités économiques - malgré les effets d'aubaine que l'on connaît - comment entend-il conforter dans nos quartiers les activités associatives, culturelles et éducatives s'il décide de supprimer les moyens humains qui portaient ces actions ?
    M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle.
    Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. Madame la députée, le Gouvernement a abordé avec pragmatisme les suites à donner au programme « Nouveaux services emplois-jeunes », soucieux, avant toute chose, du sort des jeunes qui s'y étaient engagés. Sa décision d'arrêter les nouvelles entrées est justifiée, vous le savez, d'abord par le coût du programme - plus de trois milliards d'euros chaque année, en pleine charge - et surtout par le fait que celui-ci ne s'adressait pas aux jeunes qui rencontraient les plus grandes difficultés d'accès à l'emploi. C'est la raison pour laquelle ce programme n'a pas été en mesure de contre-carrer la reprise du chômage des jeunes, observée dès 2001, contrairement aux contrats jeunes en entreprise, mis en place dès cet été.
    Pour autant, cette décision ne peut pas être considérée comme une marque de désintérêt de la part du Gouvernement - loin s'en faut - ni comme un abandon des 150 000 jeunes encore concernés. Le poids budgétaire de ce programme dans la loi de finances 2003, qui s'élève à 2,7 milliards d'euros, l'atteste suffisamment. Ainsi, les conventions en cours d'exécution iront à leur terme. Cette mesure vaut évidemment pour les aides-éducateurs auxquels vous faisiez référence. En ce qui concerne les fonctions sans aucun doute utiles que remplissent les aides-éducateurs, je vous rappelle qu'à l'initiative de mon collègue Luc Ferry, le Gouvernement mettra en place, dès l'année prochaine, un nouveau dispositif d'assistant d'éducation. Celui-ci est destiné, dans des conditions plus satisfaisantes que celles des emplois-jeunes, à organiser de façon pérenne la prise en charge de ces besoins de l'éducation nationale : statut permanent, et non limité à cinq ans, comme l'était le programme emplois-jeunes ; contrat de droit public pour éviter une confusion des genres public/privé, comme dans le cas des aides-éducateurs ; contrat de trois ans renouvelable une fois.
    Par ailleurs, le Gouvernement mettra en place cette année le « contrat d'insertion dans la vie sociale », qui permettra notamment à des jeunes en difficulté d'acquérir une première expérience professionnelle reconnue, en travaillant pendant trois ans dans des associations d'utilité sociale. Voilà, madame, les éléments que je suis en mesure de vous apporter.
    M. le président. La parole est à Mme Odile Saugues.
    Mme Odile Saugues. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse, qui hélas ! ne me surprend guère. Vous avez parlé de pragmatisme et de coût du programme. Ces mots difficiles à entendre, je les transmettrai aux trente-deux jeunes qui m'ont mandatée aujourd'hui ainsi qu'aux 900 habitants signataires de la pétition.
    Au passage, je voudrais souligner que faire signer une pétition par 900 habitants, c'est-à-dire 15 % environ de la population d'un quartier que l'on dit difficile, marqué par des difficultés économiques et l'émergence de phénomènes communautaristes, montre que la solidarité n'est pas un vain mot et peut mobiliser des énergies.
    Mais votre réponse n'est pas à la hauteur de l'enjeu, à la hauteur de la très grande angoisse et du malaise que connaissent le mouvement associatif, le milieu scolaire et périscolaire : inquiétude des professionnels proches de l'enseignement, comme ceux des CIO, les centres d'information et d'orientation ; menaces sur les associations qui interviennent en complément du service de l'enseignement public, la réduction des inégalités sociales et culturelles passant par un travail en liaison avec les jeunes dans les quartiers ; inquiétude aussi à propos du logement, puisque, vous le savez, les gels des crédits correspondants pénalisent beaucoup les bailleurs sociaux. Ce sont autant de soucis qui cristallisent autour des problèmes que je viens d'évoquer et sur lesquels ma question, qui concerne un sujet particulier, focalise l'attention.
    En tout état de cause, je reste convaincue que le Gouvernement devra, dans l'urgence, apporter des réponses à la mesure des enjeux, parce que les acteurs de terrain se sentent vraiment délaissés.

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