FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 38836  de  M.   Jung Armand ( Socialiste - Bas-Rhin ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  11/05/2004  page :  3420
Réponse publiée au JO le :  06/07/2004  page :  5170
Rubrique :  justice
Tête d'analyse :  procédure
Analyse :  audition des enfants. mise en oeuvre
Texte de la QUESTION : M. Armand Jung appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le droit fondamental de l'enfant à être entendu en justice. L'article 12 de la convention de New York, adoptée par l'assemblée générale des Nations unies le 20 novembre 1989, et l'article 3 de la convention européenne sur l'exercice des droits de l'enfant, adoptée par le Conseil de l'Europe le 19 avril 1996, consacrent le droit de l'enfant à être entendu en justice. Force est de constater que ce droit fondamental de l'enfant est d'une particulière acuité dans les procédures judiciaires ayant trait aux conséquences du divorce des parents, où l'intérêt supérieur de l'enfant doit être pris en considération. Cependant, il semblerait que le principe de l'audition de l'enfant en justice ne soit pas pleinement mis en oeuvre dans notre pays, au regard notamment des textes internationaux hissant cet impératif au rang de droit fondamental. En conséquence, il souhaite recueillir son sentiment à ce sujet.
Texte de la REPONSE : Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire qu'aux termes de l'article 388-1 du code civil, introduit par la loi n° 93-22 du 8 janvier 1993, le mineur capable de discernement peut, dans toute procédure le concernant et sans préjudice des dispositions prévoyant son intervention ou son consentement, être entendu par le juge ou la personne désignée par le juge à cet effet. Cet article, directement inspiré par l'article 12 de la convention des Nations unies relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989, consacre un véritable droit pour l'enfant à être entendu dans toutes les procédures le concernant. En effet, lorsque l'enfant en fait la demande, son audition est en principe obligatoire et ne peut être écartée que par décision spécialement motivée. Par ailleurs, de nombreuses autres dispositions légales rappellent l'importance de la parole de l'enfant et la nécessaire prise en compte des opinions qu'il exprime. Ainsi, par exemple, l'article 373-2-11 du code civil prévoit que le juge prend en considération les sentiments exprimés par l'enfant mineur dans les conditions prévues à l'article 388-1 lorsqu'il se prononce sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale, après la séparation des parents. En matière d'assistance éducative, le mineur capable de discernement est systématiquement entendu, à moins que son âge ou son état ne le permette pas. L'audition du mineur par le juge des tutelles est obligatoire dans la procédure d'émancipation, de même qu'avant toute réunion du conseil de famille. Enfin, dans un certain nombre d'autres domaines, le consentement du mineur de plus de treize ans est désormais requis pour valider un acte ou une opération. Il en est ainsi pour un changement de prénom ou de nom qui n'est pas la conséquence de l'établissement ou de la modification du lien de filiation et pour une adoption simple ou plénière. Si l'importance de la parole de l'enfant doit être réaffirmée, son audition par le juge ne peut pour autant être érigée en principe généralisé. En effet, on ne saurait occulter le fait que celle-ci peut s'avérer contraire à son intérêt. Elle peut même, dans certaines procédures comme le divorce, constituer une épreuve très douloureuse pour lui, culpabilisante et contraire à sa volonté. Il convient de respecter le droit au silence de l'enfant et d'éviter, dans certains conflits, l'instrumentalisation dont il peut être l'objet par ses parents. Par ailleurs, le recueil de ses sentiments dans le cadre de l'enquête sociale ou de l'expertise médico-psychologique, par des professionnels qualifiés, et en dehors du cadre judiciaire, est parfois une solution plus souple et plus adaptée que l'audition par le juge. Cette solution est d'ailleurs conforme à la convention des Nations unies précitée, qui permet expressément l'intermédiation d'un représentant ou d'un organisme approprié pour l'audition de l'enfant.
SOC 12 REP_PUB Alsace O