Texte de la QUESTION :
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M. Christian Jeanjean attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le champ d'application de la loi du 3 décembre 2001, codifiée par les articles 763 et 764 du code civil, qui accorde au conjoint survivant sur sa résidence principale occupée pendant toute la durée de son mariage une jouissance gratuite durant la première année qui suit le décès de son conjoint (art. 763, qui précise que ce droit est réputé issu direct du mariage et non un droit successoral et qu'il est d'ordre public) et un droit viager d'habitation s'il n'y a pas d'opposition de son époux (art. 764). Il lui demande si ces droits pourraient librement s'exercer dans deux cas : si l'habitation principale a été acquise sous le régime d'une SCI et si elle est comprise dans un ensemble de biens immobiliers donnés, en indivisis, en avancement d'hoirie avec réserve d'usufruit, par le decujus, antérieurement à son remariage, à ses deux enfants légitimes issus d'une précédente union. Dans ces deux cas, une éventuelle interprétation restrictive de ces deux articles précités ne serait-elle pas susceptible de faire obstacle au droit légal d'habitation du conjoint survivant sur sa résidence principale et matrimoniale et, en cette hypothèse, surtout en ce qui concerne toutes les dispositions de l'article 763, n'aboutirait-on pas à une situation qui irait à l'encontre de l'esprit général de la loi du 1er décembre 2001 promulguée pour assurer la protection du conjoint survivant en matière d'habitation ?
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Texte de la REPONSE :
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Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que la loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001 relative aux droits du conjoint survivant et modernisant diverses dispositions du droit successoral donne la possibilité au conjoint survivant de bénéficier d'un droit d'habitation, soit temporaire, soit viager, sur le logement constituant la résidence principale des époux au jour du décès. Cette possibilité n'est ouverte, aux termes des articles 763 et 764 du code civil, que si le logement dépend en totalité ou en partie de la succession ou, pour le droit de jouissance temporaire, s'il est assuré au moyen d'un bail à loyer. Dans l'hypothèse où l'habitation familiale a été acquise par le biais d'une société civile immobilière, le logement appartient à la société et non aux époux. Les conditions de propriété prévues par les articles 763 et 764 du code civil ne sont donc pas remplies. Par conséquent, le droit d'habitation conféré par ces articles ne pourra s'appliquer que si les époux ont pris soin de conclure avec la société un bail ou une convention d'occupation. En effet, dans ce cas, le conjoint survivant pourra prétendre, conformément aux dispositions de l'article 763 susvisé, au remboursement des loyers pendant l'année suivant le décès et pourra ensuite continuer le bail ou la convention d'occupation jusqu'à sa résiliation. En revanche, si le logement de la famille est assuré par un droit d'usufruit détenu par le défunt, le décès de ce dernier a pour conséquence l'extinction de ce droit, les nus-propriétaires devenant alors plein-propriétaires. Les conditions des articles 763 et 764 du code civil se trouvent à nouveau insatisfaites. Autoriser dans ces circonstances le conjoint survivant à habiter le logement familial, même de façon temporaire, conduirait, d'une part, à étendre le dispositif civil, et, d'autre part, à faire peser sur les nus-propriétaires une charge non prévue.
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