FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 39357  de  M.   Cornut-Gentille François ( Union pour un Mouvement Populaire - Haute-Marne ) QE
Ministère interrogé :  intérieur
Ministère attributaire :  intérieur
Question publiée au JO le :  18/05/2004  page :  3587
Réponse publiée au JO le :  31/08/2004  page :  6839
Rubrique :  police
Tête d'analyse :  personnel
Analyse :  commission nationale de déontologie de la sécurité. rapport. conclusions
Texte de la QUESTION : M. François Cornut-Gentille attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés localessur le rapport de la Commission nationale de déontologie de la sécurité. Dans son troisième rapport, la commission nationale de déontologie de la sécurité renouvelle des recommandations qu'elle juge évidentes mais qu'elle constate passées au second plan, à savoir la rigueur permanente qui doit caractériser l'action des policiers et des gendarmes dans leurs interventions et dans la procédure, et la nécessité de proportionner strictement toute mesure de coercition à la situation et au comportement qui la justifie. Un tel rappel ne manque pas de surprendre par sa force et son contenu. Aussi, il lui demande de préciser les mesures prises par le Gouvernement pour informer les forces de l'ordre des principales recommandations de la Commission nationale de déontologie de la sécurité.
Texte de la REPONSE : La police de proximité, dont le principe a été fixé par l'article 3 de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité du 21 janvier 1995, répond à une approche de prévention et constitue un des outils de reconquête des quartiers où l'autorité de l'État était plus particulièrement contestée au cours des dernières années. Le rétablissement de la sécurité en tous lieux constitue à cet effet une priorité de l'action gouvernementale. Dès à présent, la baisse du niveau général de la délinquance de mai à décembre 2002 puis en 2003 (- 3,38 %) et qui se confirme pour le premier semestre de l'année 2004 (- 3,74 %) marque un revirement attendu par nos concitoyens, et notamment les plus modestes d'entre eux qui sont aussi ceux qui souffrent le plus de l'insécurité. Ce recul manifeste de l'insécurité s'appuie sur le renforcement des capacités d'investigation judiciaire des forces de l'ordre réalisé par la loi du 29 août 2002 d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, la loi du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, et sur l'interpellation des auteurs d'infractions, qui constituent le fondement même de l'action de sécurité publique : appréhender les délinquants et les remettre à la justice. C'est dans ce contexte que le ministre de l'intérieur a souhaité développer prioritairement la présence nocturne et le travail d'investigation, qui conditionnent le maintien même de la sécurité de proximité. Pour autant, M. de Villepin a adressé le 10 mai dernier aux préfets, ainsi qu'aux directeurs généraux de la police et de la gendarmerie nationales, une circulaire les invitant à prendre connaissance du rapport de la Commission nationale de déontologie de la sécurité, afin d'en tirer toutes les conséquences qui s'imposent au plan opérationnel et dans le domaine de la formation initiale et continue. À ce stade, il convient de relativiser l'évolution du nombre de dépositions enregistrées par la CNDS en 2003 (soixante-dix contre une quarantaine en 2002) en raison : de l'intérêt accordé par les usagers à toute nouvelle institution offrant une perspective supplémentaire de recours pour l'exercice de leurs droits, ainsi que de la médiatisation de la commission qui a contribué à une meilleure connaissance de son existence auprès de nos concitoyens ; du nombre réel des cas de violence relevés par les corps de contrôle de la police nationale au regard de la nature des saisines dont ils font l'objet, soit 38,3% ; du volume de l'activité policière qui s'est traduit par une augmentation du nombre de personnes mises en cause (+ 5,45 %), du nombre de faits élucidés (+ 6,07 %) et du taux d'élucidation (28,83 % contre 26,27 % en 2002) ; de la possibilité accordée par la loi du 18 mars 2003 sur la sécurité intérieure à la « défenseure » des enfants de saisir directement la CNDS, sans passer par l'intermédiaire d'un parlementaire, ce qui augmente les cas de saisine de cette commission, en raison de la part prise par les mineurs dans la délinquance (cette nouvelle possibilité a été utilisée deux fois par la défenseure des enfants en 2003). S'agissant de ce rapport, il faut rappeler que, conformément aux dispositions du statut général des fonctionnaires (articles 28 et 29 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires de l'État), ceux-ci, quel que soit leur rang dans la hiérarchie, sont responsables de l'exécution des tâches qui leur sont confiées. Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose en effet à une sanction disciplinaire, sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale. Les fonctionnaires de la police nationale, pour leur part, sont astreints non seulement au strict respect de ces obligations, mais également à celui des obligations résultant du décret du 18 mars 1986 portant code de déontologie de la police nationale, ainsi que de l'arrêté ministériel du 22 juillet 1996 portant règlement général d'emploi de la police nationale, et résultant de la nature de leurs missions, des conditions d'exercice de celles-ci, ainsi que de l'ampleur des sujétions qui leur incombent. Ce texte aborde notamment le comportement des fonctionnaires lors du recueil des dépositions, celui à l'égard des auteurs d'infraction et l'usage des pouvoirs de contrainte. En particulier, l'article 7 du code de déontologie précité impose aux policiers des obligations d'intégrité, d'impartialité, d'exemplarité et de respect absolu des personnes, quelles que soient leur nationalité et leur origine, leur condition sociale ou leurs convictions. L'article 10 de ce même code prévoit par ailleurs que toute personne appréhendée est placée sous la responsabilité et la protection de la police et qu'elle ne doit subir, de la part des fonctionnaires de police ou de tiers, aucune violence ni aucun traitement inhumain ou dégradant. Le fonctionnaire de police qui serait témoin d'agissements prohibés par le présent article engage sa responsabilité disciplinaire s'il n'entreprend rien pour les faire cesser ou néglige de les porter à la connaissance de l'autorité compétente. Les manquements par des policiers à leurs obligations déontologiques conduisent ainsi à l'ouverture d'enquêtes de commandement et si nécessaire de l'inspection générale de la police nationale. À cet égard, l'article 111-8 du règlement général d'emploi de la police nationale précise que l'exercice du pouvoir disciplinaire relève de l'autorité hiérarchique qui peut effectuer, dans les formes administratives appropriées, les investigations qu'elle estime nécessaires ; le fonctionnaire est tenu de se prêter aux démarches engagées, conformément aux dispositions applicables ou en vigueur dans la fonction publique de l'État. Lorsque les faits reprochés sont établis et peuvent être qualifiés, au regard des obligations déontologiques, de faute professionnelle, une procédure disciplinaire est engagée, les mêmes faits pouvant, par ailleurs, être le cas échéant qualifiés au plan pénal et poursuivis par les tribunaux compétents. Un guide pratique de déontologie de la police nationale élaboré par le Haut Conseil de déontologie est diffusé depuis le premier semestre 1999 dans toutes les structures de formation initiale et continue de la police nationale. Grâce à cette formation initiale et continue qui leur est dispensée et aux instructions générales de service, ces dispositions, et les sanctions encourues, sont parfaitement connues des fonctionnaires de la police. La hiérarchie de la police nationale veille ainsi à l'exigence du respect scrupuleux de leurs obligations par ses personnels, notamment à l'occasion de contrôles d'identité dont la réalisation s'effectue sous la direction et le contrôle d'un OPJ, lui-même soumis à l'autorité judiciaire, s'agissant d'une mission de police judiciaire susceptible de sanctions (retrait d'habilitation judiciaire, poursuites le cas échéant...). Les programmes de scolarité des trois corps de la police nationale visent à donner aux futurs policiers le maximum de capacités professionnelles et, à cette fin, mettent l'accent sur le respect de la citoyenneté, des valeurs de la République. Dans le cadre du nouveau schéma directeur de la formation dans la police nationale (2003-2007), des instructions ont été données pour que cet accent soit encore renforcé. Ainsi les dispositions du code de déontologie précité sont rappelées tout au long de la formation des policiers, étant précisé que les dispositions de la convention des Nations unies contre la torture sont prises en compte dans l'enseignement des règles déontologiques. Pour le corps de maîtrise et d'application de la police nationale, un volume horaire d'environ 20 heures y est réservé sous forme de cours magistraux, de conférences ou d'exercices pratiques. L'objectif de formation repose sur l'apprentissage des droits et devoirs inhérents à la profession de policier. Il est particulièrement présent lors des enseignements consacrés aux techniques policières et plus particulièrement lors des auditions ou interrogatoires. Pour les élèves officiers et commissaires, un volume horaire moyen de 10 heures est consacré à cette matière, avec la particularité d'être abordé de manière transversale aussi bien à l'occasion des enseignements professionnels que lors des stages pratiques. En outre, la formation des commissaires inclut l'étude de la convention européenne de lutte contre la torture et les traitements inhumains dégradants et les droits fondamentaux de l'homme. Cet aspect qui est rappelé lors des cours de procédure pénale consacrés aux auditions fait l'objet d'une attention particulière dans le cadre du travail de rénovation portant actuellement sur la scolarité des officiers et gardiens de la paix. La pratique de l'interrogatoire se traduit par des actions de formation telles que l'initiation à l'audition-interrogatoire sous enregistrement vidéo, l'initiation à la psychologie, au témoignage et à l'entretien cognitif. Cette thématique est développée transversalement lors d'actions de formation relatives aux victimes, à l'audition de l'enfant victime, dans le cadre des disparitions inquiétantes, et celui sur l'audition des auteurs d'infractions. Dans ces formations, les formateurs abordent systématiquement les principes déontologiques à l'occasion des stages consacrés aux actes de police et aux situations professionnelles, avec comme objectif l'acquisition d'une maîtrise exemplaire des comportements. De même, la formation dispensée pour l'obtention de la qualité d'officier de police judiciaire de l'article 16 du code de procédure pénale prévoit 31 heures d'enseignements relatives aux libertés publiques, et le développement des compétences en matière d'interrogatoire est réalisé au travers d'exercices pratiques permettant une mise en situation. De plus, avec le concours de l'inspection générale de la police nationale, des cas réels anonymes sont présentés en formation initiale et continue. En outre, en souscrivant aux engagements européens et internationaux de protection des droits de l'homme, la France s'est également engagée à prévenir les mauvais traitements sur les personnes privées de liberté, en veillant notamment à ce que les droits de l'homme fassent partie intégrante de la formation des agents chargés de l'application de la loi. Le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales a indiqué à l'Assemblée nationale le 12 mars 2003 que le Gouvernement mettra autant d'énergie à poursuivre et à arrêter les délinquants qu'à faire respecter la dignité humaine partout et pour qui que cela soit. À cet effet, le ministre avait adressé dès le 11 mars 2003 aux responsables de la police et de la gendarmerie nationales des instructions relatives à la garantie de la dignité des personnes placées en garde à vue, qui précisent que la violence dont les policiers peuvent être amenés à faire usage n'est légitime que dans la mesure où elle s'exerce de façon proportionnée au but à atteindre et dans le respect du droit à l'intégrité physique et morale édicté par la convention européenne des droits de l'homme. Elles rappellent l'attention qu'il convient de porter aux conditions matérielles de la garde à vue (surveillance, soins, alimentation, repos, hygiène), aux droits du gardé à vue (notification de la possibilité de faire prévenir sa famille sans délai, sauf décision contraire du procureur de la République, enregistrement audiovisuel des interrogatoires de mineurs soumis à ce régime, recours à un interprète en langue des signes en cas de surdité du prévenu) et indiquent qu'un officier de police, ou à défaut un gradé du corps de maîtrise et d'application, aura la charge du suivi administratif de l'ensemble des personnes gardées à vue, en liaison avec les OPJ. Ces dispositions font l'objet d'instructions écrites, au niveau de chaque service de police ou unité de gendarmerie. De même, il est rappelé aux fonctionnaires de la police nationale et aux militaires de la gendarmerie nationale que dans le cadre des mesures administratives à l'égard d'un prévenu, présumé innocent jusqu'à ce qu'il soit jugé coupable par un jugement devenu définitif, la pratique de la fouille avec déshabillage systématique doit demeurer l'exception au profit de la palpation de sécurité qui devient le régime de droit commun. Si des vérifications plus poussées paraissent nécessaires, elles ne pourront l'être qu'après avis d'un OPJ détenant des éléments lui permettant d'apprécier la dangerosité des personnes concernées. Enfin, il est précisé que le menottage est soumis aux conditions édictées par l'article 803 du code de procédure pénale. Il est lié à la dangerosité de l'individu et le serrage excessif est bien évidemment proscrit. Dans ce contexte, l'attention de l'honorable parlementaire est appelée sur le caractère marginal des affaires de violences dont les policiers sont auteurs dans le cadre de l'exercice de leurs fonctions. La formation initiale ou continue, la pratique de la déontologie et le contrôle hiérarchique contribuant à donner à ces faits une nature exceptionnelle. Par ailleurs, il convient de préciser que le nombre de fonctionnaires de police blessés à l'occasion de missions de maintien de l'ordre et de missions anti-délinquance s'est élevé à 3 754 en 2003 contre 3 484 en 2002. L'honorable parlementaire peut être assuré de la détermination du ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales de faire respecter par les fonctionnaires de police les libertés individuelles et ainsi éviter les faits de violences policières.
UMP 12 REP_PUB Champagne-Ardenne O